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Alors qu’ils couvraient les manifestations contre les violences raciales en réaction à la mort de George Floyd, plusieurs journalistes ont été ciblés, agressés puis arrêtés dans plusieurs villes des États-Unis par la police. Attention, nous vous informons que certaines images peuvent choquer dans le corps de l’article.

Des journalistes violemment visés par la police

Depuis le décès de George Floyd à Minneapolis le jeudi 25 mai dernier, les tensions se font nombreuses et les journalistes sont une des cibles principales au cœur des manifestations. Agressés, arrêtés, visés par des tirs : lors de manifestations aux États-Unis plusieurs dizaines de reporters ont été la cible de la police.

La scène la plus médiatisée est celle de l’interpellation d’Omar Jimenez, journaliste chez CNN, qui a été menotté en direct par des policiers à Minneapolis le 29 mai dernier. Il a ensuite été relâché. Mais plusieurs autres incidents ont également été rapportés, comme à Washington où Philip Lewis, éditeur au Huffington Post, a reçu une balle en caoutchouc. “Pas génial”, a-t-il commenté dans un tweet. Puis, ce fut au tour du journaliste Chris Mathias d’être arrêté, cette fois-ci à Brooklyn. “On me tire dessus ! On me tire dessus”, a de même crié à l’antenne la journaliste de la chaîne locale Wave 3, Kaitlin Rust, après avoir été ciblée lors d’une manifestation à Louisville pour dénoncer la mort de Breonna Taylor, ambulancière tuée chez elle à cause d’une confusion de la police. “Jamais la police ne m’avait tiré dessus. Jusqu’à samedi. Le masque d’un reporter qui était à côté de moi était taché de sang. Il était tellement choqué que quelqu’un a dû lui dire qu’il avait été touché”, a rapporté à son tour Molly Hennessy-Fiske, journaliste pour le Los Angeles Times blessée à la jambe.

Mais ce n’est pas tout. En effet, les journalistes couvrant les manifestations organisées dans plus de 70 villes des États-Unis après la mort de George Floyd ont également été victimes des violences policières. Plusieurs d’entre eux ont d’ailleurs rapporté avoir été la cible directe des tirs de balles en caoutchouc ou de gaz lacrymogènes et plusieurs ont été blessés. 50 journalistes ont été “agressés par les forces de l’ordre”, ont rapporté l’institut Freedom of the Press et le site Bellingcat

Parmi les cas les plus graves, celui de Linda Tirado a été particulièrement médiatisé. Cette photographe indépendante du Tennessee a effectivement été visée au visage par une balle en caoutchouc. Suite à cet incident, elle risque de ne plus recouvrer la vue de l’œil gauche. 

« Salut les gens, j’ai pris un traceur trouvé sur le visage (je pense, étant donné mon sac à dos) et je me dirige vers la chirurgie pour voir si nous pouvons sauver mon œil gauche Je ne vais pas être sur Twitter pendant que je suis sous morphine. »

C’est la première fois que je vois la police cibler la presse activement et intentionnellement

Cela fait quinze ans que je couvre des manifestations à travers les États-Unis. C’est la première fois que je vois la police cibler la presse activement et intentionnellement avec des balles en caoutchouc, des lacrymogènes et des arrestations. Ce sont des scènes qui rappellent la Chine ou l’Iran”, a rapporté Michael George, correspondant de CBS, dans un tweet. Son équipe a effectivement été ciblée par des balles en caoutchouc, comme s’ils étaient “au front”. 

Par ailleurs, le reporter de Vice News, Michael Anthony Adams, a imploré à plusieurs reprises en disant qu’il est journaliste. Un policier lui a cependant répondu “Je m’en fiche” avant de l’attaquer avec du gaz lacrymogène. Tom Aviles, photographe chez CBS, a également été victime d’une attaque de la part de la police : il a été frappé d’une balle en caoutchouc puis arrêté.

« RUPTURE : Le journaliste Tom Aviles a été arrêté alors qu’il couvrait les manifestations à Minneapolis »

On s’en fiche”, ont de surcroît répondu des policiers à Ali Veshi, journaliste de la chaîne MSNBC, qui a été atteint d’une balle en plastique dans la jambe alors qu’il avait crié “Média” en pleine rue et qu’il était relativement loin de la manifestation.

Les médias ou “ennemis du peuple”

Ces images particulièrement glaçantes des violences faites envers les journalistes sont d’autant plus choquantes que la presse et la police s’accordent généralement relativement facilement. Les journalistes sont également protégés par le premier amendement de la Constitution des États-Unis en ce qui concerne la liberté d’expression. Etre maltraités de la sorte n’est donc absolument pas une habitude pour eux.

La protection et la sécurité des journalistes sont essentielles, non pas par gentillesse mais parce que c’est une composante fondamentale de la manière dont nous réglerons ce problème”, avait affirmé Tim Walz, gouverneur démocrate du Minnesota, après que Oscar Jimenez, envoyé spécial de la chaîne CNN, a été arrêté puis menotté en direct. « Les autorités locales doivent ordonner à leurs forces de police de ne pas prendre des journalistes pour cible », a ajouté le Comité de protection des journalistes (CPJ).

Le 30 mai dernier, la Société des journalistes professionnels a également fait une annonce : “Si vous êtes manifestants, faites ce qui vous semble juste, mais ne nous empêchez pas de faire notre travail pour le public.” Dans un communiqué, elle a également dénoncé ces attaques envers les journalistes en rappelant qu’un reporter ne doit pas être mis en danger pour avoir rapporté des faits.

Malheureusement, cette prise de position n’est pas partagée par le président américain Donald Trump qui apprécie qualifier la presse d’”ennemie du peuple”. “Ironie du sort, le siège de CNN est attaqué par des émeutiers que la chaîne a présentés comme nobles et justes. Oops”, a-t-il d’ailleurs commenté dans un tweet. Malgré ces incidents, Donald Trump les a de nouveau mis en cause en les accusant de « faire tout ce qui est en leur pouvoir pour fomenter la haine et l’anarchie ». « Des déclarations comme celles-là mettent en danger la vie des reporters », comme l’a rapporté Jeffrey Goldberg, directeur du magazine The Atlantic.

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