Très peu développée aussi bien à l’échelle nationale qu’internationale, l’agriculture biologique est pourtant une solution d’avenir. Des chercheurs viennent de publier une étude sur l’avenir de la culture bio si elle était plus répandue. Il se trouve que d’ici 2050, celle-ci pourrait nourrir la planète si elle est utilisée dans 100 % des cultures.
QUE FAUDRAIT-IL FAIRE POUR RENDRE CETTE IDÉE POSSIBLE ?
Passer à une agriculture 100 % biologique ne peut se faire sans réaliser quelques concessions. Si l’objectif veut être atteint d’ici 2050, c’est à nous d’agir. En effet, le projet est réalisable à condition que nous réduisions le gaspillage alimentaire et que nous réduisions notre consommation de produits d’origine animale (viande, œufs, poissons, produits laitiers).
L’une des conditions requises pour passer au 100 % bio est aussi de réduire la concurrence existante entre la production de nourriture pour les hommes et pour les bêtes. Actuellement, un tiers des terres cultivables de notre planète est utilisé pour produire des céréales destinées aux animaux d’élevage. Si nous consommons moins de produits d’origine animale, nous pourrions donc les consommer. En changeant ces habitudes de consommation, le bio pourrait ainsi nourrir plus de 9 milliards d’être humains, et ce, sans augmenter la surface de terres agricoles.
DE NOMBREUX AVANTAGES POUR TOUS
Cette volonté de passer à une agriculture 100 % biologique a été le sujet central d’une étude menée par plusieurs chercheurs européens et rendue publique le 14 novembre. « C’est la première fois qu’on répond à la question de savoir si le bio peut nourrir le monde en intégrant à la fois la question des rendements, de l’occupation des sols, des effets environnementaux ou encore des émissions de CO2 ». Et il s’avère que ce choix pourrait avoir des conséquences aussi bénéfiques qu’inattendues.
L’intensification des cultures et l’utilisation massive de produits chimiques pour les traiter ont entraîné des impacts environnementaux néfastes : pollution de l’eau, réduction de la biodiversité… Les chercheurs ont donc élaboré différents scénarii où l’agriculture biologique prend plus ou moins de place sur Terre. Il s’avère que produire 100 % bio réduirait la pollution due aux pesticides, permettrait de ne plus utiliser d’engrais de synthèse et demanderait moins de ressources en énergies fossiles. Enfin, les émissions de gaz à effet de serre de l’agriculture bio seraient de 3 à 7 % inférieures à celles du scénario de référence.
UNE SOLUTION SANS FAILLE ?
Le bio est une solution qui, sur le papier, semble ne présenter aucun défaut. Cependant, deux détails empêchent encore chercheurs et producteurs de la mettre en place. Le premier est le manque d’azote. Passer au 100% bio entraînerait en effet un déficit en azote, élément nécessaire à la fertilisation des différentes cultures. Des alternatives pourraient permettre de lutter contre ce problème comme semer des légumineuses (capables de retenir l’azote) ou faire des cultures en sol couvert, mais elles restent insuffisantes.
L’autre problème est le prix de cette culture bio. Consommateurs et producteurs s’y retrouveraient-ils ? Selon Philippe Pointereau, co-auteur de l’étude, c’est possible car « l’agriculture reçoit beaucoup de subventions publiques. Il paraît logique que cet argent aille vers une agriculture et une alimentation durables pour minimiser les coûts externes. Pour les consommateurs, le prix de l’alimentation peut coûter un peu plus cher même en consommant moins de viande et de produits laitiers. Mais, compte tenu des bénéfices, peut-être investiront-ils plus dans leur alimentation. »
A l’heure actuelle, le bio ne représente que 1 % de la surface agricole mondiale (surface qui est de 6 % en France). S’il représente de nombreux avantages à la fois pour notre santé, notre alimentation et notre environnement, quelques questions subsistent avant de pouvoir mettre en place ce projet à échelle planétaire. Néanmoins, d’ici 30 ans, nous pouvons espérer voir des cultures 100 % biologiques capables de nourrir l’ensemble de la population sans trop nuire à notre planète.
Par Justine Manchuelle, le
Source: Le Monde
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