Une nouvelle étude de chercheurs européens confirme ce que les habitants vivant dans les montagnes constatent déjà : la fonte accélérée des glaciers des Alpes. Mais l’on ne savait pas à quel point. Pour les glaciologues, la situation est alarmante, les géants blancs culminant à moins de 3500 mètres auront disparu d’ici la fin du siècle, ne restant que les plus altiers comme la mer de Glace et le mont Blanc évidemment.
Fonte des glaciers
La fonte des glaciers alpins n’était pas un secret, elle avait déjà pu être constatée et être le sujet de nombreuses publications, mais cette nouvelle étude menée conjointement par des chercheurs allemands, autrichiens, français et suisses sur l’ensemble du massif Alpin de l’Autriche à la France a mis en évidence une très forte accélération ces dix dernières années, beaucoup plus importante malheureusement que les études précédentes pouvaient le prévoir.
Jusqu’à présent, les chiffres obtenus dans les précédentes études étaient obtenus à partir d’un petit nombre de mesures, qui étaient ensuite extrapolées à l’ensemble du massif. Elles étaient réalisées grâce à certains nombres de balises placées par des scientifiques ou des professionnels de la montagne. Il s’agit donc tout simplement de perches en bois plantées dans la glace, dont la hauteur de la partie dégagée permet de quantifier, au fil de la saison, la diminution du manteau neigeux. L’extrapolation nous permettait d’avoir une vision, une approche et son principe a rendu les études relativement aléatoires sur une longue distance.
Fonte des neiges
En outre, ce qui n’avait pas été véritablement étudié sur une longue échelle était la fonte des neiges en surface. Le recul des glaciers avait déjà pu être constaté depuis 1 850 à travers le monde, notamment évidemment par satellite. Mais aucune étude internationale n’avait pu étudier le phénomène et connaître l’impact du réchauffement climatique sur ces milieux environnementaux d’année en année (les données satellitaires permettent une comparaison sur cinq à dix ans).
Dans cette étude internationale qui vient d’être mise en ligne sur le site Geophysical Research Letters, le 13 février 2017, les scientifiques ont traité directement, à l’aide d’un modèle statistique, les observations in situ obtenues à partir de balises d’ablation (permettant de mesurer la fonte) implantées sur les langues glaciaires de ces glaciers. L’intérêt de l’étude était de pouvoir étudier la fonte sur divers glaciers dans différentes chaînes de montagnes.
Ils se sont penchés sur six glaciers particuliers : Sarennes et Saint-Sorlin en France, Gries et Silvretta en Suisse, Hintereisferner et Vernagtferner en Autriche. Les scientifiques ont pu évaluer l’effet du changement climatique sur des glaciers dans différents régimes climatiques.
L’impact du réchauffement climatique se confirme
Les observations ont été concluantes à tel point, qu’elles ont surpris les chercheurs. Il apparaît, d’abord, que les variations de masse annuelles, (de la fonte) des six glaciers sont concordantes d’un bout à l’autre de la chaîne alpine, malgré la distance et les différents profils : deux glaciers situés à 10 km l’un de l’autre avaient 80 % de variations communes et deux glaciers situés à 400 km l’un de l’autre avaient plus de 52 % de variations communes. Ainsi l’accélération se produit sur près de 400 km de distance.
Mais surtout cette accélération est beaucoup plus prononcée de ce que l’on pouvait s’y attendre. L’estimation des scientifiques sur la période de 2003 – 2012 s’établissait autour de 1,15 mètre de perte d’épaisseur de glace en moyenne annuelle de plus que pendant la période de référence 1962-1982, marquée par une relative stabilité, mais en réalité l’étude montre que la fonte a augmenté de 1,9 mètre de glace par an, soit une différence plus que significative. Le réchauffement climatique impacte donc beaucoup plus qu’attendu les glaciers. Une information inquiétante, d’autant que cette accélération ne semble pas s’interrompre.
Scénario catastrophe
Des milliards de milliards de végétaux et d’organismes vivants ont été piégés par la glace pendant des dizaines de milliers d’années dans le sol gelé. Ce carbone « fossile » pourrait se transformer, à l’air libre, en gaz carbonique et en méthane sous l’action de bactéries et de microbes. Ce qui n’annonce rien de bon, car nous serons en plein cercle vicieux, plus la terre se réchauffe, plus elle libère du gaz, plus sous l’effet du gaz elle se réchauffe. Enfin, pour conclure sur ce plan catastrophe, nous ne savons pas quelles bactéries ou microbes ont pu être emprisonnés dans la glace.
Comment contrer ce fléau ?
D’où des initiatives paraissant farfelus émergent de scientifiques pour faire face au réchauffement des glaciers à travers le monde. Pour les chercheurs, il est temps d’agir, le réchauffement ne pouvant être ralenti avant la disparition totale de la banquise avant la décennie 2030. Restaurer la glace marine de manière artificielle est donc impératif. Leur plan : installer des pompes alimentées par des éoliennes pour transporter de l’eau de profondeur, donc plus froide, à la surface. Celle-ci gèlerait plus vite à la surface et stopperait alors la fonte des glaces à la surface.
Assistons-nous au crépuscule des géants blancs ? Ces milieux environnementaux à l’équilibre fragile pourraient tout simplement disparaître si la débâcle climatique continue avant la fin du siècle. L’impossibilité de skier pendant les vacances de février ne sera alors pas notre principale préoccupation.
Par Nicolas Dehorter, le
Source: Le Monde
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Catégories: Actualités, Écologie