Au-delà des confins habituellement scrutés par les télescopes, dans une région isolée de la Voie lactée, les scientifiques ont décelé la présence de phosphore, un élément fondamental pour la vie telle que nous la connaissons. Cette trouvaille, publiée dans la revue Nature, remet en question les théories existantes sur la formation des éléments vitaux et élargit potentiellement la zone d’habitabilité dans l’Univers.
Un mystère astronomique à la périphérie de la Voie lactée
Au cœur des discussions sur l’origine de la vie, une récente découverte astronomique ébranle les théories établies. Les scientifiques ont localisé du phosphore, élément essentiel à la vie, dans le nuage WB89-621, situé à environ 74 000 années-lumière du centre de la Voie lactée. Cette trouvaille est surprenante, car elle intervient dans une région où la présence de phosphore semblait improbable. Les régions périphériques de la galaxie sont généralement moins denses en matière, rendant la formation d’étoiles massives – traditionnellement liées à la production de phosphore – peu probable.
La découverte remet en question l’idée que les éléments nécessaires à la vie se limitent à des zones riches en matière. Cela suggère des mécanismes alternatifs pour la création de cet élément vital. Lucy Ziurys, astronome et chimiste à l’université d’État de l’Arizona, affirme que la production de phosphore nécessite des événements violents tels que les supernovas.
La production d’éléments dans l’Univers
La création des éléments dans l’Univers est un processus complexe, traditionnellement associé aux étoiles. Dans la cosmogonie stellaire, l’hydrogène et l’hélium, issus du plasma primordial de l’Univers, fusionnent au sein des étoiles pour former des éléments plus lourds. La fusion stellaire varie selon la masse des étoiles, produisant divers éléments. Des étoiles de la taille du Soleil ou plus petites produisent des éléments légers comme le lithium et le béryllium, tandis que des étoiles plus massives facilitent la formation d’éléments comme l’oxygène et l’azote.
Le phosphore, cependant, n’entre dans aucune de ces catégories. Traditionnellement, on pensait qu’il se formait uniquement lors d’explosions de supernovas, des phénomènes puissants survenant dans des étoiles ayant au moins 20 fois la masse du Soleil. Ces explosions de supernova jouent un rôle crucial en projetant des éléments dans l’espace, contribuant ainsi à la création de nouvelles générations d’étoiles et d’autres corps célestes. « Nous avons trouvé du phosphore au bord de la galaxie, ce qui n’est pas normal », explique Lilia Koelemay, scientifique à l’université d’État de l’Arizona. Cela signifie qu’il pourrait y avoir d’autres processus en jeu.
Repenser la formation du phosphore
Face à cette découverte inattendue, deux hypothèses principales sont avancées pour expliquer la présence de phosphore à la périphérie de la galaxie. La première est celle de la « fontaine galactique », un modèle où les éléments sont transportés des régions internes vers les périphéries de la galaxie par les explosions de supernova. Cependant, cette théorie est contestée car il existe peu de preuves de l’existence de telles fontaines galactiques, et elles ne semblent pas capables de transporter la matière sur de grandes distances.
La seconde hypothèse concerne la production du phosphore par des étoiles moins massives. Il ne s’agit pas d’une explosion, mais d’un processus appelé capture de neutrons qui se déroule dans la région entourant leur noyau. Dans ce cas, des neutrons supplémentaires sont capturés par des isotopes de silicium pour créer du phosphore. La présence de cet élément loin des sources de supernova suggère que ce modèle pourrait être valide.
Influence sur la recherche de la vie extraterrestre
Cette découverte est significative car elle complète le tableau des éléments NCHOPS (azote, carbone, hydrogène, oxygène, phosphore, soufre) identifiés à la périphérie galactique. Comme le souligne Mme Ziurys, ces éléments sont considérés comme essentiels pour la vie. Avec la présence confirmée de phosphore à la périphérie de la Voie lactée, la zone habitable de la galaxie s’étend bien au-delà de ce que l’on pensait auparavant.
Katherine Gold, de l’Arizona State University, déclare : « Nous espérons que la découverte de phosphore à la périphérie de la galaxie pourra motiver l’étude d’exoplanètes lointaines. » Jusqu’à présent, la recherche de vie extraterrestre se concentrait sur des régions riches en matière, en se basant sur la présence des éléments NCHOPS. La découverte du phosphore à la périphérie de la galaxie étend cette zone habitable potentielle, incitant les astronomes à considérer des régions auparavant négligées dans leur quête de vie au-delà de la Terre.
Par Eric Rafidiarimanana, le
Source: Science Alert
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