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Découverte d’un ancien fort amérindien visant à repousser les forces russes en Alaska

Pour les scientifiques, il s’agit d’un symbole culturel important de la résistance tlingit face à la colonisation

La Bataille de Sitka par le peintre Louis Glanzman — © D. Curl / Sitka National Historical Park / Wikimedia Creative Commons

Construit par les Tlingits au début du 19e siècle, le Shis’gi Noow, ou « fort des jeunes pousses », constituait l’ultime obstacle physique à l’avancée des forces russes. Grâce aux techniques modernes de télédétection et d’imagerie, celui-ci vient d’être redécouvert.

Un mystère centenaire enfin résolu

Depuis la bataille décisive de 1804, ayant marqué le début de dix décennies de domination russe en Alaska, la localisation exacte du Shis’gi Noow était restée un mystère. Jusqu’à ce que de nouvelles recherches, présentées dans la revue Antiquity, mettent en évidence la forme inhabituelle de l’enceinte du fort dans le parc national historique de Sitka, situé à l’embouchure de la rivière Kasda Heen. Une découverte réalisée grâce au concours d’un radar à pénétration de sol (GPR) et à l’induction électromagnétique.

« Sa localisation exacte échappait aux experts depuis un siècle », explique l’archéologue Thomas Urban, de l’université de Cornell. « Les fouilles archéologiques précédentes avaient trouvé des indices suggestifs, mais pas de preuves concluantes les reliant entre eux. »

Les forces russes sont arrivées pour la première fois en Alaska en 1799, déterminées à créer un avant-poste pour le commerce des fourrures, mais elles ont été repoussées en 1802, date à laquelle ce fort de forme trapézoïdale, a été construit. La bataille a repris en 1804. Bien que la population indigène tlingit ait été armée de fusils, de canons et de poudre par les commerçants britanniques et américains, des problèmes d’approvisionnement ont permis aux Russes de revendiquer l’emplacement après cinq jours de combat.

La domination russe s’est ensuite poursuivie jusqu’à l’achat de l’Alaska par les États-Unis en 1867, pour la somme de 7 millions de dollars.

Esquisse du fort dessinée par Yuri Lisyansky après la bataille de Sitka (1804) — © Wikimedia Creative Commons

« Nous avons pu à la fois confirmer sa localisation et exclure d’autres emplacements potentiels »

L’utilisation de multiples méthodes de détection s’est ici révélée cruciale : alors qu’une zone du parc située près du front de mer, où les scientifiques pensaient que le fort se trouvait, avait précédemment été défrichée, les preuves définitives de son emplacement faisaient jusqu’à présent défaut.

Différents matériaux (boulets de canon, briques, trous de poteau, terre meuble) donnent des lectures différentes aux outils géophysiques utilisés par les chercheurs, leur permettant de scruter le sous-sol, même dans les zones de végétation dense. En cartographiant des parties du parc historique national de Sitka sous forme de grille, ils ont pu déterminer l’emplacement du fort.

« Nous avons pu à la fois confirmer sa localisation et exclure d’autres emplacements potentiels », explique Brinnen Carter, gestionnaire de ressources et archéologue au Service des parcs nationaux. « Aucune autre signature souterraine ne correspond à la forme connue du fort, et le site renvoie aux récits tlingits et russes des combats. Il s’agit de l’une des plus grandes études de ce type réalisées jusqu’à présent en Alaska. »

Un lieu symbolique

Pour les Tlingits, et plus particulièrement le clan des Kiks.adi, dont les ancêtres ont défendu le site face à l’envahisseur russe, l’emplacement du fort représente un lieu sacré.

« Nous pensons que cette étude constitue la seule preuve convaincante à ce jour de l’emplacement du fort des jeunes pousses, qui est un lieu important dans l’histoire coloniale du Nouveau Monde et un symbole culturel important de la résistance tlingit face à la colonisation », a estimé Urban.

Les méthodes actuelles de télédétection s’avèrent cruciales pour la mise au jour de vestiges archéologiques. Ces derniers mois, de tels outils ont notamment permis aux chercheurs de découvrir 66 camps romains faisant la lumière sur la conquête de l’Espagne, ainsi que le plus ancien et vaste édifice maya connu.

Par Yann Contegat, le

Source: Science Alert

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