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Cet article nous a été inspiré par l’excellent travail de Komitid, à l’origine de cette enquête concernant le calvaire de ces jeunes LGBT+ confinés avec leur famille homophobe. Au travers de divers témoignages recueillis par l’équipe de Komitid, nous observons à quel point ces jeunes personnes sont vulnérables face à cette situation de confinement, car comme le montrent de nombreuses études, les violences intrafamiliales ont fortement augmenté depuis le 17 mars.

LE CAUCHEMAR DES JEUNES LGBT CONFINÉS, ÉXPOSÉS QUOTIDIENNEMENT À LA VIOLENCE

Les témoignages recueillis par Komitid font état des mêmes violences et difficultés. La plupart de ces jeunes sont en effet confinés avec des parents homophobes tout au long de la journée, au cours de laquelle ils reçoivent sans cesse des insultes, voire des coups pour certains d’entre eux. Antoine, 17 ans, témoigne de la violences que son beau-père lui impose, essentiellement verbale : « Il me demandait de ne pas l’approcher, car il ne voulait pas “devenir pédé” ou me disait d’aller me “faire enculer”. » Antoine a également été victime de violence physique, puisque ce même beau-père l’a frappé. Son expérience rejoint celle de Martin, 22 ans, qui tous les jours entend les propos homophobes de ses parents : « Mes parents traitent souvent notre président de “pédé” et disent que nous sommes de la vermine, (…) Mais tout s’est accentué depuis le début du confinement, car ils regardent les infos 24h/24 et lancent des insultes homophobes à tout va. »

Mais cette violence peut parfois être beaucoup plus insidieuse, comme dans le cas des jeunes personnes n’ayant pas encore fait leur coming-out, et qui doivent prendre sur eux en permanence de façon à ne pas s’exposer, surtout quand leur famille est homophobe. C’est le cas de Marc, 20 ans, qui déclare : « Se cacher a toujours fait partie de mon quotidien (…) Mais là, c’est encore pire parce que je suis constamment avec eux. Quand je suis au téléphone avec mes amis ou que je parle avec mon copain, je fais attention à tout ce que je dis. J’évite aussi de laisser mon ordinateur ou mon téléphone traîner. »

CES VIOLENCES ONT DES CONSÉQUENCES DÉSASTREUSES SUR LA SANTÉ MENTALE DE CES JEUNES

Les coups, les insultes et cette obligation de se cacher pour certains jeunes LGBT+ ont des conséquences désastreuses, soulignées par l’article de Komitid. En premier lieu, cela engendre un épuisement mental. Martin évoque une irritabilité et une baisse de motivation. Beaucoup se referment sur eux-mêmes, comme Antoine qui s’enferme chaque jour dans sa chambre, devant son ordinateur. Marc estime que « ce confinement va avoir un énorme impact sur (sa) santé mentale ». Le confinement imposé a également un grand impact sur leur estime d’eux-mêmes, qui se détériore souvent significativement. Gabrielle Richard, sociologue, fait l’analyse que ces jeunes « peuvent avoir l’impression d’être constamment au front, en danger, sur le qui-vive pour anticiper ou se protéger des paroles ou des actions blessantes. Jusqu’ici, ils pouvaient éviter le contact avec ces familles ou le limiter à des événements ponctuels. Mais la situation contraint à ces rapprochements non désirés. Cela décuple l’anxiété générée chez tout le monde par la pandémie actuelle. »

Charly, jeune homme trans de 18 ans, fait aussi face à de grandes difficultés, ayant été expulsé de chez lui : « Mon beau-père ne me tolérait pas du tout, me frappait, m’insultait, m’a coupé l’eau chaude et privé de nourriture. J’en ai parlé à ma mère, mais elle a préféré me mettre dehors. » Cela retarde la prise de son traitement hormonal, ce qui l’affecte beaucoup : « Ma vie est sur pause, je n’avance pas. Je lutte pour ne pas rester au lit toute la journée. J’essaie de tirer profit de ces temps, mais c’est vraiment difficile.« 

UNE MOBILISATION POLITIQUE EN DEMI-TEINTE

Malheureusement, il n’existe pas de dispositif particulier disponible pour les jeunes LGBT. Une cinquantaine de députés s’en sont aperçus, et ont décidé de prendre les choses en main. Ils se sont adressés à Marlène Schiappa au travers d’un courrier, dans lequel ils réclamaient la création de solutions d’hébergement d’urgence pour les jeunes LGBT+.

Sonia Krimi, la députée à l’origine du courrier, a par ailleurs présenté un amendement sur cette question. Sa proposition était la suivante : utiliser 120.000 euros des crédits normalement « destinés à l’urbanisme et l’aménagement » pour créer un hébergement d’urgence, dont plus de 100 jeunes pourraient profiter jusqu’au 11 mai. Cet amendement a scandaleusement été rejeté, en plus d’avoir été considéré défavorablement par le gouvernement, qui n’a même pas pris le soin de défendre sa position. Les associations sont outrées. Komitid a recueilli les propos d’Omar Didi, président du MAG Jeunes LGBT, qui déclare : « Au-delà de la déception, c’est un déni de ce que vivent les victimes de violences. » Sonia Krimi ajoute que cette décision est le « symbole violent de manque d’empathie vis-à-vis des victimes que l’on renvoie au placard ».

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