
On s’attend toujours à un certain mystère, voire à un soupçon de tension dramatique, quand on évoque un conclave. Après tout, il s’agit de désigner l’un des hommes les plus influents du monde, chef spirituel de plus d’un milliard de catholiques. Et pourtant, à en croire plusieurs cardinaux eux-mêmes, l’élection du pape Léon XIV s’est jouée dans une atmosphère aussi rapide que sereine. Une sorte de calme divinement orchestré.
Une unité aussi soudaine que limpide
À peine plus de 24 heures. C’est tout ce qu’il aura fallu pour que les 133 cardinaux enfermés dans la chapelle Sixtine tombent d’accord sur un nom : celui de Robert Francis Prevost. Un Américain né à Chicago, proche de François, et qui incarne apparemment cette ligne à la fois pastorale et moderne que beaucoup espéraient voir perdurer.
Le cardinal Jean-Paul Vesco, archevêque d’Alger, ne cache pas son étonnement : « Cela aurait même pu se terminer plus tôt », confie-t-il au Figaro. Il parle d’un vote « magistral », d’un moment où « les planètes se sont alignées », presque sans un mot. Pas de lutte d’influence, pas de grandes manœuvres. Le contraire d’un scrutin politique. « Il n’y a pas de gagnants ni de perdants ici », insiste-t-il. Juste une convergence, une évidence.
Une ambiance presque… légère
Autre surprise, de taille : la décontraction qui semble avoir régné entre les cardinaux. François-Xavier Bustillo, archevêque d’Ajaccio, l’assure dans Le Parisien : « Pas de club privé de discussions, pas de conciliabules. Le soir, on épluchait nos dossiers au calme. » Oui, l’élection d’un pape s’est aussi jouée dans une forme de tranquillité, entre méditation et discussions sincères.
Il y avait bien sûr la solennité de la chapelle Sixtine, ses fresques, son silence sacré. Mais aussi une volonté collective de « faire les choses bien », sans tensions. Une forme de fraternité rare, presque touchante.
L’Esprit… et la méthode
Ce qui frappe, dans les témoignages, c’est ce mélange de gravité et de simplicité. « Un moment unique, de responsabilité », résume Bustillo. On devine la conscience aiguë de représenter une espérance, un peuple, une histoire. Mais cette conscience n’a pas paralysé le processus. Elle l’a même peut-être accéléré.
Car au-delà du décor millénaire, c’est peut-être un nouveau visage de l’Église qui s’est esquissé : plus collégial, plus fluide. Léon XIV, en ce sens, pourrait bien incarner cette transition paisible mais ferme vers une Église en dialogue, tournée vers les périphéries sans renier sa profondeur spirituelle.
Une foule, une ferveur, un frisson
Et puis il y a eu cette image, aussi fulgurante qu’émouvante : à peine l’élection annoncée, plus de 100 000 personnes rassemblées place Saint-Pierre. En moins d’une heure. Comme si cette élection rapide n’avait rien enlevé à l’intensité du moment. Au contraire. Il y avait dans l’air ce frisson collectif, ce besoin de croire que, cette fois encore, « quelque chose s’est passé ».
Pas un miracle, non. Mais peut-être un signe. Que parfois, l’évidence s’impose sans lutte. Que la foi, quand elle est partagée, rend même les processus les plus anciens étonnamment actuels.