Quand une saga littéraire est adaptée à l’écran, l’histoire doit forcément être remaniée pour correspondre au support utilisé. Game Of Thrones, la série adaptée des romans de George R. R. Martin, n’y fait pas exception. L’occasion pour DGS de vous faire découvrir 15 différences entre la série et les livres… ATTENTION, de nombreux spoilers sont présents dans cet article 😉
1. Le point de vue des personnages
La saga du Trône de fer est racontée à travers les points de vue de différents personnages : Ned Stark, Arya Stark, Tyrion Lannister, Daenerys Targaryen, etc. Chaque chapitre est simplement titré avec le nom du personnage et nous voyons l’histoire avancer à travers son point de vue. Nous avons donc accès à ses pensées, son propre regard : on y voit des choses que d’autres personnages ne peuvent pas savoir, mais il arrive également que nous ne voyions pas certains événements qui sont racontés plus tard dans le livre, à travers un autre point de vue de personnage. Dans le premier tome de la saga, nous sommes confrontés à l’emprisonnement de Ned Stark sous son propre point de vue tandis que son exécution est racontée du point de vue de sa fille Arya. Au fil des romans, le nombre de personnages « point de vue » fluctue, certains disparaissent et d’autres apparaissent.
Et bien que la série Game Of Thrones se repose beaucoup sur des monologues et dialogues, plus que dans d’autres séries, elle ne peut bien sûr pas rendre compte de toutes les pensées des personnages et ceux-ci sont donc moins nuancés. Comme les personnages doivent être rapidement et clairement établis, certaines décisions clé prennent moins de temps à être décidées ou le sont pour différentes raisons. Par exemple, dans le premier tome, Catelyn Stark incite son mari à prendre la position de « Main du Roi » à Port-Réal alors que dans la série, Ned prend une décision plus rapide, basée sur l’honneur et le devoir à accomplir. Et au contraire, la série réussit à offrir plus de profondeur à certains personnages absents des points de vue pendant un certain temps et arrivent à leur donner encore plus de substance : c’est le cas de Cersei Lannister ou encore de Robb Stark.
2. Les personnages spécialement créés pour la série
Il y a plus d’une centaine de personnages dans la saga du Trône de fer. Et malgré quelques « oublis » de la part de la série, les créateurs et scénaristes ne se sont pas privés pour créer leurs propres personnages originaux, qui ont plus ou moins d’importance. Ces personnages ont d’ailleurs souvent désorienté les lecteurs des livres qui se demandaient justement (et à juste titre) si ces personnages flambant neuf qui n’existent pas dans les romans auront un impact sur le déroulé de l’histoire. Dans certains cas, ils servent à rendre le « storytelling » (l’art de raconter une histoire) plus consistant, notamment Ros.
Dans d’autres cas, les personnages inventés sont là pour remplacer un personnage tiré du livre qui n’a pas été retenu par la production, comme c’est le cas de Locke (celui qui coupe la main de Jaime Lannister) qui remplace le personnage de Varché Hèvre dans les livres. Il y a aussi le cas Talisa Maegyr, la femme de Robb Stark dans la série, qui est à la fois un personnage tout à fait nouveau et qui a un rôle très différent de sa version romanesque. En effet, dans les livres, la femme de Robb s’appelle Jeyne Westerling et n’est pas présente lors des fameuses Noces pourpres. L’histoire d’amour entre Robb et Talisa a été créée de toutes pièces par les scénaristes qui, semble-t-il, avaient envie de raconter une romance plus fouillée que les événements décrits dans les romans.
3. L’âge des enfants Stark et de Daenerys Targaryen
De tous les changements effectués entre le matériau d’origine, les livres et la série, celui de changer l’âge des enfants Stark et de Daenerys Targaryen a le plus de sens. Dans le tout premier roman de la saga, les enfants sont présentés comme cela : Robb et Jon Snow ont 14 ans, Sansa a 11 ans, Arya en a 9, Bran 7 ans et Daenerys a 13 ans. Sur le papier, l’âge des enfants renforce leur innocence et le fait que même à un aussi jeune âge les pires choses peuvent leur arriver (Daenerys est mariée à un seigneur de guerre alors qu’elle a à peine atteint la puberté).
Pour une adaptation sur un média grand public où les codes sont très restrictifs, il était normal de ne pas « promouvoir » d’une façon ou d’une autre la violence et l’abus sexuel sur des mineurs.
4. Belwas le fort
Si on regarde de façon générale, la saga du Trône de fer et son adaptation télévisuelle ne semblent être qu’une succession de violence en tous genres et de dénouements souvent déprimants. Pour contrebalancer cela, la série possède quelques atouts « comiques » chez certains personnages : Hodor et sa simplicité, Samwell Tarly et sa naïveté, les répliques cinglantes d’Arya, etc. Mais de l’autre côté de l’océan, la partie du scénario de Daenerys manque un peu d’humour, malgré la présence de Daario Naharis. Dans le livre, cet effet comique est délivré par le personnage de Belwas le fort, un combattant eunuque bedonnant qui, même s’il est un combattant très violent, ne pense souvent qu’à manger. C’est une sorte de Homer Simpson médiéval et moins fainéant. Dans les livres, Belwas rejoint Dany à la fin du deuxième tome, au même moment que Ser Barristan. Dans la série, le personnage a été totalement effacé : ses actions ne sont pas particulièrement importantes et peuvent être effectuées par d’autres personnages (c’est le cas lorsque Daario affronte le champion de la cité de Meereen dans la saison 4). Pour beaucoup, la disparition de Belwas était logique mais reste tout de même une petite déception.
5. Les visions de Daenerys dans l’hôtel des Nonmourants
A la fin de la saison 2 de la série, Daenerys se rend dans l’hôtel des Nonmourants de la cité de Qarth pour récupérer ses dragons volés. Si dans le livre elle s’y rend de son plein gré, ce n’est pas le changement majeur qui a été opéré lors de la transposition du texte au média télévisuel. Dans les romans, cette visite dans l’hôtel des Nonmourants fait figure de mini voyage initiatique pour Daenerys. A l’intérieur, elle a des visions qui, si elles étaient montrées telles quelles en images, pourraient bien dévoiler de nombreux points majeurs d’événements à venir qui ne sont pas forcément apparus dans les livres. Les scénaristes de la série ont fait le choix de garder l’idée des visions mais de les atténuer, sûrement pour éviter les fameux « spoils » des saisons à venir et peut-être pour garder la surprise à ceux qui voudraient voir à quoi ressemble cette scène dans le 2e tome de la saga.
6. Le rythme des aventures de Daenerys
Même si elle est un des personnages les plus appréciés et les plus mémorables des livres, l’intrigue Daenerys n’est pas rythmée de façon régulière. Ce qui crée une intrigue un peu plus mince dans la saison 2 que lors de la première, durant laquelle beaucoup d’événements majeurs se sont produits. Du coup, les scénaristes ont ajouté plus d’embûches à son chemin, plus d’événements dramatiques pour justifier sa place de protagoniste majeur dans la série. Il a résulté d’une domestique tuée (alors qu’elle survit dans les livres), des dialogues encore plus consistants que ce qu’il se passe dans les romans, et des prophéties différentes. L’intrigue possède le même point A et point B mais les choses qu’il y a entre ces points sont différentes d’un média à l’autre. Depuis la saison 2, la série a pu revenir sur les rails déjà posés des romans, mais il est très possible qu’une telle situation se reproduise à l’avenir, aussi bien pour Daenerys que pour d’autres personnages.
7. Les mystères et l’histoire de Westeros
Dans la saga du Trône de fer, les mystères et les intrigues ne trouvent parfois leur résolution que plusieurs chapitres ou tomes plus tard. L’univers contient une tonne de mystères, de légendes et de mythes qui enrichissent l’intrigue des romans. Dans la série, il faut faire un choix de « mystère à résoudre » et dans la saison 1, le mystère principal était d’éclaircir l’ascendance réelle des rejetons de Cersei (Joffrey, Myrcella et Tommen). Un mystère qui est le moteur de beaucoup d’événements majeurs de cette saison : l’arrestation de Ned Stark en pôle position. Mais dans les livres, il y a au moins une demi-douzaine d’histoires de ce genre qui n’attendent qu’à être résolues et expliquées (bien sûr, le fait que George R. R. Martin dispose d’une quantité presque infinie de pages à écrire joue en sa faveur). Certaines intrigues lues dans les livres ne trouveront probablement jamais de réponse dans la série.
8. Harrenhal
Que ce soit dans la série et dans la saga littéraire, le temps qu’Arya passe dans le château en ruines d’Harrenhal est censé être formateur puisqu’elle y est pratiquement seule, à la merci des ennemis et qu’elle y apprend de dures leçons sur la façon de rester en vie et sur le coût d’une vengeance. Une leçon qui prend une forme totalement différente entre les deux supports. Dans le deuxième tome de la saga, Ayra passe son temps à se terrer dans les recoins cachés du château pour échapper à certains tortionnaires particulièrement vicieux. Elle utilise les 3 morts que lui a promis Jaqen H’ghar mais se rend vite compte qu’elle les a utilisés pour du menu fretin. Elle manipule Jaqen pour que celui-ci l’aide à tuer plus de 3 personnes et ainsi libérer des soldats alliés à son frère Robb. Les hommes reprennent le fort avant que Roose Bolton n’arrive et Arya devient son échanson.
Dans la série, Arya part avant que les hommes du Nord n’arrivent et au lieu d’être l’échanson de Roose Bolton, elle est celui de Tywin Lannister, l’un des principaux responsables de la situation de sa famille et dont elle a juré de se venger. La relation entre les deux est tantôt tendue tantôt attachante : Tywin montre un peu d’humanité et de paternalisme à l’encontre d’Arya (il ne sait pas du tout qui elle est réellement) et en profite pour lui enseigner certaines leçons de vie qui lui serviront plus tard. Au final, elle manipule tout de même Jaqen pour l’aider à s’enfuir, elle, Gendry et un autre compagnon. La série offre ainsi un développement de personnages très intéressant et une exposition plus forte à Tywin Lannister dont le rôle prend plus d’importance de saison en saison.
9. Le timing
La série a fait une petite frayeur aux fans des romans lorsque, dans la saison 2 qui est censée correspondre au 2e roman, elle a « oublié » d’introduire des personnages très importants pour la suite de l’arc narratif de Bran : Jojen et Meera Reed. Heureusement, ceux-ci apparaissent finalement à la saison 3 (qui correspond au début du troisième livre). Ce n’est pas la première fois que les scénaristes de Game Of Thrones modifient le timing de l’arrivée de certains personnages : pour la plupart, c’est pour une simple et bonne raison : renforcer leur impact sur le téléspectateur.
Les lecteurs des livres ont même eu peur que les Reed n’apparaissent jamais dans la série et soient remplacés par des personnages inventés de toutes pièces. De même, le rôle de Ramsay Snow, le tortionnaire sadique de Theon Greyjoy depuis la saison 3, est présent depuis le deuxième tome dans la saga littéraire : il se fait passer pour un clochard inutile et un peu perdu qui aide parfois Theon. Tout ça pour révéler sa véritable identité plus tard, faisant passer tous ces événements comme une stratégie pour piéger Theon.
10. La maison Frey
L’une des scènes les plus mémorables de Game Of Thrones est celle des fameuses Noces pourpres. Pour les spectateurs, il a pu être difficile de savoir qui étaient exactement les Frey (à l’origine de ce massacre) et pourquoi ils sont aussi indignes de confiance dans tout Westeros. Dans la série, on les voit pour la dernière fois à la fin de la première saison, lorsque Catelyn Stark conclut une alliance avec eux sous la condition que Robb épouse l’une des filles de Walder Frey. Dans les livres, cette alliance avait d’autres conditions, notamment l’inclusion de nombreux hommes de la famille Frey dans les possessions nordistes. Deux petits-fils de Walder ont servi de domestiques à Winterfell où ils ne se sont pas privés pour brimer Bran Stark et son petit frère Rickon.
Un autre Frey sert d’écuyer à Roose Bolton, tandis que l’héritier de Walder Frey, ser Stevron Frey fait partie des principaux alliés de Robb, jusqu’à sa mort suite à une infection. Catelyn Stark considère même qu’avec lui toujours vivant, les relations Stark-Frey auraient encore pu être sauvées (et empêcher les Noces pourpres). La disparition complète des Frey dans la série fait que le massacre de la saison 3 est un grand choc pour les téléspectateurs ; alors que dans les livres, leur trahison est lente mais inévitable.
11. Plusieurs personnages en un
Alors que certains changements sont des déceptions compréhensibles (d’autres de simples déceptions), la série peut au moins se targuer d’avoir réalisé de beaux changements, comme la façon dont les scénaristes sont parvenus à combiner plusieurs personnages en un. Ces combinaisons servent notamment à simplifier certaines parties de l’intrigue mais aussi à renforcer la position de certains membres du casting.
L’un des exemples les plus flagrants a lieu lors de la 3e saison, lorsque Melisandre capture le bâtard de l’ancien roi Robert Baratheon, Gendry, pour prouver à Stannis la puissance que possède le sang d’un roi. Dans les romans, Gendry reste dans le Conflans et on n’entend plus vraiment parler de lui après qu’Arya a quitté la région. Le bâtard du roi utilisé par Melisandre dans la saga littéraire est un autre bâtard appelé Edric Storm. En combinant les deux personnages, la série permet à Melisandre d’avoir des interactions avec Thoros of Myr et même Arya Stark.
12. Le limier, Sansa et Arya
Chez les lecteurs de la saga, la relation entre Sansa Stark et Sandor Clegane (le Limier) fait partie de leurs intrigues favorites. Elle a même son propre surnom « Sansan ». Si la série joue quelque peu sur cette relation, on est loin d’avoir certains moments-clés des romans, notamment celui dans lequel le Limier raconte comment il a eu une partie de son visage brûlé à Sansa. Au contraire, Game Of Thrones joue surtout sur la dynamique qui s’est installée entre le personnage et Arya Stark. Ce qui a apporté un peu plus de profondeur au personnage de Sandor Clegane.
13. Politiques et religions
C’est un aspect parfois négligé, autant dans les livres que dans la série : la complexité du monde de Westeros, son histoire, ses nombreuses religions, etc. Bien que les romans soient massivement peuplés par des personnes au type de peau caucasien, il est rapidement révélé que les nordistes descendent en réalité des Premiers hommes, une peuplade différente des ancêtres de ceux qui habitent dans le sud comme à Port-Réal. De même, Daenerys et toute la dynastie des Targaryen est issue d’un autre peuple (disparu), les Valyriens.
De ce côté-là, la série a été à la hauteur en faisant le casting de nombreuses personnes à travers le monde pour incarner toutes ces différences, aussi bien des accents, de type de visage ou de couleur de peau.
14. Passer du sexe consentant au viol
Ce changement, qui a fait couler beaucoup d’encre depuis quelques semaines, a en réalité eu lieu deux fois dans la série. La première a eu lieu dans les tout premiers de Game Of Thrones : à ce moment, Khal Drogo force Daenerys à avoir une relation sexuelle avec lui après leur mariage. Dans les romans, c’est Daenerys (13 ans) qui séduit son nouveau mari et qui a une relation, pas forcément tendre, mais au moins consentante. D’un côté, la version de la série semble un peu plus logique que celle du roman où une simple jeune fille soumise se révèle être une séductrice très persuasive.
Le deuxième changement a eu lieu lors du troisième épisode de la saison 4, lorsque Jaime Lannister force sa sœur jumelle à avoir une relation sexuelle avec lui, juste à côté du cadavre de leur fils. Les amants ont enfin été réunis après avoir passé plus de deux saisons séparés mais Cersei explique qu’elle est passée à autre chose parce que Jaime a mis trop de temps à revenir à Port-Réal. Dans le troisième livre, la scène a également lieu, mais le tout est décrit d’une façon beaucoup plus tendre. L’autre aspect qui ne plait pas aux lecteurs est que cela perturbe fortement la rédemption du personnage de Jaime, peut-être de façon irréversible.
15. L’effet papillon
Comme l’adaptation est encore en cours (et que sa version romanesque l’est aussi, de surcroît), cette liste ne peut pas (encore) être exhaustive. D’ailleurs, l’un des points cités dans cette partie n’est arrivé que très récemment, au cours du quatrième épisode de la saison 4 de Game Of Thrones. Dans celui-ci, une toute nouvelle intrigue est créée pour les personnages de Bran, Jojen, Meera Reed, et même pour Jon Snow ! Une intrigue qui se sépare totalement mais momentanément de celles des livres et qui, comme pour le cas Daenerys de la saison 2, vise à rythmer un peu plus les parties liées à Bran Stark.
L’autre grand moment de cet épisode est l’inclusion des marcheurs blancs, qui n’avaient pas été vus depuis la fin de la saison 2 et qui, dans les livres, sont presque totalement absents depuis ce moment. Cette inclusion est elle aussi totalement inédite et va même plus loin puisqu’elle apporte des informations sur les marcheurs blancs que même les livres n’ont pas dévoilées ! Une pratique qui est justement appelée « l’effet papillon » par l’auteur de la saga, George R. R. Martin. Dans ces cas, certains changements qui ont eu lieu lors des saisons précédentes ne seront pas raccord avec les événements des prochaines saisons : en effet, certains personnages qui deviennent importants pour certains moments-clés dans les livres ont été tués très tôt dans la série. C’est pourquoi les scénaristes devront continuer dans cette différence par rapport aux romans dans les saisons à suivre. Et comme ça a été le cas pour les tout derniers épisodes diffusés aux États-Unis, il est très probable que d’autres déviations de ce genre aient lieu.
C’est passionnant de faire le parallèle entre ces deux histoires identiques mais différentes à la fois. À la rédaction, certains d’entre nous qui ont lu les livres avant la série ont trouvé certains oublis dommages mais continuent pour autant d’apprécier Game Of Thrones qui leur réserve de belles surprises ;). D’ailleurs, quand vous regardez l’adaptation d’un livre que vous adorez, faites-vous partie de ceux qui supportent mal les changements ou bien de ceux qui préférent différencier les deux œuvres ?
Par Corentin Vilsalmon, le
Source: AV Club