Si les immenses forêts tropicales sont considérées comme les « poumons » de la planète, il ne faut pas oublier que même en milieu urbain, les arbres ont leur rôle à jouer. Une étude récente vient justement de pointer un lien entre le plantage d’arbres dans des quartiers citadins et des effets bénéfiques pour notre santé.

PLUS D’ARBRES, MOINS DE POLLUTION

Un rapport de l’organisation caritative The Nature Conservancy publié en décembre 2016 montre que le fait de planter plus d’arbres dans les quartiers urbains peut avoir des conséquences significatives sur la santé des habitants de ces quartiers et zones urbaines.

« De nombreuses villes voient encore les arbres comme étant purement décoratifs« , précise Rob McDonald, co-auteur du rapport et chercheur pour le programme « Global Cities » de The Nature Conservancy. « En réalité, ils sont beaucoup plus que ça. Les résultats suggèrent que nous devrions penser aux arbres comme une part intégrante des politiques et infrastructures de santé publique« .

« NOTRE CONCEPTION DE CE QUE LES ARBRES APPORTENT AUX VILLES A ÉVOLUÉ AVEC LE TEMPS. ET DANS LE PROCHAIN SIÈCLE URBANISÉ, NOUS DISONS QU’IL EST PEUT-ÊTRE TEMPS DE REVOIR LEUR RÔLE ENCORE UNE FOIS. » – ROB MCDONALD

De quel genre de politique parle-t-on ? Selon ce rapport, qui a examiné plusieurs études réalisées au cours des dernières années sur le sujet, les arbres sont capables d’absorber une certaine quantité des particules fines de pollution que rejettent les voitures, centrales et usines. Cela serait particulièrement bénéfique compte tenu du fait que l’on attribue 3,2 millions de morts dans le monde à la pollution. Selon des chiffres révélés en juin 2016, la pollution tuerait par exemple 48 000 personnes par an rien qu’en France.

Le rapport de The Nature Conservancy estime ainsi que si l’on effectuait une campagne mondiale pour planter des arbres dans les 245 plus grandes villes de la planète, il serait possible de sauver entre 11 000 et 36 000 vies par an dans le monde, pour un coût évalué à 2,7 milliards d’euros (3,2 milliards de dollars).

RÉGULATEURS DE TEMPÉRATURES

La Nature Conservancy pointe également le fait que les arbres peuvent aider à réduire la température globale annuelle de certaines parties des villes. Toujours selon ce rapport, qui s’appuie sur de nombreuses études, les arbres plantés en zones urbaines peuvent rafraîchir des quartiers entiers sur une fourchette de 0,5 °C à 2 °C, ce qui pourrait être vital lors de canicules.

En effet, des études ont montré que, lors d’un épisode caniculaire, un degré supplémentaire menait à une augmentation de 3 % de la mortalité. Ainsi, les arbres plantés dans ces zones citadines permettraient d’empêcher entre 200 et 700 morts liées à de très fortes chaleurs par an.
Et ce n’est pas tout. Les habitants pourraient profiter d’un autre effet du rafraîchissement de leur quartier grâce aux arbres. Avec des températures plus agréables, l’air conditionné ne serait plus autant utilisé dans certaines régions, ce qui reviendrait à utiliser moins d’énergie, réduisant notamment l’usage d’électricité de 0,9 % à 4,8 % dans certaines villes.

Les arbres ont encore d’autres avantages pour The Nature Conservancy, qui pourraient motiver les administrations des villes à en planter davantage : ils sont capables de retenir une partie de l’eau des pluies et orages. Ils peuvent également avoir un effet pour augmenter la valeur des biens immobiliers ou encore, pour repiquer sur les effets sanitaires. Les arbres pourraient donc avoir des effets bénéfiques sur la santé mentale.

EFFICACES SI PLANTÉS AU BON ENDROIT

La rentabilité des stratégies de réduction de particules fines. Chaque catégorie comprend plusieurs technologies particulières, aux États-Unis, au Chili, au Mexique, à Taïwan et au Royaume-Uni. Les barres montrent la rentabilité moyenne tandis que les lignes de marges montrent la rentabilité minimum et maximum observée pour chacune de ces catégories.

Rob McDonald et ses collègues ont constaté qu’une opération de plantage d’arbres dans une ville peut être tout aussi rentable, voire plus, que d’autres politiques d’assainissement de la qualité de l’air en zone urbaine. En ce qui concerne les particules fines, comme le montre le graphique ci-contre, le plantage d’arbres peut par exemple être plus rentable que des politiques de réduction des émissions de dioxyde de soufre (SO2) ou d’oxyde d’azote (NOx), mais un peu moins rentable qu’une politique portant sur les transports, comme des interdictions de rouler pour certains véhicules.

Cependant, il faut bien faire attention aux lieux où sont placés ces arbres. Le rapport établit que les arbres ne peuvent améliorer la qualité de l’air que sur un petit rayon d’action, limité à environ 30 mètres. Pour les villes, il s’agit alors de plancher sur une façon de maximiser les rendements en identifiant les quartiers qui bénéficieraient le plus d’une telle installation. On peut par exemple penser aux zones à proximité d’hôpitaux, cliniques, écoles ou sur les zones les plus densément peuplées.
Sans parler du choix crucial que représente l’espèce des arbres introduits en ville : selon le climat prédominant, il faut adapter les plantes à cela.

Malgré tous ces supposés avantages, il semble que les villes ne soient pas encore tout à fait ouvertes à ce genre de politiques. Rob McDonald explique cela par la gestion de l’espace public, parfois restreint, et celle de l’eau, ainsi que le temps alloué et l’effectif qui seraient nécessaires pour entretenir autant d’espaces verts. Pour un budget limité, cela pourrait représenter une contrainte de taille malgré tous les bénéfices sanitaires que cela apporterait.

Cette carte montre les différents niveaux de retour sur investissement (ROI) d’arbres pour réduire les particules fines dans la ville de Washington DC, par quartier. Les zones les plus foncées ont un retour sur investissement plus élevé.

McDonald pointe également du doigt le fait que ces villes ne voient pas encore les arbres comme une politique de santé publique fiable, ou comme une politique tout court. Dans de nombreux pays occidentaux, la responsabilité est laissée aux départements en charge des espaces verts ou des parcs municipaux.

Cependant, Rob McDonald ne semble pas perdre espoir. Il rappelle ainsi volontiers que la vision des arbres dans l’espace urbain a beaucoup évolué avec le temps. Avant le XVIIe siècle, par exemple, les arbres étaient rares dans les rues, jusqu’à ce que les Néerlandais ne jouent le rôle de pionniers dans le domaine. Il a ensuite fallu attendre le XIXe siècle pour que les grandes avenues et boulevards européens soient flanqués de longues lignées d’arbres.

« Notre conception de ce que les arbres apportent aux villes a évolué avec le temps. Et dans le prochain siècle urbanisé, nous disons qu’il est peut-être temps de revoir leur rôle encore une fois.  »

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