Bon nombre de foyers français consomment régulièrement une tablette de chocolat. En revanche, si nos enfants européens apprécient le produit, ce n’est sûrement pas le cas pour les jeunes Africains, régulièrement utilisés dans sa chaîne de production. À travers une nouvelle étude, les chercheurs ont calculé le surcoût nécessaire pour s’assurer que les foyers au Ghana puissent récolter le cacao sans avoir besoin de faire travailler leurs enfants. Explications.

La face cachée du chocolat

Il y aurait aujourd’hui plusieurs millions d’enfants qui travailleraient dans ce secteur sous-payé de l’industrie du cacao et du chocolat. Cela représenterait entre 80 et 100 milliards de dollars par an, pour le compte de 6 grands industriels comme l’explique le site Bastamag. Et parmi toute l’industrie du cacao en Afrique, ce sont les pays d’Afrique de l’Ouest qui sont les principaux producteurs, avec plus de 70 % de la production mondiale qui y est cultivée. Une des particularités de la région est que ces plantations sont principalement familiales, nécessitant une main-d’œuvre permanente et en nombre. Il n’est donc pas rare que les parents, censés être les seuls travailleurs, soient obligés d’employer leurs enfants pour parvenir à exécuter leurs tâches.

Ces derniers se retrouvent ainsi en contact avec des produits chimiques, des pesticides, des éléments qui attaquent à la fois les exploitations et leur organisme. Il est estimé qu’entre 300 000 et 1 million d’enfants travailleraient dans ces plantations d’Afrique de l’Ouest, bien loin de l’école. Pire encore, ce chiffre navrant est en constante augmentation, avec plus de 48 % par rapport à il y a 10 ans.

Si certaines marques ont décidé de prendre des mesures pour enrayer un tel phénomène d’esclavage, ce n’est pas le cas par exemple de Ferrero, le géant du chocolat et propriétaire de Nutella. Dans certains cas, les enfants sont directement arrachés à leur famille, et vendus aux producteurs les plus offrants. Payés moins de deux dollars par jour, et très souvent gratuitement, les conditions dans lesquelles ils exercent sont très primaires. Heureusement, on peut par exemple citer le cas de Nestlé qui s’est engagé à prendre des mesures concrètes pour lutter contre le travail des enfants, sur ses plantations de cacao.

Quel serait le prix d’une barre de chocolat sans le travail des enfants ?

Mettre fin à un tel “travail” aurait, logiquement, des répercussions multiples. Premièrement, les bénéfices des grands groupes chocolatiers diminueraient incontestablement. Ensuite, on peut s’attendre à des répercussions sur notre propre portefeuille. L’étude que nous souhaitons mettre en avant à travers cet article a été publiée ce mercredi 5 juin dans la revue très sérieuse Plos One. Et l’augmentation du prix d’une tablette de chocolat démarrerait à partir de 2 %, si nous nous attaquions à l’emploi des enfants dans la production du chocolat.

Les chercheurs se sont penchés sur le cas du Ghana, qui est le deuxième pays exportateur dans le monde de cacao. Ainsi, il faudrait mettre un terme au travail quasi systématiquement illégal des enfants dans cette production. En 2015, 39 % des enfants ont travaillé dans le secteur du cacao. Cela représente environ 376 000 individus qui “ont été impliqués dans une forme de travail dangereuse” rappellent les auteurs de l’étude. Certaines lois existent pour règlementer le secteur, mais elles ne sont pas du tout respectées.

Aujourd’hui, quelques labels de chocolat et de cacao proposent une certification garantissant une main-d’œuvre adulte. Généralement, ce n’est pas le cas du Ghana ou de la Côte d’Ivoire, qui sont plongés dans la pauvreté et qui continuent de faire travailler les enfants dans les exploitations de cacao. Seulement voilà, d’après les auteurs de l’étude, l’augmentation du prix du chocolat, sans inclure des enfants dans la chaîne de production, serait de l’ordre de 2 à 47 % d’augmentation.

Les chercheurs évoquent principalement trois conclusions pour qu’un ménage moyen travaillant dans la production de cacao puisse s’en sortir. Tout d’abord, il faudrait augmenter le prix du cacao à hauteur de 2 % afin de ne plus confronter les enfants à “un travail dangereux”. Si l’objectif est de supprimer le “travail régulier” des enfants, qui n’est pas considéré comme dangereux mais demeure illégal de par la quantité de travail abattu par l’enfant, il faudra augmenter le prix du cacao de 9 %. Et enfin, en finir avec le travail d’enfants au Ghana reviendrait à augmenter le coût du cacao de 47 %. Évidemment, les principaux contestataires sont les entreprises elles-mêmes, qui perdraient un bénéfice monstre.

D’ailleurs, d’après les auteurs, l’abolition totale du travail d’enfants, et donc l’augmentation de 47 %, semble, à l’heure actuelle, impossible. Ils estiment que les augmentations de 2 % et de 9 % seraient, dans un premier temps, “plus pragmatiques”. Au Ghana d’ailleurs, le Cocobod est un organisme unique et gouvernemental qui fixe le prix du cacao et qui en centralise sa gestion. Les auteurs de l’étude se demandent si ce n’est pas à cet organisme de commencer la campagne contre le travail des enfants en mettant en place un vaste programme de surveillance, sous l’égide gouvernementale…

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