
L’Univers regorge de mystères, mais la formation des étoiles reste l’un des plus fascinants. Bien que les étoiles soient à l’origine de nombreux éléments essentiels à la vie, comme le carbone ou l’oxygène, les mécanismes qui président à leur naissance échappent encore largement à notre compréhension. Grâce au télescope spatial James-Webb, les astronomes ont découvert que des champs magnétiques extrêmement puissants au centre de notre galaxie pourraient empêcher la formation d’étoiles dans une région pourtant riche en gaz.
Une nurserie stellaire perturbée par des filaments mystérieux
Sgr C se trouve à environ 200 années-lumière de Sagittarius A* (Sgr A*), le trou noir supermassif situé au centre de notre galaxie, dont la masse est environ quatre millions de fois celle du Soleil. Malgré des conditions qui devraient, en théorie, favoriser une intense activité stellaire, Sgr C donne naissance à bien moins d’étoiles que prévu. C’est précisément ce paradoxe que les récentes observations du télescope James-Webb ont permis de mieux comprendre.
Les données infrarouges fournies par le télescope spatial en 2023 ont permis aux scientifiques de percer les épais nuages de gaz et de poussière qui enveloppent Sgr C. En examinant cette pouponnière d’étoiles avec une précision inégalée, les chercheurs ont repéré des dizaines de filaments brillants, longs de plusieurs années-lumière, serpentant dans la région.
Ces structures fines et allongées, semblables à des aiguilles de plasma incandescent, ont surpris les astrophysiciens. « Nous ne nous attendions absolument pas à ces filaments », a confié Rubén Fedriani, chercheur postdoctoral à l’Instituto de Astrofísica de Andalucía, en Espagne, et coauteur de deux études publiées récemment dans The Astrophysical Journal.
Le rôle sous-estimé des champs magnétiques dans la formation stellaire
Ces filaments semblent être la manifestation visible de puissants champs magnétiques, déformés et renforcés par la turbulence du gaz en mouvement autour du trou noir géant. Selon les chercheurs, ces champs pourraient être suffisamment puissants pour bloquer ou ralentir le processus d’effondrement gravitationnel, nécessaire à la formation des étoiles dans les nuages moléculaires. Ce phénomène confinerait la matière dans des structures denses et allongées, visibles grâce aux observations du télescope James-Webb, et expliquerait pourquoi Sgr C forme moins d’étoiles que prévu.
Les observations du télescope James-Webb offrent pour la première fois une preuve directe que des champs magnétiques intenses peuvent freiner la naissance des étoiles, même à petite échelle. « C’est la première fois que nous voyons clairement à quel point les champs magnétiques peuvent influencer la formation stellaire », déclare John Bally, astrophysicien à l’université du Colorado à Boulder, qui a dirigé l’un des articles décrivant ces travaux.
Samuel Crowe, de l’université de Virginie, qui a conduit l’autre étude, abonde dans le même sens : « L’impact de ces champs sur l’écosystème stellaire, que ce soit dans notre galaxie ou dans d’autres, est encore mal compris. Cela ouvre une voie passionnante pour de futures recherches. »
Une pouponnière d’étoiles en voie d’extinction
Les données du télescope James-Webb ont également permis à l’équipe de John Bally d’identifier deux jeunes étoiles massives situées au cœur de Sgr C, entourées de paires de filaments parallèles. Ces structures pourraient délimiter les parois de cavités formées par de puissants vents stellaires. Ces interactions entre matière, champ magnétique et vent stellaire modifient l’environnement local au point de perturber le cycle classique de formation des étoiles.
En observant de près Sgr C, les chercheurs ont constaté que cette région avait déjà expulsé une grande partie de la matière nécessaire à la formation d’étoiles. Dans un tel contexte, il est probable que cette pouponnière stellaire ne soit plus active très longtemps. Selon Bally, Sgr C pourrait disparaître dans quelques centaines de milliers d’années — une durée insignifiante à l’échelle des 13,7 milliards d’années que compte l’Univers.
Ce constat marque peut-être la fin du cycle de vie d’une région autrefois prolifique en nouvelles étoiles. Mais il révèle surtout à quel point notre compréhension des processus stellaires est encore incomplète. Grâce aux instruments comme le télescope James-Webb, capables de scruter les recoins les plus obscurs de notre galaxie, les astronomes commencent à entrevoir des éléments de réponse aux grandes énigmes de la cosmologie.
Par ailleurs, James-Webb observe de mystérieuses structures au-dessus de la Grande Tache rouge de Jupiter.
Par Eric Rafidiarimanana, le
Source: Space
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