
La mise en évidence d’anomalies dans le champ gravitationnel de la Lune indique un intérieur asymétrique, contribuant à expliquer pourquoi ses deux faces se révèlent si différentes.
Lune à deux visages
La face visible de la Lune tranche visuellement avec sa face cachée : la première est globalement lisse et dominée par de vastes « mers », tandis que la seconde, criblée de cratères, apparaît beaucoup plus rugueuse. Si l’on ignorait jusqu’à récemment si cette asymétrie reflétait également un déséquilibre plus profond, de nouveaux travaux menés par Ryan Park, du Jet Propulsion Laboratory de la NASA, et ses collègues appuient ce scénario.
Dans le cadre de la mission GRAIL, il y a un peu plus d’une décennie, deux sondes spatiales avaient été placées en orbite autour de la Lune afin de réaliser un relevé très détaillé de son champ gravitationnel. Ces mesures ne pouvant être entièrement expliquées par l’asymétrie de surface de la Lune, les scientifiques se sont demandé si sa structure interne n’était pas également irrégulière.
« Des études antérieures avaient prédit que la face visible de la Lune se déformerait davantage que sa face cachée en réponse à l’attraction terrestre », explique Jeffrey Andrews-Hanna, de l’université d’Arizona. « Les nouveaux travaux confirment cette hypothèse et offrent un nouvel aperçu de l’intérieur de la Lune », ajoute-t-il.

Une face proche plus chaude
Park et son équipe se sont appuyés sur les données de GRAIL pour calculer avec précision dans quelle mesure le manteau lunaire, situé sous la croûte, était susceptible de se déformer en réponse à la gravité terrestre. Une différence de rigidité de 2 à 3 % a été mise en évidence entre les deux faces, indiquant que la plus proche de nous se révélait sensiblement plus chaude (100 à 200 kelvins).
Selon Sean Solomon, de l’université Columbia, la nouvelle modélisation de la structure interne de la Lune cadre avec les concentrations particulières d’éléments radioactifs (tels que l’uranium et le thorium) identifiées près de sa surface.
Bien que les raisons de ces différences structurelles profondes restent encore floues, les auteurs de la nouvelle étude, publiée dans la revue Nature, pensent qu’elles seraient liées à d’anciennes collisions/impacts, ou la conséquence d’une activité volcanique ancienne, il y a plusieurs milliards d’années.