De récentes expériences ont montré que les vers C. elegans pouvaient exploiter la charge électrique des bourdons pour les atteindre et ainsi se déplacer beaucoup plus rapidement.
Nématodes « auto-stoppeurs »
Mesurant environ 1 millimètre de long, Caenorhabditis elegans est un ver rond bactérivore largement utilisé dans les expériences en laboratoire en raison de sa transparence, son court cycle de reproduction et sa grande facilité de manipulation. Bien que ce minuscule organisme soit régulièrement observé sur des insectes ailés, la tactique employée pour les atteindre restait jusqu’à récemment un mystère.
Intrigués par la découverte récurrente de C. elegans sur le couvercle des boîtes de Petri dans lesquelles ils étaient élevés, Takuma Sugi, de l’université d’Hiroshima, et ses collègues ont décidé de les filmer. Le visionnage des séquences a révélé que contrairement à d’autres espèces de nématodes, ayant tendance à se replier sur eux-mêmes avant de sauter, les vers restaient droits et quasi immobiles, suggérant que des forces extérieures soient à l’oeuvre.
Dans le cadre de travaux publiés dans la revue Current Biology, l’équipe a placé 1 500 spécimens entre deux électrodes de verre. Si aucun des vers ne sautait quand aucune tension n’était appliquée, lorsque celle-ci atteignait 200 kilovolts par mètre, ils effectuaient cette action à une vitesse moyenne de 0,86 mètre par seconde, augmentant avec l’intensité du champ électrique.
Afin de vérifier si ce comportement pouvait se produire dans la nature, l’équipe s’est tournée vers les bourdons, dont les mouvements d’ailes rapides leur permettent d’accumuler de l’électricité statique. Après avoir « chargé » plusieurs insectes anesthésiés en les frottant contre une plante présente dans leur environnement naturel, les chercheurs les ont placés à proximité des vers. Ces derniers se sont alors dressés sur l’extrémité de leur queue et ont sauté pour les atteindre, couvrant une distance moyenne de 1,26 millimètre.
Phorésie animale
Au début de cette année, des chercheurs américains avaient rapporté qu’un autre ver nématode, Steinernema carpocapsae, utilisait l’électricité statique pour atteindre les insectes qu’il parasitait. Les résultats de Sugi suggèrent que C. elegans, qui n’est pas un parasite, utiliserait la même tactique pour migrer vers de nouvelles zones plus riches en ressources afin d’améliorer ses chances de survie.
« Cette découverte est vraiment passionnante car elle constitue la première preuve que l’électricité statique est impliquée dans la phorésie animale, lorsqu’un animal fait essentiellement de l’auto-stop sur un autre pour atteindre un nouvel emplacement sans nuire de manière significative à l’animal porteur, ce qui est différent du parasitisme », commente Sam England de l’université de Bristol.
« Les études futures pourraient porter sur les moteurs biologiques de ce comportement, sur la façon dont la génétique des vers le rend possible et sur la façon dont ils perçoivent le champ électrique », conclut Sugi.
Par Yann Contegat, le
Source: New Scientist
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