Des chercheurs ont récemment annoncé la découverte du plus ancien sperme fossilisé jamais découvert. Celui-ci a été observé à l’intérieur d’un crustacé préhistorique, ayant été piégé dans l’ambre il y a environ 100 millions d’années.

Un fossile particulièrement bien conservé

Les ostracodes font partie des restes fossiles les plus courants de l’Ordovicien à nos jours, soit une période de plus de 480 millions d’années. Cependant, la présence de parties molles se révèle extrêmement rare et les scientifiques n’observent généralement que des coquilles calcifiées. Dans le cadre de ces travaux présentés dans la revue PNAS, une équipe internationale de paléontologues s’est penchée sur un fossile particulièrement bien conservé d’ostracode femelle, qui se serait vraisemblablement retrouvé piégé dans l’ambre peu de temps après s’être accouplé.

Vue d’artiste d’ostracodes en train de s’accoupler — © YANG Dinghua

Appartenant à une nouvelle espèce préhistorique baptisée Myanmarcypris hui, le crustacé en question aurait vécu dans les eaux côtières et intérieures de ce qui est aujourd’hui le Myanmar, encadrées par des arbres produisant d’énormes quantités de résine. Les chercheurs ont estimé que les spermatozoïdes fossilisés découverts à l’intérieur de l’animal étaient vieux de 100 millions d’années, ce qui fait d’eux les plus anciens jamais découverts. Le précédent record concernait un gamète retrouvé dans un cocon fossilisé en Antarctique, vieux de « seulement » 50 millions d’années.

Dirigée par le Dr Renate Matzke-Karasz, géobiologiste à la Ludwig-Maximilians-Universitaet à Munich, l’équipe de recherche a analysé 39 ostracodes piégés dans un minuscule morceau d’ambre en s’appuyant sur la microtomographie assistée par ordinateur (microCT), technique d’imagerie permettant de générer de images 3D haute résolution, récemment employée pour « déballer » des momies d’animaux égyptiens.

Comparaison des différentes parties du corps du fossile femelle (en beige) par rapport à leurs analogues modernes (en gris). Avec les images (g) et (k) montrant l’organe reproducteur d’une femelle ostracode rempli de spermatozoïdes — © NIGPAS

« Nos travaux montrent que l’utilisation de spermatozoïdes géants est une stratégie reproductive tout à fait viable »

Les spermatozoïdes géants identifiés par les chercheurs étaient stockés dans une paire de réceptacles séminaux de l’un des ostracodes femelles, dans l’attente que les ovules arrivent à maturation. Si la plupart des animaux produisent de grandes quantités de minuscules spermatozoïdes pour augmenter les chances de fécondation, certains, comme les drosophiles et les ostracodes modernes, produisent un nombre restreint de spermatozoïdes surdimensionnés, souvent dotés de queues plus longues que l’animal lui-même.

Selon les chercheurs, chez ces espèces, des spermatozoïdes plus grands augmenteraient les chances de fécondation. Par conséquent, cette récente découverte constitue « un exemple ancien et avancé de spécialisation évolutionnaire ». « Nos travaux montrent que l’utilisation de spermatozoïdes géants est une stratégie reproductive tout à fait viable ayant cours depuis très longtemps sur Terre. Auparavant, on pensait que les animaux adoptant ce schéma à un certain moment de leur évolution étaient condamnés à disparaître très rapidement », souligne Matzke-Karasz.

« Cela représente en effet un coût énorme pour les animaux. Il faut produire de gros spermatozoïdes, les organes reproducteurs sont également plus volumineux, et l’accouplement dure longtemps. Donc beaucoup d’énergie biologique allouée à la reproduction », ajoute la chercheuse. « Vous pourriez donc penser que cela n’a pas de sens d’un point de vue évolutif, mais chez les ostracodes, cela semble fonctionner depuis plus de 100 millions d’années. »

Reconstruction numérique de différents ostracodes étudiés par les chercheurs — © NIGPAS
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gasiorkiewicz
gasiorkiewicz
3 années

ça doit être a Michel Drucker Non,?