Les humains sont des êtres intelligents très évolués – le résultat d’une longue histoire d’adaptation. Mais est-il possible que nous arrivions un jour à élaborer des machines dotées d’une intelligence supérieure à la nôtre ? DGS vous en dit plus à ce sujet…

Le concept de superintelligence est aujourd’hui l’objet de recherches de plus en plus poussées. Elles cherchent non seulement à imaginer la façon dont on pourrait construire ces machines, mais également ce que leur existence signifierait pour le futur de l’humanité. Dans son ouvrage récent, Superintelligence: Paths, Dangers, Strategies, Nick Bostrom, docteur en philosophie à l’université d’Oxford, relate les différentes voies scientifiques qui pourraient éventuellement aboutir à la création d’une superintelligence artificielle. Le chemin est long : il faut parvenir à reconstruire mathématiquement toutes les interconnexions du cerveau humain.

Bien que ce projet sonne encore comme de la science-fiction, un groupe d’experts incluant Stephen Hawking a pourtant écrit un article très sérieux à ce sujet. Ils expliquent « qu’il n’existe aucune loi empêchant des particules créées artificiellement de s’organiser d’une telle façon que leurs connections soient plus efficaces que celles du cerveau humain ». Pour résumer l’idée, on pourrait dire que les scientifiques cherchent à créer un cerveau fait de câbles et de puces informatiques et qu’a priori, aucune loi physique ne contre-indiquerait la réalisation d’une telle machine.

L’idée selon laquelle le cerveau effectue en permanence des sortes de calculs est largement répandue en science cognitive. En effet, nous savons que le cerveau traite continuellement de l’information, convertissant des signaux nerveux entrants en signaux nerveux sortants. Ces conversions se font grâce à une séquence d’action qui se réalise automatiquement lorsqu’un signal extérieur à notre corps nous parvient.

Pour illustrer cela concrètement prenons l’exemple d’une personne lisant un texte à haute voix : naturellement, au cours de sa lecture, le conteur module sa voix pour se faire comprendre de son public. Ce mécanisme se réalise automatiquement car le conteur, en lisant, repère inconsciemment dans le texte des indices qui vont déclencher chez lui une série de mécanismes automatiques : lorsqu’il voit un point, spontanément, le conteur change le ton de sa voix pour signifier à son auditoire que c’est la fin d’une phrase. C’est ce genre de mécanisme automatique qui prouve que le cerveau analyse en permanence les éléments de son environnement.

Une autre théorie stipule que tout phénomène physique est convertible en un signal calculable ou même un algorithme (un programme informatique). Cela signifie que tout phénomène qui intervient dans un espace restreint (cet espace restreint peut être par exemple notre cerveau) peut être simulé par une machine de Turing  (une sorte de processeur informatique surpuissant idéalisé n’existant pas encore). Certains ordinateurs parviennent déjà à réaliser ce genre de conversion d’informations, mais n’atteignent pas encore le niveau hypothétique de la machine de Turing.

En synthétisant ensemble ces deux précédentes théories, cela nous mène à la conclusion que l’intelligence elle-même est le résultat d’une sorte de programmation non pas informatique mais physico-chimique. Et il ne faut pas oublier que, comme le précisent bien Hawking et nombre de ses partenaires, il n’y a aucune raison de croire que le cerveau est la machine la plus intelligente qui soit.

En fait, l’intelligence du cerveau est limitée par bien des facteurs : de sa composition physico-chimique à la façon dont il évolue. Le cerveau n’est pas voué exclusivement à produire une intelligence mais essentiellement à maximiser les chances de reproduction de notre espèce. Pour faire court, le cerveau est « programmé » pour inciter l’être humain à préserver son espèce. Les ordinateurs, eux, n’ont pas ce genre de préoccupation contraignante.

Les machines créées de toutes pièces ont nombre d’avantages sur le cerveau humain, et notamment en termes de rapidité et d’échelle. Cependant, ce qui fait l’intelligence, ce n’est pas la structure matérielle, mais les connections intérieures, le logiciel en quelque sorte. Dès lors, est-il possible que l’humain puisse créer un logiciel plus intelligent que son propre logiciel ?

L’humain n’est pas le seul à être doté d’une intelligence développée. En effet, il existe certains animaux qui se distinguent par rapport au reste du règne animal. Par exemple les chiens, les dauphins ou même les pieuvres ont une intelligence bien supérieure à celle des autres animaux. Ainsi, il semble possible à l’homme de reproduire ce processus d’évolution de l’intelligence. Des méthodes connues sous le nom d’ « algorithmes génétiques » permettent aux ingénieurs en informatique d’utiliser les propriétés de la sélection naturelle pour créer des modélisations plus performantes. Les algorithmes ne cessent de se perfectionner. Ils explorent de nouvelles options et trient sur le volet ce qui fonctionne et ce qui ne fonctionne pas, permettant aux scientifiques d’avancer plus rapidement vers les résultats attendus.

Bien sûr, il est substantiellement plus difficile de construire de toutes pièces un cerveau et de le faire évoluer comme on pourrait le faire avec un poste d’auto-radio. Bostrom étudie justement les évolutions du système nerveux au cours du temps. Il estime qu’aujourd’hui, une personne possède environ 10 puissance 25 (un 1 suivi de 25 zéros) connexions neuronales et ce chiffre n’a cessé d’augmenter au cours de l’histoire. Or, les machines actuelles qui tentent de reproduire les connexions du cerveau n’effectuent pour le moment que 10 puissance 6 calculs par seconde et par neurone, ce qui signifie 10 puissance 13 calculs par an. Ainsi, s’il fallait que l’on utilise ces chiffres pour tenter de remodéliser le schéma de l’histoire de l’évolution du cerveau en une année de calculs, nous aurions besoin d’un ordinateur pouvant réaliser 10 puissance 39 calculs par seconde, ce qui est bien supérieur aux capacités de nos ordinateurs actuels.

Il est relativement difficile de bien visualiser ce que représentent ces chiffres tellement ils sont grands. Le plus important à retenir est qu’une telle puissance technologique ne sera pas disponible avant un certain temps. Bostrom ajoute également que même au bout d’un siècle de progression au rythme de la loi de Moore (une loi selon laquelle les innovations technologiques en informatique progressent de manière régulière à des taux spectaculaires) ne serait pas suffisant pour approcher de telles performances.

Cependant, il existe pour nous d’autres moyens d’approcher ce genre de résultats. Certes l’évolution naturelle du cerveau a été exponentielle au cours de l’histoire, mais elle a toutefois été ralentie par certains facteurs auxquels les intelligences artificielles ne sont pas soumises. Comme nous l’avons dit précédemment, le cerveau n’est pas voué uniquement à développer une intelligence telle que l’on conçoit une intelligence informatique. Pour être plus clair : en tant qu’être humain, nous ne passons pas notre temps à effectuer des milliers de calculs ni à essayer de tout analyser. Nous « gaspillons » du temps à dormir, à développer notre conscience, etc. Un ordinateur n’a pas à faire tout cela, il peut se permettre de passer son temps à tout calculer dans le but d’ « accroître son intelligence ». Cependant, il est impossible de savoir si l’on saura passer outre tous ces facteurs annexes : comment imaginer qu’on puisse faire évoluer une intelligence artificielle plus rapidement qu’évolue notre propre intelligence ?

Prenons par exemple la vision du futur selon Star Trek : dans cette série télévisée de science-fiction, les robots ont atteint un niveau similaire à celui des humains en termes de capacité intellectuelle, mais ne les surpassent pas. Pourquoi ne les dépassent-ils pas ? Tout simplement parce que les humains n’ont pas su faire preuve d’une créativité suffisante pour doter les robots d’une intelligence supérieure à la leur.

Quoi qu’il en soit, développer une intelligence artificielle en se basant sur la théorie évolutive du cerveau n’est qu’un des nombreux choix possibles pour créer une super-intelligence. Nous avons su utiliser d’autres compétences (sciences cognitives ou neurosciences par exemple) pour construire des algorithmes d’ores et déjà plus complexes que ce dont nous pensions notre cerveau capable. Il y a donc peu de raisons de croire que la création d’intelligences artificielles soit bornée par les limites de notre propre intelligence.

 

Ce serait vraiment incroyable d’enfin arriver à créer un robot au moins aussi intelligent que l’homme. Au bureau, on attend avec impatience de pouvoir converser avec de tels humanoïdes, même si certains avouent être effrayés à l’idée que ces derniers soient plus brillants que nous. Et vous, quel effet cela vous-fait-il de savoir que des robots pourraient avoir une intelligence supérieure à la nôtre ?

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