Vous connaissez certainement quelques œuvre dystopiques : elles ont le pouvoir de donner un peu de sens à notre monde, de nous faire réfléchir. Si nous choisissons souvent d’utiliser les idées qu’elles dégagent à des fins presque philosophiques certains préfèrent mettre à profit les éléments qui les composent. C’est le cas de quelques entreprises qui commercialisent des produits à la fois effrayants et amusants dont les noms sont directement inspirés de la fiction.

Soylent

Soylent

Ce nom provient du film contre-utopique d’anticipation, Soylent Green (Soleil vert, 1973). L’histoire est celle d’un détective du futur qui découvre par hasard ce qui se cache derrière la production du Solyent, que le gouvernement propose pour résoudre la crise alimentaire qui sévit. Il s’agit de produits de synthèse, fournis par la multinationale « Soylent », dont le Soylent Vert fraîchement sorti sur le marché que les habitants s’arrachent. Cela vous fait froid dans le dos ? Eh bien, sachez qu’un ingénieur américain s’en est inspiré pour créer un substitut alimentaire liquide, censé remplacer la nourriture. Gloups ! Si vous voulez savoir de quoi est constitué le Soylent Vert dans le film, pourquoi ne pas le visionner ce soir ? Nous ne voudrions pas vous spolier un film vieux de 40 ans !

 

Soma

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L’oeuvre d’Aldous Huxley de 1931, Le Meilleur des Mondes , décrit un sombre futur où tout le monde est sous l’emprise d’une drogue appelée Soma, censée aider à la cohésion de la société. En 1959, les Américains estompent la frontière entre la fiction et la réalité avec un décontractant musculaire distribué sous la marque Soma. Non vous ne rêvez pas, il existe bien un médicament prescrit à la population sous le nom de Soma ! Et comme vous pouvez le voir sur l’article de journal ci-dessus, ce médicament était en libre service. Ça n’est pas franchement rassurant ! Apparemment dans les années 1960, de nombreux adolescents prenaient ces barbituriques pour “le plaisir”. Charmant.

 

Cyberdyne

Cyberdine

Souvenez-vous dans les films Terminator, une entreprise appelée Cyberdyne développe SkyNet, une machine conçue pour détruire la race humaine. Eh bien, une société en robotique nipponne a décrété qu’il serait de bon goût de s’approprier le nom de cette entreprise fictive. Oui, il existe donc une entreprise de robotique qui s’appelle Cyberdyne. Et vous voulez savoir ce qu’il y a de plus drôle là-dedans ? Cette société est surtout connue pour son cyborg HAL, dont le nom est inspiré du système avancé d’intelligence artificielle qui gouverne le vaisseau de 2001, l’Odyssée de l’espace et qui trahit son équipage… On dirait que la société Cyberdyne cherche vraiment les ennuis…

 

Skynet

Skynet

Revenons à la saga Terminator, la NSA (National Security Agency) possède un programme d’espionnage appelé Skynet. Remémorez-vous, dans la saga Terminator, Skynet est le programme d’intelligence artificielle du ministère de la Défense, responsable de la fin du monde dans une apocalypse nucléaire. Autant vous dire que ce nom n’inspire pas la confiance. Mais cela n’a pas empêché les cadres de la National Security Agency, visiblement peu cinéphiles, de nommer l’un de leurs protocoles d’espionnage, Skynet. Bien entendu, la version de la NSA se veut bien plus modérée, puisqu’elle est censée traquer les métadonnées téléphoniques de personnes soupçonnées d’activités terroristes. Ce n’est pas encore supposé mener à la fin du monde, mais sait-on jamais…

 

La bière Duff

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C’est vrai, la série Les Simpson n’est pas une fiction dystopique. Mais la bière fictive “Duff” de la série sert en quelque sorte d’élément parodique, dénonçant l’hyper consumérisme du marché de l’alcool, qui ferait n’importe quoi pour que leurs produits paraissent cool. Dans les années 1990, la bière Duff et le Duffman des Simpson se moquent des publicités des années 80 et 90, mettant en scène des femmes en bikini et des bellâtres qui se targuent d’avoir toutes les filles qu’ils veulent grâce à une bière.

Mais désormais, la bière Duff est réelle, du moins dans certains pays d’Amérique du Sud et en Floride. Cette production réelle de la bière Duff s’est faite sans l’accord de Matt Groening, qui condamne la commercialisation du produit. Les conséquences sur la série animée sont notables puisque les gags censés être cyniques tombent à plat et deviennent incompréhensibles. Par exemple, dans l’épisode « Et la cavalerie arriva » de la saison 14, Homer se moque de la crédulité de Van Houten qui suit aveuglément les panneaux qu’il a fabriqués pour le tromper, alors que lui-même obéit (aveuglément aussi) à la publicité Duff qui l’incite à boire de la bière. Or, les panneaux floutés (puisque Duff est devenu une marque) sont devenus illisibles dans les nouvelles versions, ce qui rend le gag incompréhensible. Rien n’indique que cette boisson devait reprendre le message transmis par les Simpson, mais le fait est que la production de Duff est un fabuleux exemple du consumérisme du 21e siècle. 

 
Robot

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Le mot robot semble être utilisé depuis toujours, mais en fait il fut inventé en 1921. Le mot vient d’une pièce de théâtre du genre science-fiction appelée R.U.R de l’auteur tchèque, Karel Capek. La pièce relate l’histoire d’une machine humanoïde qui se soulève contre ses maîtres humains. À cette époque, les automates existaient déjà depuis des années, mais lorsque Capek invente le terme robot au début des années 20, ils étaient sur le point de devenir de véritables personnages de la fiction d’anticipation. Aimez-les ou craignez-les, les robots ont définitivement été adoptés au cours du siècle dernier.

 

Margaritaville

Margaritaville

Dans les années 1977, Margaritaville n’était qu’une innocente petite chanson de Jimmy Buffet alors très inspiré par ses voyages dans les îles. Personne n’imaginait alors que ce morceau était en fait une sorte de prophétie dystopique totalement glauque. Les paroles parlent d’une salière perdue, d’une femme à blâmer et d’une blessure au pied, tout un tas d’allégories censées alerter l’auditeur sur le sombre monde dans lequel il vit. Sympathique. Aujourd’hui, cette chanson inquiétante (mais entraînante, avouons-le) a inspiré à son auteur, tenez-vous bien, une chaîne de restaurants familiaux. Ce qui n’a donc plus rien à voir avec l’oeuvre d’origine. Mais le business, reste le business. Si vous avez des doutes sur la dimension contre-utopique de la chanson, prenez donc le temps de lire ces paroles :

 

Grignotant un gâteau éponge

Regardant le soleil brûlant

Tous ces touristes couverts d’huile

Grattant ma guitare à six cordes

Sur la balançoire du porche de ma maison

Sens ces crevettes

Elles commencent à bouillir

 

Encore saoul à Margaritaville

Cherchant toujours ma salière perdue

Certaines personnes affirment qu’il y a une femme à blâmer

Mais je sais que personne n’est en faute

 

Je ne connais pas la raison

Je suis resté là toute la saison

Sans rien à montrer

à part peut-être ce nouveau tatouage

Mais c’est une vraie beauté

Une jolie Mexicaine

Comment est-elle arrivée là, je n’en ai pas la moindre idée

 

Encore saoul à Margaritaville

Cherchant toujours ma salière perdue

Certaines personnes affirment qu’il y a une femme à blâmer

Je pense que non, bordel ce pourrait être de ma faute

 

J’ai lancé mes sandales

j’ai marché sur une bouteille cassée

Mon talon coupé, j’ai dû retourner chez moi

Mais il y a de l’alcool dans le mixeur

et bientôt il va me donner

Ce mélange glacé

Qui me permet de tenir

 

Encore saoul à Margaritaville

Cherchant toujours ma salière perdue

Certaines personnes affirment qu’il y a une femme à blâmer

Mais je sais que c’est uniquement de ma faute

Oui, et certaines personnes affirment qu’il y a une femme à blâmer

Et je sais que c’est uniquement de ma faute

Plutôt angoissant, n’est-ce pas ? Le monde dépeint par cette chanson a l’air triste et maudit et nous donnerait presque des cauchemars ! Malgré cela, ce nom est aujourd’hui synonyme de bon temps en famille. 

 
Qu’en pensez-vous ? Faut-il s’inquiéter de ces appropriations parfois douteuses ? Admettez que certaines de ces sociétés jouent la carte de la provocation, sans doute pour attirer l’attention sur leurs produits. Si certains de ces choix s’avèrent inquiétants, l’histoire de la bière Duff nous fait quand même doucement sourire. Les fictions contre-utopiques sont censées nous effrayer et nous alerter sur l’avancée des nouvelles technologies, ne trouvez-vous pas cela insensé d’en faire un argument de vente ? Que pensez-vous de ces choix de noms ?

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