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Médicaments : de nombreuses molécules d’excipients seraient biologiquement plus actives que prévu

Un bon nombre d'entre elles peuvent avoir des effets jusqu'ici non observés sur des protéines humaines

― Fahroni / Shutterstock.com

Des milliers d’excipients entrant dans la composition des médicaments les plus courants et que l’on pensait auparavant inertes ont été passés au crible. Et il s’avère que plusieurs dizaines de ces composés peuvent être biologiquement actifs et provoquer des effets physiologiques indésirables.

3 000 excipients passés au crible

La plupart des médicaments contiennent d’autres ingrédients utilisés à des fins diverses, allant du simple gonflement de la minuscule molécule active pour qu’elle puisse être conditionnée sous forme de pilule, à différents liants ou enrobages visant à améliorer son potentiel thérapeutique. Appelés excipients, ces composés supplémentaires sont considérés comme inertes et biologiquement inactifs, sur la base d’études de toxicité antérieures menées sur les animaux.

Dans le cadre de ces recherches récemment publiées dans la revue Science, les chercheurs ont systématiquement passé au crible plus de 3 000 excipients, après s’être rendu compte que la plupart des composés actuellement utilisés n’avaient été désignés comme inactifs que sur la base d’études animales ou de précédents historiques. Bien que ces additifs ne génèrent pas d’effets physiologiques aigus, il n’existait jusqu’à présent pas de données concernant leurs interactions moléculaires spécifiques ou leurs effets à long terme.

Afin de combler ce manque de connaissances, l’équipe a fait dans un premier temps une vaste évaluation informatique du potentiel d’interaction des molécules d’excipient avec les protéines humaines, ce qui a permis aux chercheurs d’identifier les excipients les plus susceptibles d’interagir avec les protéines humaines et de tester ensuite ces molécules dans des conditions de laboratoire.

Les résultats ont porté sur 38 molécules d’excipient qui ont montré des interactions avec 134 enzymes ou récepteurs humains. Selon l’équipe de recherche, la puissance de certains de ces excipients était inattendue et pourrait hypothétiquement expliquer la variété des réponses physiologiques observées chez différents patients prenant le même médicament.

― Goksi / Shutterstock.com

« Il était étonnant de voir à quel point certaines de ces molécules s’avèrent puissantes »

« Nos travaux devaient s’appuyer sur des preuves ponctuelles que les excipients pouvaient être responsables des effets physiologiques inattendus observés dans certaines formulations de médicaments », explique Joshua Pottel, auteur principal de l’étude. « Il n’était pas si surprenant de découvrir de nouvelles propriétés de composés sous-étudiés ayant été considérés comme ‘inactifs’ pendant des décennies, mais il était étonnant de voir à quel point certaines de ces molécules s’avèrent puissantes, surtout si l’on considère les quantités assez élevées parfois utilisées dans les formulations des médicaments les plus courants. »

Il convient toutefois de souligner que cette recherche ne prétend pas que ces excipients puissent avoir de graves conséquences sur la santé humaine. D’autres études seront nécessaires pour comprendre si ces interactions moléculaires entraînent effectivement des effets physiologiques négatifs chez l’Homme. Cependant, les chercheurs suggèrent que, dans de nombreux cas, ces excipients biologiquement actifs pourraient être facilement remplacés par des équivalents inactifs.

« Ces données montrent que si de nombreuses molécules d’excipients sont tout à fait inertes, un bon nombre d’entre elles peut avoir des effets jusqu’ici non observés sur des protéines humaines dont on sait qu’elles jouent un rôle important pour la santé et dans le développement des maladies », déclare Brian Shoichet, co-auteur de l’étude.

« Nos travaux démontrent l’efficacité d’une approche qui pourrait à l’avenir être utilisée par les fabricants de médicaments afin d’évaluer les excipients utilisés dans leurs formulations, et remplacer les composés biologiquement actifs par des molécules équivalentes qui sont réellement inactives », conclut le chercheur.

Par Yann Contegat, le

Source: New Atlas

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