La Fédération nationale des agents immobiliers (FNAIM) envisage de mettre en place un fichier recensant les locataires en retard de trois mois dans le paiement de leur loyer. Une idée qui suscite la polémique et fait craindre aux associations une stigmatisation des locataires.

Un fichier national des « mauvais payeurs »

À la manière du fichier national recensant les interdictions bancaires, la FNAIM envisage de mettre en place dès 2021 une liste noire des locataires mauvais payeurs. Le lancement du fichier Arthel coïnciderait avec la mise en application de la loi Nogal, qui instaurera pour les administrateurs de biens un nouveau type de mandat de gestion visant à offrir aux propriétaires la garantie de percevoir un loyer tous les mois, même en cas d’impayés. Selon le président de la FNAIM, ce fichier constituerait un outil précieux qui permettrait aux professionnels d’apprécier plus facilement le risque locatif.

Consultée et alimentée uniquement par les professionnels (les propriétaires n’y auraient pas accès), cette base de données centralisée recenserait la totalité des locataires en retard de trois mois dans le paiement de leur loyer, que ces mois soient ou non consécutifs. Toujours selon la FNAIM, les locataires disparaitraient du registre dès le paiement de leur dette, ou automatiquement après une période de trois ans. Ces derniers seraient informés de leur inscription et de leur retrait du fichier et disposeraient pas ailleurs d’un droit de rectification, afin que celui-ci soit le plus transparent possible.

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« Une source de discrimination et de stigmatisation »

Cette annonce polémique n’a pas manqué de susciter de vives réactions dans les rangs des associations de locataires. « Ce fichier est purement scandaleux. C’est une atteinte à la vie privée et une barrière supplémentaire à l’accession au logement. Un impayé de loyers peut arriver à un locataire de bonne foi », a estimé Eddie Jacquemart, président de la Confédération nationale du logement (CNL). Même son de cloche du côté de la Consommation Logement Cadre de vie, qui voit en cette liste noire « une source de discrimination et de stigmatisation ».

« Si la FNAIM ne fait pas marche arrière, nous répondrons par un livre noir des professionnels qui ne restituent pas les dépôts de garantie, facturent des frais injustifiés et font de la discrimination dans l’accès à la location », a déclaré le président de la CNL, qui se dit prêt à envoyer les courriers nécessaires afin que la création de ce registre, qui ne semble pas non plus faire recette auprès des syndicats de propriétaires, soit suspendue.

Contactée par le journal Le Monde, la Commission nationale de l’information et des libertés (CNIL), autorité indépendante chargée de la protection des données personnelles, a de son côté déclaré ne pas avoir eu connaissance du projet, contrairement à ce qu’affirme la FNAIM, et précisé « accorder une attention toute particulière à ces fichiers de mauvais payeurs et à ces listes noires, au regard des risques qui pèsent sur les droits et libertés des personnes concernées ».

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