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Des scientifiques redécouvrent un remède intestinal vieux de 2 500 ans 

Une argile ancienne oubliée a montré de puissants effets antibactériens qui favorisent la santé intestinale

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Image d’illustration — © Wellcome Collection gallery / Wikimedia Commons

Depuis des millénaires, les cultures utilisent diverses argiles pour leurs vertus médicinales. Parmi les remèdes oubliés, la terre de Lemnos, une argile utilisée depuis plus de 2 500 ans, refait surface grâce à des recherches modernes. Associée à un champignon spécifique, cette argile semble avoir des effets puissants sur la santé intestinale. Cette redécouverte de l’argile de Lemnos, autrefois utilisée par les civilisations anciennes, pourrait ouvrir de nouvelles perspectives pour le traitement des déséquilibres du microbiome intestinal. L’étude a été publiée dans la revue PLoS.

Un remède ancestral aux vertus étonnantes  

Depuis des millénaires, les cultures utilisent diverses argiles pour leurs vertus médicinales. Les plus anciennes traces remontent à des tablettes mésopotamiennes datant d’environ 2500 avant J.-C. De nombreuses civilisations, y compris les Égyptiens et les peuples indigènes, ont utilisé ces argiles, et certaines continuent de le faire. L’argile de Lemnos, également appelée terra sigillata, est une argile volcanique issue de l’île grecque de Lemnos, située en mer Égée. Depuis des millénaires, elle est utilisée depuis longtemps pour traiter des troubles digestifs. 

Utilisée pour des problèmes allant des troubles gastro-intestinaux à l’empoisonnement et même la prévention de la peste, elle était une ressource précieuse. Récemment, des chercheurs de Crète et d’Écosse ont proposé que la terre lemnienne soit modifiée artificiellement par l’interaction avec un champignon.

Historiquement, cette argile était bénie par des prêtres et marquée d’un sceau pour garantir sa qualité. Mais les secrets de sa préparation demeuraient flous, avec des méthodes qui varient selon les époques et les cultures. Certains rituels anciens suggèrent que l’argile était extraite de sites spécifiques, purifiée et bénie.

Une découverte scientifique innovante  

Des équipes de chercheurs en Crète et en Écosse ont analysé les effets de l’argile de Lemnos en associant un champignon nommé Penicillium purpurogenum à deux types d’argile : la smectite et le kaolin. Leur hypothèse était que les propriétés curatives de cette terre ne résidaient pas seulement dans l’argile elle-même, mais dans son interaction avec le champignon. Après avoir cultivé le champignon avec l’argile, ils ont étudié les extraits produits pour en analyser les effets.

Les résultats ont été frappants : seule l’association entre la smectite et le champignon a montré une activité antibactérienne significative, inhibant des bactéries pathogènes courantes comme Escherichia coli et Staphylococcus aureus. Le kaolin seul, en revanche, n’a montré que peu d’effets. « Les tests ont montré que l’association de l’argile smectite et du champignon avait une activité antibactérienne bien plus marquée que les autres argiles », explique le professeur Danae Venieri, de l’université technique de Crète.

Les chercheurs ont également testé le mélange sur des souris et observé les effets sur leur microbiome intestinal. Les souris ayant reçu ce mélange présentent une plus grande diversité bactérienne dans leur intestin, ce qui est un signe de santé intestinale. En revanche, les souris ayant reçu l’argile de kaolin n’ont pas montré ces bénéfices. La diversité microbienne est essentielle pour la santé intestinale, et une faible diversité (ou dysbiose) est associée à des maladies inflammatoires comme la maladie de Crohn et la colite ulcéreuse.

— © Digr / Wikimedia Commons

Impact sur la santé intestinale et implications futures  

Les chercheurs ont utilisé la chromatographie liquide-spectrométrie de masse (LC-MS) pour identifier les composés bioactifs présents dans le mélange. Ils ont découvert que certains composés présents dans l’argile, notamment ceux contenant du fer et du titane, interagissent favorablement avec les micro-organismes. Les résultats ont aussi révélé que le lixiviat de smectite stimule la production d’acides gras à chaîne courte (AGCC) dans les intestins des souris. Ces AGCC, comme l’acétate, le propionate et le butyrate, sont produits par les bactéries intestinales lorsqu’elles dégradent des fibres alimentaires et jouent un rôle clé dans la régulation des fonctions digestives et immunitaires.

Si les probiotiques et les prébiotiques sont couramment utilisés pour améliorer la santé intestinale, ils ont leurs limites. Les probiotiques peuvent être sensibles aux conditions du tractus gastro-intestinal, et les prébiotiques ont des effets variables. En revanche, l’argile de Lemnos et son champignon associés offrent un traitement non alimentaire qui pourrait moduler directement le microbiome intestinal avec des petites molécules. Cette approche pourrait potentiellement être utilisée pour traiter des maladies inflammatoires intestinales, des infections et même des troubles métaboliques.

Cette recherche soutient également l’idée que des remèdes anciens pourraient être réutilisés dans un contexte moderne, ce qui les rendrait plus accessibles et acceptables. Bien que l’efficacité n’ait pas encore été démontrée chez l’homme, les perspectives sont encourageantes. Ce remède antique, longtemps oublié, pourrait inspirer des traitements innovants au XXIe siècle.

Par Eric Rafidiarimanana, le

Source: ZME Science

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