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Malgré l’arrêt des manifestations du Hirak dû à l’épidémie de Covid-19, la contestation se poursuit sur Internet. Les opposants militant par ce biais s’exposent toutefois à de grands risques.

Une traque sans merci sur Internet

Depuis mars, comme un peu partout dans le monde, les manifestations du Hirak, en Algérie, ont été stoppées dans leur élan à cause de la pandémie de coronavirus. Cela n’empêche toutefois pas les opposants au régime de continuer le combat avec les moyens de l’époque : Internet et les réseaux sociaux.

Toutefois, ces méthodes ne sont pas sans danger pour les manifestants. En effet, depuis le 19 mai dernier, des opposants ont été condamnés à des peines de prison, certains pour leurs publications sur les réseaux sociaux. Malgré l’arrêt des manifestations depuis la mi-mars dans les rues d’Alger, aux cris d’une jeunesse souhaitant l’avènement d’une « Algérie libre et démocratique », et leur déplacement sur les réseaux sociaux, la répression, elle, continue. Les peines sont lourdes, de même que les charges. Ainsi, des opposants ont été arrêtés pour « outrage au président de la République » ou « publications pouvant porter atteinte à l’intérêt national ». Pour de telles « infractions », les peines peuvent aller jusqu’à 1 an et demi de prison.

Le projet de constitution cristallise les oppositions au « système »

Le Hirak, mouvement de protestation inédit, a débuté le 22 février 2019, porté par la jeunesse algérienne, qui refusait une cinquième candidature du président Abdelaziz Bouteflika, au pouvoir depuis 1999. Ces contestations, menées principalement les vendredis, jours qui voyaient se rassembler des milliers de personnes dans les rues d’Alger, ont conduit au retrait de la candidature de Bouteflika.

Toutefois, ce sont désormais ses proches qui se disputent le pouvoir, et l’élection controversée, en décembre 2019, d’Abdelmadjid Tebboune, ancien Premier ministre, est fortement contestée par les manifestants, mus par une volonté de « dégagisme » général. Ils réclament l’instauration d’une Deuxième République, l’instauration d’un véritable État de droit.

Un projet de constitution loin de faire l’unanimité

Le président Tebboune avait promis, lors de son élection en décembre, une refonte de la Constitution, afin de mettre en place « la nouvelle Algérie ». Sauf que ce projet de réforme a été laissé aux mains des politiques et des « citoyens » validés par l’État. Il n’y avait donc pas grand-chose à voir avec un réel débat démocratique. Le fait de mener ce changement aussi important dans un contexte de crise sanitaire mondiale montre la volonté du nouveau gouvernement de saper les revendications des citoyens.

Une « ébauche » de Constitution a pour l’instant été dessinée, rédigée par un comité d’« experts » ne venant ni de la société civile ni des mouvements de contestation, comme le rappelle Le Monde. Toutefois, cela ne changera presque rien aux institutions, l’exécutif gardant l’ensemble des pouvoirs, au détriment du Parlement. Il gardera également un pouvoir de contrôle et nommera lui-même les autorités de régulation de l’État. Ainsi la mainmise du pouvoir reste extrêmement forte.

Dans un rapport datant de fin avril, Amnesty International réclamait la libération des militants emprisonnés pour avoir fait usage « de leur droit à la liberté d’expression ou de réunion pacifique ». Parlant des arrestations arbitraires des militants du Hirak sur Internet, Karima Dirèche, historienne spécialiste du Maghreb, ajoute : « Il s’agit d’une répression à l’aveugle, un coup les journalistes, un coup les médias, un coup les militants, un coup les réseaux sociaux. »

Tout ceci ne désespère pas les militants. Des chanteurs algériens, vivant au pays ou issus de la diaspora, se sont réunis, en ligne, pour un concert à distance demandant la libération des prisonniers du Hirak.

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