
Depuis des décennies, l’amas de Persée était considéré comme un modèle de stabilité cosmique. Mais de nouvelles observations viennent remettre en question cette réputation. Des astronomes ont mis au jour une immense structure de matière reliant deux amas de galaxies, suggérant qu’une collision titanesque s’est produite il y a plusieurs milliards d’années. Cette découverte, rendue possible grâce à une technique avancée d’observation appelée lentille gravitationnelle faible, éclaire enfin un vieux mystère astronomique.
Un colosse cosmique longtemps jugé paisible
L’amas de Persée, nommé d’après la constellation dans laquelle il se trouve, est l’un des plus grands ensembles de galaxies de l’Univers observable. Composé de plusieurs milliers de galaxies, il s’étend sur plus de 11 millions d’années-lumière. Situé à environ 250 millions d’années-lumière de notre planète, il reste relativement proche à l’échelle cosmique, bien qu’il continue de s’éloigner rapidement à cause de l’expansion de l’Univers.
Jusqu’à récemment, les scientifiques pensaient que Persée était un amas « détendu », un terme utilisé pour désigner les structures galactiques qui n’ont pas connu de perturbations depuis longtemps. Les signes semblaient aller dans ce sens puisqu’un écoulement stable de gaz chauds circulait à l’intérieur de l’amas, tandis qu’une émission diffuse d’ondes radio, appelée « mini-halo », baignait la galaxie centrale, témoignant d’un équilibre thermique et dynamique.
Cependant, certains indices troublaient ce tableau de sérénité. L’amas de Persée présentait une forme légèrement déséquilibrée, particulièrement dans l’axe est-ouest, un détail qui intriguait les astronomes. En 2012, cette énigme s’est épaissie avec la détection de « fronts froids », de vastes poches de gaz plus denses et plus froids, typiques des zones où deux amas galactiques entrent en collision. Mais l’identité du second amas à l’origine de cet « accident cosmique » restait mystérieuse.
Une enquête cosmique relancée grâce à la lentille gravitationnelle faible
Dans une nouvelle étude publiée récemment dans Nature Astronomy, des astronomes américains et sud-coréens ont répondu à cette question. Grâce au télescope Subaru installé à Hawaï, les scientifiques ont employé la lentille gravitationnelle faible pour traquer la trace laissée par un possible intrus galactique.
Cette méthode repose sur une idée issue de la relativité générale d’Einstein. Les objets massifs déforment la structure de l’espace-temps, ce qui dévie les rayons lumineux des objets situés en arrière-plan. Dans le cas d’une lentille gravitationnelle faible, ces déformations sont subtiles, mais observables statistiquement sur un grand nombre de galaxies.
Les chercheurs ont analysé les légères distorsions de la lumière provenant de galaxies situées derrière l’amas de Persée. Cette technique leur a permis de cartographier la répartition de la masse dans l’amas, visible ou sombre, et d’identifier un intrus cosmique.
Le pont galactique
Les résultats de cette analyse ont révélé un sous-amas caché, centré autour de la galaxie NGC 1264, niché dans la périphérie de Persée. Ce sous-amas, environ 100 fois plus massif que la Voie lactée, est relié à l’amas principal par un gigantesque pont de matière d’environ 1,4 million d’années-lumière de long. Ce pont, composé de masse visible et sombre, est la preuve directe d’une interaction gravitationnelle entre les deux amas.
Les simulations informatiques des chercheurs confirment que ce pont est à l’origine de la forme déséquilibrée de l’amas de Persée. Le modèle informatique reconstruit également les fameux fronts froids détectés en 2012, confirmant que ces anomalies sont bien liées à une collision passée. « Le résultat m’a profondément étonné », confie HyeongHan Kim, doctorant à l’université Yonsei et principal auteur de l’étude. « Je pensais que Persée était un amas parfaitement détendu. »
Selon la modélisation des chercheurs, la rencontre entre ces deux titans cosmiques remonte à environ 7,5 milliards d’années. Le sous-amas serait entré sous l’influence gravitationnelle de Persée et aurait traversé son centre à plusieurs reprises, chaque passage étant suivi d’une oscillation gravitationnelle. Il aurait effectué au moins trois passages, le dernier datant d’environ 750 millions d’années.
Outre la résolution d’un vieux mystère cosmique, cette étude ouvre de nouvelles perspectives dans la compréhension de l’évolution des amas de galaxies. L’amas de Persée, en raison de sa proximité et de sa taille, constitue un laboratoire pour tester les grandes théories astrophysiques. Cette approche pourrait conduire à l’identification d’autres fusions anciennes passées inaperçues et améliorer notre compréhension de la formation des grandes structures de l’Univers.
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Par Eric Rafidiarimanana, le
Source: Live Science
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