En suivant des Indicatoridae, une espèce d’oiseaux, certains peuples d’Afrique sont capables de localiser les nids d’abeilles pour la récolte du miel. Les humains utilisent des appels spéciaux pour solliciter l’aide de ces oiseaux qui réciproquement recrutent activement des partenaires humains appropriés. Cette relation est un rare exemple de coopération entre les humains et les animaux vivant en liberté. SooCurious vous éclaire sur cette incroyable association entre l’homme et l’animal.
À travers l’histoire, nous avons pu observer que l’Homme a formé certaines espèces pour l’aider à trouver de la nourriture, tels que les chiens, les faucons ou encore les cormorans. Ces animaux sont domestiqués et dressés par leur propriétaire pour accomplir certaines tâches. Mais la collaboration homme-animal dans la nature est beaucoup plus rare. Cependant, dans de nombreuses régions d’Afrique, les hommes et les oiseaux travaillent ensemble pour trouver des nids d’abeilles sauvages, qui fournissent des ressources précieuses pour les deux protagonistes. Pour indiquer la direction du nid d’abeilles, l’Indicatoridae envoie un signal sonore aux humains, qui utilisent ensuite de la fumée pour maitriser les essaims d’abeilles. Cette collaboration permet ainsi à l’oiseau de se fournir en cire et à l’homme de récolter du miel.
Les expériences menées dans la brousse du Mozambique montrent également que cette relation unique homme-animal ne se limite pas aux signaux des oiseaux : non seulement ils utilisent des sons pour solliciter des partenaires, mais les humains utilisent également des appels spécialisés lorsqu’ils nécessitent l’aide des oiseaux. Des recherches dans la Réserve nationale de Niassa révèlent que cette aide mutuelle augmente considérablement les chances de trouver des aliments riches en calories pour les oiseaux mais aussi pour les humains.
Cette relation de réciprocité est d’autant plus incroyable qu’elle s’effectue sans formation ou dressage sur les oiseaux : « Ce qui est remarquable au sujet de cette association est qu’elle implique des animaux vivant en liberté dont les interactions avec les humains ont probablement évolué par la sélection naturelle, probablement au cours de centaines de milliers d’années », explique Claire Spottiswoode, spécialiste des études comportementales des animaux en Afrique. Avec l’aide de chasseurs de miel de la communauté locale des Yao, des chercheurs ont réalisé des expériences dans la Réserve nationale de Niassa au Mozambique pour vérifier si les oiseaux étaient capables de faire la distinction entre l’appel des humains et d’autres sons, et ainsi d’y répondre de manière appropriée. L’appel sonore du miel des chasseurs, qui est transmis de génération en génération, est symbolisé par un trille fort suivi d’un grognement.
Pour découvrir si les oiseaux arrivent à associer ce signal avec un sens spécifique, Claire Spottiswoode a effectué des enregistrements de cet appel sous deux formes différentes : des mots prononcés par les chasseurs de miel et des appels provenant d’une autre espèce d’oiseaux. Et les résultats sont surprenants : les oiseaux étaient beaucoup plus sensibles aux sons des chasseurs qu’ils ne l’étaient pour les autres sons. Au cours de l’Histoire, le son traditionnel des chasseurs a augmenté la probabilité d’être guidé par un oiseau de 33 % à 66 %, et la probabilité globale de trouver un nid d’abeilles de 16 % à 54 %. En d’autres termes, les signaux sonores des humains permettent de tripler les chances d’une interaction réussie, ce qui permet aux humains de trouver du miel et aux oiseaux, de la cire.
La coopération humaine est cruciale pour l’Indicatoridae car les nids d’abeilles sont souvent cachés dans des crevasses inaccessibles en haut des arbres et sont protégés par des abeilles très féroces. Par conséquent, les oiseaux sont tributaires des hommes, qui leur permettent de neutraliser les abeilles en les enfumant à l’aide d’un faisceau enflammé de brindilles et de feuilles hissées en haut de l’arbre. Les 2 parties en tirent ainsi un avantage : les chasseurs de miel récoltent le miel et les oiseaux dévorent les rayons de cire laissés derrière.
Cependant, certains voient cette pratique d’un mauvais oeil et insistent sur les gains réciproques que doivent obtenir les Indicatoridae. Ainsi si l’oiseau n’obtient pas sa cire, il voudra se venger. « Un vieux sage m’a expliqué que si vous ne respectez pas les règles, la prochaine fois, l’oiseau vous conduira à un animal dangereux, comme un léopard », raconte Ridley Nelson dans le Washington Post. Ce phénomène de recherche de nourriture a été observé pour la première fois dès 1588, quand un missionnaire portugais a observé un petit oiseau brun se glisser dans son église et grignoter ses bougies. Il décrit également comment cet oiseau avait l’habitude de conduire les hommes à des nids d’abeilles en volant d’arbre en arbre.
« Ce phénomène décrit est ce que nous appelons maintenant un mutualisme entre les espèces. Ces mutualismes sont cruciaux partout dans la nature, mais à notre connaissance, le seul partenariat de recherche de nourriture comparable entre les animaux sauvages et notre propre espèce est celui des dauphins vivant en liberté qui chassent des mulets dans les filets des pêcheurs et, ce faisant, réussissent à en attraper plus pour eux-mêmes. Il serait intéressant de savoir si les dauphins répondent aux appels spéciaux réalisés par les pêcheurs », explique Claire Spottiswoode.
À la rédaction, nous sommes surpris de cette association mutuelle entre l’homme et l’animal. Comme quoi, il existe encore certaines régions du monde où règnent la paix et la prospérité. Si ce genre d’article vous intéresse, n’hésitez pas à découvrir ce lieu qui abrite 10 % de la population mondiale d’oiseaux.
Par Paul Mirabel, le
Source: Cambridge University
Étiquettes: afrique, cire, collaboration, humains, miel, oiseaux
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