
Dans le désert du Néguev, au sud d’Israël, des archéologues ont mis au jour une tombe étonnante datant de la période ottomane. Contrairement aux normes de l’inhumation islamique, qui prescrivent une sépulture individuelle, cette tombe abrite les restes de deux personnes : une femme adulte et un garçon, probablement son fils.
Une exception aux rites islamiques
D’après les principes de la tradition islamique, chaque tombe ne doit accueillir qu’une seule personne, sauf dans des cas exceptionnels, comme des urgences. La découverte de cette sépulture double, située près de la ville bédouine de Rahat, intrigue les archéologues. Elle date de l’époque où la région était sous domination ottomane, entre le XVIe et le début du XXe siècle.
Les analyses au radiocarbone indiquent que la femme est décédée entre 30 et 50 ans, à la moitié du XIXe siècle. La tombe aurait été rouverte quelque temps après sa première utilisation pour accueillir le corps du garçon, âgé de 10 à 15 ans au moment de son décès. Les deux corps ont ensuite été ré-enterrés ensemble. Une petite pierre calcaire, rare dans les tombes islamiques, a été déposée à la tête de la tombe, probablement lors de cette réouverture.
The unusual grave of a Bedouin woman who may have been buried with her son was found in southern Israel. https://t.co/s4u2M3rKVJ
— Live Science (@LiveScience) June 11, 2025
Une décision motivée par des liens familiaux ?
Les chercheurs de l’Autorité des antiquités d’Israël (IAA) supposent que le garçon, initialement enterré ailleurs, a été déplacé pour reposer aux côtés de la femme, peut-être sa mère. Selon Yossi Nagar, archéologue à l’IAA, cette décision pourrait refléter une forte charge émotionnelle de la part de leurs proches, désireux de réunir les deux dans la mort. « L’aspect émotionnel de cet enterrement inhabituel est fascinant », explique-t-il.
La tombe se situe en outre à proximité des ruines d’une ancienne mosquée, probablement construite au VIIe siècle, ce qui pourrait indiquer une signification spirituelle particulière à cet endroit. Cependant, les raisons exactes de cette double inhumation restent mystérieuses. Nagar souligne : « C’est une pratique inhabituelle dans la tradition musulmane. Il y a forcément une histoire derrière cela. »
L’âge et le sexe des deux défunts ont été déterminés grâce à une analyse ostéologique des os et des dents. Toutefois, les chercheurs n’ont pas pu effectuer d’analyse génétique, en raison de la faible préservation de l’ADN dans le climat aride du Néguev. Jusqu’à présent, toutes les tentatives d’extraction d’ADN dans cette région se sont révélées infructueuses. Sans confirmation génétique, le lien familial reste hypothétique, même s’il paraît plausible au vu des indices morphologiques et du contexte de l’inhumation.
Un rare témoignage de la vie bédouine sous l’Empire ottoman
Cette tombe a été découverte en 2022 en bordure du site archéologique de Rahat, un secteur où l’on retrouve des traces d’occupation humaine remontant à l’âge du fer. La ville moderne est aujourd’hui peuplée majoritairement de Bédouins, descendants d’anciens nomades arabes.
L’étude dirigée par Yossi Nagar a été publiée dans la revue Atiqot, éditée par l’IAA. Elle apporte un éclairage précieux sur les pratiques sociales et religieuses des communautés bédouines pendant l’époque ottomane, une période qui s’étend dans la région du XVIe siècle jusqu’à la fin de la Première Guerre mondiale, lorsque l’Empire britannique a pris le contrôle de la Palestine historique.
Pour Uzi Baram, historien et archéologue au New College of Florida, qui n’a pas participé à l’étude, cette découverte est particulièrement significative. Il y voit une manifestation concrète des sentiments humains s’exprimant au-delà des normes religieuses. Selon lui, cette sépulture offre un aperçu rare de la vie des Bédouins, souvent absents des archives historiques. « C’est un instant figé dans le temps, capturé grâce aux fouilles et aux recherches archéologiques, révélant une facette méconnue de leur existence », déclare-t-il.
Par ailleurs, le squelette du tombeau familial d’Alexandre le Grand n’est pas celui de son père.