Aller au contenu principal

Les chercheurs savent enfin pourquoi les statues de la pharaonne Hatchepsout ont été brisées

Ils ont longtemps cru qu'elles avaient été détruites par vengeance

Statue détruite de la pharaonne Hatshepsout
— © The Metropolitan Museum of Art, Department of Egyptian Art Archives (M10C 71)

Les mystères entourant la destruction des statues de la célèbre reine-pharaonne Hatchepsout semblent enfin s’éclaircir grâce à une récente étude. Contrairement à ce que l’on pensait depuis un siècle, leur démolition n’était pas motivée par une vendetta personnelle de son successeur, mais par des pratiques rituelles spécifiques.  

Une théorie remise en question  

Pendant des décennies, les égyptologues ont cru que Thoutmôsis III, neveu et successeur d’Hatchepsout, avait ordonné la destruction de ses statues pour effacer son souvenir et la punir d’avoir accédé au trône en tant que femme. Cependant, une étude publiée dans la revue Antiquity remet en cause cette interprétation. D’après cette recherche, les statues auraient été détruites dans le cadre d’un rituel visant à neutraliser leurs pouvoirs surnaturels, et non pour nier l’existence d’Hatchepsout ou discréditer son règne.  

Hatchepsout n’était pas une souveraine comme les autres. Ayant régné entre 1473 et 1458 avant J.-C., elle fut l’une des rares femmes à endosser pleinement le titre de pharaon, un rôle alors réservé aux hommes. D’abord régente pour son beau-fils, Thoutmôsis III, elle finit par s’imposer comme dirigeante à part entière, reléguant son corégent au second plan.

Durant son règne, Hatchepsout multiplie les projets ambitieux. Elle fait ériger le célèbre temple de Deir el-Bahari, près de Thèbes (aujourd’hui Louxor), et lance une expédition commerciale ambitieuse vers la mystérieuse terre de Pount, une terre prospère dont la localisation exacte demeure inconnue. 

Destruction rituelle des statues  

Après sa mort, de nombreuses statues d’Hatchepsout furent retrouvées brisées et enterrées, notamment à Deir el-Bahari, où des fouilles dans les années 1920-1930 mirent au jour ces fragments. Les chercheurs pensaient jusqu’ici que Thoutmôsis III avait orchestré cette destruction par rancune. Pourtant, Jun Yi Wong, doctorant en égyptologie à l’université de Toronto, a découvert que ces statues avaient été méthodiquement désactivées selon un processus rituel courant dans l’Égypte antique.  

Contrairement à une destruction violente, les statues d’Hatchepsout ont été brisées à leurs points faibles (le cou, la taille et les pieds) sans que les visages ou les inscriptions aient été systématiquement altérés. Cette pratique, appelée « désactivation rituelle », reflète la croyance des anciens Égyptiens selon laquelle les statues royales possédaient une forme de vie. Les briser revenait à neutraliser leur pouvoir après la mort de leur propriétaire. 

Les archives égyptologiques et les découvertes archéologiques abondent de cas similaires. Wong rappelle notamment l’exemple célèbre de la cachette de Karnak, où des centaines de statues royales, désactivées selon les mêmes principes, ont été découvertes en dépôt. 

Une persécution politique plus qu’individuelle  

Cependant, Hatchepsout n’a pas été épargnée par des attaques posthumes. Ses images et inscriptions ont été systématiquement effacées sur plusieurs monuments, témoignant d’une campagne de persécution orchestrée par Thoutmôsis III. La destruction plus modérée de ses statues à Deir el-Bahari, comparée aux attaques violentes ailleurs, suggère que ces actes étaient motivés par des préoccupations politiques plutôt que par une animosité personnelle.  

Ce regard renouvelé sur la destruction des statues éclaire également la personnalité de Thoutmôsis III. Longtemps décrit comme un neveu amer désireux de laver l’affront d’avoir été écarté du trône, il apparaît désormais comme un souverain plus pragmatique, soucieux d’équilibrer les forces politiques et religieuses de son temps.

Selon Wong, il aurait été influencé par des impératifs rituels et politiques, notamment la crainte que le règne de Hatchepsout ne fragilise la légitimité masculine de la lignée royale. Il s’agissait donc, non d’effacer la mémoire d’une usurpatrice, mais de rétablir une continuité dynastique perçue comme menacée par son exception. Pour aller plus loin, découvrez le fabuleux destin d’Hatchepsout, l’une des seules femmes devenues pharaon.

Par Eric Rafidiarimanana, le

Source: Live Science

Étiquettes: ,

Catégories: ,

Partager cet article

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *