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Un papyrus révèle que l’Égypte antique abritait une diversité exceptionnelle de serpents venimeux

Ces espèces vivent aujourd’hui loin de l’Égypte

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— © kairoinfo4u / Flickr

En utilisant des techniques modernes de modélisation écologique, des chercheurs ont réussi à identifier les espèces de serpents mentionnées dans un ancien manuel médical égyptien. Ce manuel, considéré comme l’un des plus anciens textes médicaux au monde, offre un aperçu des interactions entre les humains et les serpents il y a des millénaires. Les résultats de cette étude, publiés dans la revue Environmental Archaeology, suggèrent une disparité entre les espèces de serpents qui habitaient l’Égypte antique et celles qui se trouvent aujourd’hui dans le pays.

Un mystérieux manuel égyptien

Il y a 2 500 ans, un médecin égyptien aurait consulté un rouleau de papyrus contenant des informations sur 34 types de serpents et leurs morsures, rédigé en écriture hiératique. Ce rouleau a été traduit pour la première fois il y a environ 60 ans, ouvrant un débat académique sur l’identité des serpents décrits. Les égyptologues pensent que ce sont les prêtres de Serket, la déesse égyptienne de la renaissance et des animaux venimeux comme les scorpions, qui ont rédigé le guide sur les morsures de serpent. En raison de leurs capacités de guérison, ces prêtres étaient considérés comme des médecins ou des magiciens. 

Le rouleau a été acheté par le journaliste et anthropologue américain Charles Edwin Wilbour vers la fin des années 1800 ; et ses héritiers l’ont donné au Brooklyn Museum, où il est actuellement exposé. Ce document appelé Papyrus de Brooklyn n’existe que dans cette version. Bien que la datation du rouleau ait été fixée au VIe siècle avant J.-C., on pense que le texte original a été copié. Sur la base des déclarations des prêtres, un certain nombre de chercheurs modernes ont essayé d’identifier les espèces mentionnées.

La modélisation écologique comme outil d’investigation

Pour lever le voile sur ce mystère, Isabelle Winder et Wolfgang Wüster de l’université de Bangor, avec leur étudiante diplômée Elysha McBride, ont eu recours à une technique appelée « modélisation de niche ». Cette méthode est souvent utilisée pour estimer l’aire de répartition potentielle de l’habitat d’une espèce. Elle prend en compte les facteurs environnementaux qu’une espèce habite actuellement avant d’intégrer les données climatiques de différentes régions pour identifier d’autres habitats acceptables.

En utilisant des données climatiques historiques, Mme McBride a inversé les progrès de cette technique en l’utilisant pour prévoir les habitats historiques probables de certaines espèces de serpents. McBride s’est focalisée sur dix espèces de serpents considérées comme particulièrement venimeuses ou agressives. Elle a incorporé des données climatiques modernes et anciennes pour prédire les espèces qui auraient pu habiter l’Égypte antique.

Une ophiofaune changeante

Les résultats sont stupéfiants : aucune des dix espèces identifiées ne se trouve dans l’Égypte moderne. Parmi les espèces modélisées figuraient le mamba noir et la vipère bouffie, responsables aujourd’hui de la plupart des décès liés à des morsures de serpent en Afrique. Selon McBride, le modèle indique que la dixième espèce, la vipère rhombique (Causus rhombeatus), était peut-être connue des prêtres de Serket, mais qu’elle vivait juste à l’extérieur des anciennes limites de l’Égypte.  

Anooshe Kafash, paléoanthropologue au Stiftung Neanderthal Museum, qui n’a pas participé à ces travaux, déclare : « Il est surprenant de constater qu’il y avait probablement 10 espèces qui vivaient en Égypte et qui n’y vivent plus. » Les résultats indiquent un changement significatif dans l’ophiofaune de l’Égypte au cours des millénaires, ouvrant des questions sur les interactions humaines avec ces créatures.

— © safaritravelplus / Wikimedia Commons

Implications et avenues futures de la recherche

Selon Gerardo Martin, écologiste spécialiste des maladies, l’utilisation de la modélisation écologique dans ce contexte est « très créative ». Bien que les fossiles confirment l’existence de certains de ces serpents, la recherche apporte de nouvelles preuves de l’existence d’autres serpents. Elle offre une multitude de nouvelles perspectives sur l’origine de diverses maladies

Il note toutefois que des études supplémentaires seraient nécessaires pour affiner les résultats. Il n’est pas certain que les habitats actuels de ces espèces soient les mêmes que ceux qu’elles affectionnaient il y a des milliers d’années. Il suppose que leurs préférences ayant pu évoluer au fil du temps, une modélisation plus poussée serait nécessaire pour rendre les résultats « plus solides »

Pour aller plus loin, voici 10 serpents si venimeux qu’ils vous tueraient d’une seule morsure.

Par Eric Rafidiarimanana, le

Source: Science

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