— Anna Kraynova / Shutterstock.com

Nadia Chernyak, professeur adjoint de sciences cognitives à l’université de Californie, a voulu comprendre et savoir comment se développait le concept de réciprocité directe positive dans le cerveau des enfants. Nous définissons la réciprocité directe positive comme la faculté de quelqu’un à être gentil envers un individu particulier si ce dernier a lui-même été gentil avec nous. Les résultats de ses recherches, publiés dans Psychological Science, ont indiqué que pour les enfants, le besoin de vengeance se développe avant la gratitude. Les recherches ont été menées avec l’aide des chercheurs du Franklin & Marshall College, de l’université de Yale et de l’université de Boston.

LES ENFANTS NATURELLEMENT PLUS ENCLINS À LA VENGEANCE

Les chercheurs étaient intéressés par l’évolution du pouvoir de la gratitude chez les enfants. Ils ont donc mené des expériences différentes avec 330 enfants de 4 à 8 ans et ont découvert que les enfants les plus jeunes étaient plus susceptibles de rendre la pareille suite à des actions négatives que des actions positives.

Dans chaque essai, les enfants ont joué à un jeu d’ordinateur avec quatre autres avatars contrôlés par des chercheurs, mais qu’ils pensaient être d’autres enfants. Dans le jeu du don, les quatre autres joueurs reçoivent chacun un autocollant, mais l’enfant n’en reçoit pas. Vient ensuite la seconde phase du jeu. L’enfant reçoit un deuxième autocollant, qu’il peut donner à n’importe lequel des avatars s’il le souhaite. Dans la version du vol, on donne un autocollant à l’enfant qui lui est ensuite volé par l’un des quatre autres joueurs. Là, les quatre autres joueurs ont donc plusieurs autocollants, dont un volé à l’enfant au préalable. 

L’enfant doit ensuite faire un choix : Donnera-t-il son deuxième autocollant au joueur qui lui en avait donné un ? En volera-t-il un au joueur qui lui en avait volé un ? Les chercheurs ont observé que ce dernier cas était plus fréquent, puisque les enfants étaient souvent plus soucieux de se venger que de rendre la faveur, et ce, jusqu’à l’âge de sept ans ou plus. Ils vont donc plus cibler les voleurs que remercier les bienfaiteurs.

Un autre essai a essayé d’influencer les enfants en effectuant un regroupement par couleur, avec deux des joueurs portant les vêtements de la même couleur que l’avatar de l’enfant. Un enfant serait-il plus enclin à rendre une faveur à celui avec lequel il partage une certaine similitude ? Les résultats ont prouvé que non.

TOUTEFOIS, LA GRATITUDE PEUT TOUJOURS ÊTRE APPRISE

Ce comportement a tout d’abord désarçonné les chercheurs, qui ont ensuite déclaré que « les jeunes enfants ne sont pas forcément avares ; ils ne connaissent tout simplement pas la règle. Leurs principes sont un peu différents de ceux des adultes. Il faut des éléments cognitifs, ainsi qu’une exposition aux normes sociales pertinentes à leur culture, pour leur apprendre à naviguer dans le monde. »

La dernière expérience avait pour but de savoir si les enfants seraient plus enclins à montrer de la gratitude si on leur faisait comprendre qu’ils le devraient. L’équipe de Nadia Chernyak a séparé les enfants en deux groupes. Le premier groupe a appris l’histoire de deux enfants qui ont été gentils l’un envers l’autre et qui se sont rendu des faveurs. Le deuxième a entendu l’histoire de deux jeunes gens qui se sont comportés de façon positive, mais sans que cela soit effectué dans le cadre d’une réciprocité. Les deux groupes ont ensuite rejoué au jeu du don. Les résultats du jeu ont montré que les enfants du premier groupe étaient maintenant beaucoup plus susceptibles de rendre les faveurs et de redonner l’autocollant au joueur qui le leur avait offert par rapport aux enfants du deuxième groupe.

« Le résultat n’est donc pas si sombre, après tout« , constate Chernyak. « Le besoin de vengeance survient peut-être plus naturellement, mais la gratitude peut facilement être apprise. Entendre une histoire simple était suffisant pour que les jeunes enfants commencent à rendre les faveurs. »

Mais certains chercheurs, comme Peter Blake, ont interprété ce besoin de vengeance comme un geste défensif, pour se protéger d’une potentielle victimisation future. « Les enfants envoient à la personne, mais également au monde plus large, le message suivant : ‘Je ne suis pas une bonne poire‘. » Ce comportement le rend donc un peu moins négatif. Par exemple, si quelqu’un nous volait quotidiennement notre argent du déjeuner, il serait normal que nous réagissions. Il est important de se défendre.

S’abonner
Notifier de
guest

2 Commentaires
Le plus populaire
plus récent plus ancien
Inline Feedbacks
View all comments
First
First
4 années

Idem les animaux.
Il faudrait reproduire cette expérience aux quatre coins du monde.
Et dans les différentes religions,boudhistes,athées,laiques, chintoistes…