Trois économistes auteurs d’une analyse publiée dans Science ont mis en avant un constat qui creuse encore les inégalités entre hommes et femmes : plus un pays est inégalitaire économiquement, plus les performances scolaires des filles en sciences se réduisent par rapport à celles des garçons.

 

LES FILLES MOINS BONNES EN MATHÉMATIQUES ?

Les filles ont pourtant globalement des meilleurs résultats à l’école que les garçons, elles redoublent moins, elles sont plus susceptibles de faire des études plus longues, et elles obtiennent de meilleurs résultats au baccalauréat. Pourtant, elles sont sous-représentées dans les filières scientifiques, qui sont justement celles qui mènent bien souvent aux professions les mieux rémunérées. Les bancs des prépas scientifiques et des écoles d’ingénieurs sont désertés par les filles, et l’immense majorité des doctorants en science sont des hommes.

Des inégalités que le programme PISA (Programme International pour le Suivi des Acquis) menées par l’OCDE  a décidé d’étudier plus en profondeur. Les enquêtes visent  à mesurer les performances des systèmes éducatifs des pays membres et non-membres, et affirment que si la performance moyenne en mathématiques à 15 ans se réduit entre les sexes, il n’en va pas de même de la différence parmi ceux qui réussissent le mieux. En effet, parmi les 10 % des meilleurs élèves en mathématiques et en sciences, on observe seulement 40 % de filles. Et le rapport est inversé pour les matières littéraires dans lesquelles seules 40 % des garçons sont représentés parmi les meilleurs.

Alors les filles seraient-elles plus littéraires et les garçons auraient-ils un esprit plus mathématique ?

DES FACTEURS ÉCONOMIQUES ET SOCIAUX

Le rapport démontre que la situation est différente selon les pays. Ceux dans lesquels les filles sont moins bonnes en sciences et en mathématiques sont aussi ceux dans lesquels elles sont moins bonnes dans les matières littéraires. Conclusion, plus un pays est inégalitaire que ce soit en terme de revenus ou de système éducatif, plus les inégalités de performance générales entre les sexes sont élevées.

Pour observer les inégalités liées au système éducatif, les méthodes employées sont la mesure de la proportion d’élèves de milieux socio-économiques défavorisés parmi les élèves les plus performants et l’analyse de disparités du niveau socio-économique moyen entre écoles. Le rapport indique que les inégalités de performance sont souvent liées aux caractéristiques institutionnels des pays concernés, c’est-à-dire la capacité à réduire les inégalités économiques (fiscalité importante, salaire minimum, etc.) et aux caractéristiques institutionnelles des systèmes éducatifs censés être garants de l’équité au seine du système scolaire (le taux de redoublement, la qualité du système éducatif, etc.).

UN CHEMIN ENCORE LONG VERS L’ÉGALITÉ SCOLAIRE

Cette étude nous apporte une preuve solide que les inégalités de sexe dans les matières scientifiques n’ont rien à voir avec les caractéristiques intrinsèques des hommes et des femmes mais sont liées aux inégalités sociales. Ces inégalités sont induites par les normes et les institutions de certains pays qui maintiennent des préjugés sociaux sur les femmes. L’étude montre également que le changement de statut social des individus au cours du temps et entre les générations évolue plus rapidement dans les pays qui cherchent à réduire les inégalités.

Pour lutter contre les inégalités entre filles et garçons et entre riches et pauvres, s’attaquer aux stéréotypes paraît essentiel, et cela constitue un bon début mais ce n’est pourtant pas suffisant. À l’avenir, les gouvernements des pays devront également mettre en place des politiques pour rendre le système scolaire plus juste et plus inclusif.

Lorsqu’on sait que la France est la championne du monde développé en matière d’inégalités sociales à l’école, toujours selon PISA, on peut se poser des questions sur le chemin qui reste à parcourir pour obtenir un système plus juste.

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