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Image d’illustration — © R. Tanaka / Wikimedia Commons

Au cœur de la Terre, un mystère profondément enfoui depuis des milliards d’années continue de susciter l’intérêt et la curiosité des scientifiques du monde entier. Le noyau terrestre, une région inaccessible et énigmatique, abrite des réponses cruciales sur la formation de notre planète et son évolution. Récemment, une avancée scientifique majeure a été réalisée grâce à la synthèse de cristaux d’hexaferrum, le matériau présumé être dominant dans le noyau.

Une enclume en diamant pour comprimer du fer

L’exploration de l’intérieur de la Terre est un défi herculéen. Le noyau de la Terre est composé principalement de fer, mais pas sous la forme que nous connaissons à la surface. Sous l’effet de pressions colossales, le fer adopte une structure cristalline différente, appelée hexaferrum ou fer epsilon (ϵ-Fe). 

Ce matériau est très difficile à étudier en laboratoire, car il n’est stable qu’à des pressions extrêmes. Cependant, les scientifiques ne se sont pas laissé décourager et ont utilisé des enclumes de diamant pour recréer ces conditions extrêmes en laboratoire, ouvrant ainsi la voie à de nouvelles percées.

La recherche menée par l’équipe dirigée par la physicienne Agnès Dewaele de l’université de Paris-Saclay en France s’est concentrée sur la création de monocristaux d’hexaferrum en utilisant des enclumes de diamant. Il s’agit d’un dispositif qui permet d’exercer une forte pression sur un échantillon placé entre deux pointes de diamant. En combinant cette pression avec de la chaleur, les chercheurs ont pu transformer le fer ordinaire en hexaferrum.

Une analyse détaillée des propriétés élastiques

Les chercheurs ont publié leur étude dans la revue Physical Review Letters. Ils ont expliqué comment ils ont mesuré les propriétés élastiques des cristaux d’hexaferrum qu’ils ont créés. Pour cela, ils ont utilisé une technique appelée diffusion inélastique des rayons X

Les chercheurs ont d’abord augmenté la pression à 7 gigapascals, soit environ 70 000 fois la pression atmosphérique au niveau de la mer, en plaçant des cristaux de ferrite dans une enclume en diamant à l’intérieur d’un appareil de chauffage sous vide. Ils ont également porté la température à 527 °C. Ils ont réussi à produire de l’austénite, également connue sous le nom de fer gamma, une phase intermédiaire. 

Ensuite, les cristaux d’austénite de l’équipe scientifique ont subi une transition régulée vers la phase hexaferrum à des pressions allant de 15 à 33 gigapascals et avec une moindre élévation de température. Grâce à l’utilisation d’une ligne de rayonnement synchrotron, une sorte d’accélérateur de particules qui se distingue par le maintien d’une orbite fermée.

Les résultats ont montré que l’hexaferrum présente une anisotropie, c’est-à-dire que ses propriétés élastiques varient selon la direction. Par exemple, les ondes acoustiques se propagent plus rapidement le long d’un axe particulier. Cette anisotropie persiste même lorsque la pression change, ce qui suggère que l’hexaferrum se comporte de la même manière dans le noyau interne de la Terre, où la pression peut atteindre 360 gigapascals.

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— © CharlesC / Wikimedia Commons

Une avancée majeure pour comprendre le noyau terrestre

L’étude des chercheurs représente une avancée majeure pour comprendre le noyau terrestre. En effet, nos connaissances sur cette partie de la planète sont limitées par les données sismiques, qui ne donnent qu’une image indirecte de sa structure et de sa composition.

En recréant le matériau du noyau terrestre et en analysant ses propriétés, les chercheurs peuvent comparer leurs résultats avec les observations sismiques et affiner leurs modèles. Ainsi, ils peuvent mieux comprendre les phénomènes qui se produisent au centre de la Terre, comme la dynamique du noyau interne et son influence sur le champ magnétique terrestre.

Les implications de cette recherche vont au-delà de la simple curiosité scientifique. Les techniques développées pourraient servir de sondes essentielles pour sonder les conditions extrêmes qui règnent au cœur de la Terre. Les chercheurs espèrent que leur méthode pourra être appliquée à d’autres matériaux qui existent dans le noyau terrestre.

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