Injustement associé au porno sur Internet, le dojinshi est pourtant un produit incontournable pour tous les fans de mangas au Japon. Imaginé par des passionnés pour des passionnés, ce manga oscillant entre création originale et parodie permet à chacun de publier ses histoires. D’autant que ce type de publication est l’une des portes vers le monde du manga professionnel. Focus sur ce type de publication alternatif qui a fait connaître certains des plus grands mangakas.
Un dojinshi, que l’on peut aussi écrire doujinshi (et qui signifie littéralement revue de cercle) est un manga, un magazine ou un recueil d’histoires édité par des artistes amateurs. Apparus dans la seconde moitié du XXe siècle sur l’archipel et d’abord associés à la littérature, ils ont commencé à devenir très populaires à partir des années 80. A l’origine publiés seulement sur papier, les dojinshis sont depuis les années 2000 également diffusés sur Internet, ce qui a permis de les faire connaître à l’échelle internationale. Cependant, ce sont bien les recueils papier qui sont les plus connus au Japon, où ils représentent une part importante du marché du livre.
Équivalent japonais des fanzines que vous pouvez trouver en Europe, les dojinshis sont souvent publiés par plusieurs auteurs qui réunissent leurs travaux dans un même ouvrage. Ce sont les auteurs eux-mêmes qui financent l’édition de leurs recueils et qui les proposent à la vente, généralement à tout petits prix. Au Japon, vous pouvez acheter un dojinshi dans plusieurs endroits. Certaines boutiques spécialisées possèdent un rayon dédié à ces créations mais le meilleur endroit pour en trouver reste les conventions. Et la plus importante est le Comik Market qui se tient deux fois par an à Tokyo avec une édition estivale et une édition hivernale. Avec ses 35 000 exposants, elle vous invite à découvrir des milliers d’auteurs et leurs histoires ouvertes à toutes les fantaisies.
Le contenu d’un dojinshi peut varier d’une histoire à une autre mais il y a 3 grandes tendances qui ressortent. La première est la réinterprétation d’une histoire existante. Vous pouvez ainsi lire dans un dojinshi des parodies de mangas célèbres ou des histoires inspirées de licences connues du cinéma ou de la télévision. Entre l’hommage à une œuvre et le détournement parodique, ce sont les recueils les plus prisés des collectionneurs surtout si les artistes sont talentueux. Cependant, pour des raisons évidentes de droits d’auteur, celles-ci sont éditées à très peu d’exemplaires.
La deuxième grande tendance du dojinshi est la création originale. Comme avec nos fanzines européens, les dojinshis sont l’occasion pour les jeunes auteurs d’éditer leurs histoires et de se faire connaitre en les vendant dans ce format, notamment pendant les conventions. Enfin, le troisième grand thème des dojinshis, qui les a rendus populaires sur Internet et qui fait que vous connaissez peut-être déjà le terme sans jamais en avoir lu, est la pornographie. Les auteurs prennent des personnages connus et donnent vie aux histoires d’amour dont ils rêvent en en faisant les vedettes d’histoires érotiques classiques, yaoi ou yuri.
Mais les dojinshis ne sont pas seulement réservés aux amateurs d’érotisme ou aux auteurs désireux de voir leurs histoires publiées. C’est également un bon moyen pour les apprentis mangakas de se faire connaitre et de publier leurs premières œuvres. Et certains de vos auteurs préférés ont commencé leur carrière en publiant des dojinshis. Parmi les plus connus, on trouve les CLAMP, Koshi Rikudo (l’auteur d’Excel Saga) ou Ken Akamatsu (auteur de Love Hina et du Maître magicien Negima). Certains auteurs continuent d’ailleurs de publier des dojinshis car ils ne sont pas sujets aux même contraintes de publication et de contenu que les mangas classiques. Qui sait, peut-être que vous croiserez dans un rayon une oeuvre inédite de votre mangaka préféré.
S’il reste peu connu en France, le dojinshi représente aujourd’hui une part importante de la consommation de mangas au Japon. Bien loin des œuvres pornographiques que vous pouvez croiser sur des sites douteux, le dojinshi est une porte ouverte vers des univers alternatifs et des histoires dont vous avez rêvé sans les voir devenir réalité. Il existe autant de dojinshis qu’il y a d’auteurs, autant dire que le choix ne manque pas. Si vous avez la chance de vous rendre au Japon, n’hésitez pas à jeter un œil à ces créations de passionnés : vous lirez peut-être sans le savoir la première oeuvre d’un futur grand nom du manga.
Par Justine Manchuelle, le
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