
En examinant l’aire de répartition d’une méduse évoluant dans l’océan Atlantique, des chercheurs ont constaté que ses deux populations étaient séparées par une barrière invisible.
Frontière biogéographique
Évoluant à plus de 1 000 mètres de profondeur, les représentantes de la sous-espèce Botrynema brucei ellinorae se distinguent essentiellement par la présence, ou l’absence, d’une excroissance semblable à un bouton au sommet de leur cloche. En combinant analyses génétiques, moléculaires et rapports scientifiques et historiques, les auteurs de la nouvelle étude, publiée dans la revue Deep Sea Research, ont constaté que cet attribut semblait largement influencer leur aire de répartition.
Il s’est avéré que les spécimens en étant dépourvus étaient cantonnés aux eaux arctiques et subarctiques, quand les méduses à bouton étaient systématiquement observées à des latitudes plus méridionales.
« Cette différence morphologique, malgré de fortes similitudes génétiques entre les spécimens évoluant de part et d’autre du 47e parallèle nord, indique l’existence d’une barrière biogéographique jusqu’alors inconnue dans l’océan Atlantique », précise Javier Montenegro, scientifique à l’université d’Australie-Occidentale ayant supervisé les recherches.
Si la fonction de ce « bouton » reste obscure, le cloisonnement clair des deux populations de B. brucei ellinorae suggère un possible avantage évolutif, qui réduirait le risque de prédation dans des eaux plus chaudes.

L’exemple de la ligne Wallace
Parmi les barrières biogéographiques les plus célèbres figure la ligne Wallace. Partant de l’océan Indien, passant entre Bali et Lombok, longeant Bornéo et se terminant à l’est des Philippines, elle a longtemps intrigué les scientifiques en raison de l’asymétrie marquée des espèces se trouvant de part et d’autre.
Il y a environ 35 millions d’années, l’Australie était située beaucoup plus au sud et reliée à l’Antarctique. Celle-ci s’en est par la suite séparée (créant un nouveau passage maritime beaucoup plus froid à l’origine d’une baisse spectaculaire des températures mondiales) et a dérivé vers le nord pendant des millions d’années. Sa collision avec le continent asiatique a finalement donné naissance aux îles volcaniques indonésiennes.
En 2023, l’étude de quelque 20 000 espèces (oiseaux, mammifères, reptiles, amphibiens…) connues pour évoluer dans cette partie du globe avait révélé qu’une part importante de la faune originaire d’Asie s’était établie en Australie, quand le scénario inverse s’avérait beaucoup plus rare. Globalement, les espèces ayant évolué dans les régions sèches et arides de l’Océanie étaient moins aptes à survivre dans les îles tropicales humides situées au nord.
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Par Yann Contegat, le
Source: IFL Science
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