
Récemment, dans le cadre d’une nouvelle étude, des archéologues ont découvert des dents de quatre membres de l’espèce Paranthropus robustus, un parent humain bipède ayant vécu il y a entre 1,8 et 1,2 million d’années, dans la grotte fossilifère de Swartkrans, située sur le site africain du berceau de l’humanité. Grâce à une technique de pointe d’analyse de l’émail, ils ont trouvé de nouvelles informations intéressantes au sujet de ces parents. Explications.
Une analyse de protéines
« L’objectif est de comprendre l’arbre généalogique humain à l’aide de protéines », a déclaré Claire Koenig, chercheuse postdoctorale à l’université de Copenhague et co-auteure de cette nouvelle étude publiée dans la revue Science. « Mais, actuellement, notre capacité à distinguer les différentes espèces est limitée par le faible nombre de protéines différentes présentes dans l’émail. »
Pour cette nouvelle étude, une équipe internationale de chercheurs dirigée par Palesa Madupe a utilisé l’analyse paléoprotéomique pour aller au-delà des limites de l’ADN ancien et comprendre les gènes de quatre hominidés qui ont vécu il y a environ 2 millions d’années. Ils ont concentré leur analyse protéomique sur quatre individus de Paranthropus robustus, possiblement tous morts à peu près au même moment. Ils ont pu identifier des peptides spécifiques d’AMELY, présents dans l’émail dentaire des mâles, chez deux individus. Les deux autres individus présentaient un niveau d’AMELX élevé, ce qui signifie qu’il s’agissait probablement de femelles.
« Déterminer correctement le sexe d’un fossile est important en paléoanthropologie, car la plupart des hominidés présentent un dimorphisme sexuel, les mâles étant en moyenne plus grands que les femelles », a précisé Palesa Madupe. « Alors que nous nous attendions à ce que cette espèce comporte des individus plus grands et d’autres plus petits, nous avons découvert un résultat surprenant : un individu de P. robustus, que l’on pensait femelle, d’après la taille et la forme de ses dents, était en réalité mâle, d’après les données protéomiques. Nos résultats indiquent donc que les mesures de la taille des dents ne sont pas nécessairement précises pour une estimation correcte du sexe. »

Une question de diversité
Le sexe en lui-même ne pouvant pas expliquer les différences dans l’apparence de ces individus, l’équipe a ensuite cherché à savoir si la diversité qu’elle observait pouvait être le résultat de différents groupes ou espèces qu’elle ne connaissait pas, ou le résultat d’un croisement, puisque Paranthropus robustus chevauchait à l’époque les Australopithèques et les premiers membres du genre Homo.
Résultats : les positions de certaines séquences d’acides aminés varient selon les spécimens de Paranthropus robustus examinés. Elles étaient aussi différentes de celles observées chez les humains actuels, les Néandertaliens et les Dénisoviens. Cette analyse a donc révélé que l’un des individus, SK-835, était plus éloigné des trois autres qu’ils ne l’étaient entre eux.
Claire Koenig ajoutant : « Il serait prématuré de classer SK-835 comme un membre des nouveaux taxons proposés de Paranthropus capensis. Mais, il reste possible que la différence d’acides aminés reflète sa position dans une espèce différente des autres. »
« Cela pourrait également s’expliquer par la microévolution sur différents sites », a détaillé à son tour Rebecca Ackermann, co-auteure de l’étude et anthropologue biologique à l’université du Cap. « Nous devons analyser davantage de matériel de Paranthropus provenant de différents sites afin de mieux comprendre la variation au sein du Paranthropus d’Afrique australe. Étant donné que le protéome de l’émail est beaucoup plus petit, et fournit moins d’informations, qu’un génome complet, les reconstructions de parents humains fossiles doivent être interprétées avec prudence. Nous nous attendons à ce que d’autres développements méthodologiques soient bénéfiques, notamment des méthodes moins invasives telles que la gravure à l’acide pour éliminer une couche extrêmement fine d’émail dentaire, et le développement d’instruments de séquençage de protéines plus rapides et plus sensibles. Il reste à voir, par exemple, si nous pouvons ou non distinguer moléculairement un Paranthropus robustus d’un Australopithecus africanus, car ces espèces sont étroitement liées et leurs protéines vont donc se ressembler beaucoup. »
Par ailleurs, le plus petit parent humain au monde aurait été dévoré par un léopard il y a 2 millions d’années.