Le lac Victoria, jeune dans les termes géologiques avec seulement 16 000 ans d’existence, est devenu un véritable laboratoire d’évolution en temps réel. Avec une diversité de près de 500 espèces de poissons cichlidés, ce lac africain remet en question les idées traditionnelles sur l’évolution et l’hybridation. Une étude récente publiée dans la revue Science dévoile les mécanismes génétiques derrière cette extraordinaire diversité.
Un cadre temporel inattendu
L’étude récente menée par des chercheurs de l’université de Berne, de l’université de Cambridge et de l’Institut Wellcome Sanger dévoile l’origine de cette diversité. Ils ont découvert que toutes ces espèces descendent en fait de trois lignées initiales de cichlidés qui sont arrivées dans le plus grand lac africain il y a environ 16 000 ans.
Généralement, la diversification des espèces est un processus qui s’étale sur des millions d’années. Cependant, le cas du lac Victoria est un paradoxe fascinant. « Il est assez exceptionnel de voir autant d’espèces évoluer dans un délai aussi court, 16 000 ans seulement », a commenté le Dr Joana Meier de l’Institut Wellcome Sanger.
Cette rapidité est d’autant plus surprenante que le lac est jeune sur l’échelle géologique. Le contexte environnemental de ce lac, qui s’est rempli à nouveau après une sévère période de sécheresse, semble avoir catalysé cette explosion de la vie. Depuis leurs humbles origines, les cichlidés ont prospéré dans le lac Victoria, remplissant presque toutes les niches écologiques imaginables. Ils présentent une vaste gamme de formes, de tailles et de couleurs, ce qui leur confère une apparence unique.
L’hybridation, moteur surprenant de la diversité
Longtemps considérée comme une voie sans issue en matière d’évolution, l’hybridation entre différentes espèces a longtemps été négligée en tant que mécanisme de diversification. Mais le lac Victoria est un contre-exemple édifiant. Cette accélération de l’évolution s’expliquerait en partie par les conditions environnementales spécifiques du lac Victoria au moment de sa formation. Les eaux troubles du lac lors de sa formation ont rendu difficile la reconnaissance des espèces entre les cichlidés, provoquant une fusion génétique.
Cette hybridation n’était pas une impasse mais plutôt un début explosif. « Ces trois lignées ont vraisemblablement convergé dans le lac, se sont croisées et ont donné lieu à une grande variété d’hybrides, qui ont ensuite évolué en espèces distinctes », explique le Dr Meier.
Les cichlidés du lac Victoria se sont non seulement multipliés en nombre, mais ils ont également colonisé diverses niches écologiques. Leurs différences morphologiques et comportementales sont flagrantes. « Certaines espèces grignotent les algues, d’autres se nourrissent de zooplancton, et il y a même des prédateurs en haut de la chaîne alimentaire », souligne Meier, illustrant la complexité écologique résultant de l’hybridation.
L’impact au-delà du lac
L’hybridation ne se limite pas aux cichlidés ni même aux habitants aquatiques du lac Victoria. Selon Meier, « grâce aux technologies modernes de séquençage de l’ADN, nous découvrons que la plupart des espèces animales, y compris l’Homme, montrent des signes d’hybridation dans leur passé évolutif ».
Cette découverte a des implications sur notre compréhension de l’évolution dans son ensemble. Par exemple, des études génétiques récentes ont montré que les humains modernes portent des traces d’ADN de Néandertaliens et de Denisoviens, ce qui peut avoir des conséquences diverses sur la santé et l’adaptation à différents environnements.
Elles remettent également en question l’idée longtemps acceptée selon laquelle l’hybridation est généralement une impasse génétique. « Dans certaines conditions, il se peut que certains hybrides se portent mieux. Il est possible que dans la plupart des cas, ils ne le soient pas, mais que dans certains cas, ils le soient », conclut le Dr Meier.
Par Eric Rafidiarimanana, le
Source: IFL Science
Étiquettes: poisson, lac-victoria
Catégories: Actualités, Animaux & Végétaux
Ce serait parfait si la photo représentait des cichlidés du lac Victoria et pas du lac Malawi
On n’a qu’à comparer l’hybridation à la reproduction consanguine. Quel est des deux le pire mode de reproduction ? Et que dire de la reproduction asexuée dans le temps ?
Ce sont des cichlides du lac Malawi en photo…ceux du lac Victoria disparaissent peu à peu à cause de la prédation des perches du nil, qui y ont étés introduites pour la pêche et le commerce ….