Les techniques du verre ont beaucoup évolué au fil du temps. Mais c’est au Moyen Âge que cet art a atteint son apogée. Que ce soit dans la conception ou les usages, le verre au Moyen Âge est aussi symbolique qu’utilitaire.
DES COMPOSITIONS DIFFÉRENTES
La composition du verre lui confère non seulement ses qualités de couleurs, de résistance ou de transparence, mais donne également des indications sur sa provenance. Ainsi, au début du Moyen Âge, ce sont encore les verreries antiques en provenance d’Italie et du Proche-Orient qui sont les plus présentes. Ce verre, riche en carbonate de soude d’origine marine, est très transparent et lumineux. Cependant, ses couleurs sont moins intenses.
Avec la chute de l’Empire romain d’Occident en 476, les commerces déclinent et les techniques de verrerie tombent dans l’oubli. Ainsi, à l’époque mérovingienne, les artisans verriers réutilisent des verres antiques pour leurs œuvres. On retrouve les verreries mérovingiennes dans les trésors d’églises, mais également dans les tombes.
Devant la demande croissante de verre, les maîtres verriers découvrent de nouvelles techniques à base de cendre de végétaux ; le carbonate de soude est alors remplacé par du carbonate de potasse. Le verre ainsi obtenu est plus opaque, retient mieux les colorants mais est plus sujet à l’oxydation.
Pour obtenir les couleurs, différents oxydes sont ajoutés à la pâte en fusion. L’oxyde de cuivre et le cobalt couvrent la gamme des bleus, le jaune canari s’obtient avec du sulfure de cadmium, le sélénium donne la couleur rouge mais il existe d’autres recettes. Ceux-ci s’intègrent de manière plus ou moins uniforme. Ainsi, le rouge est particulièrement difficile à homogénéiser et à fixer.
On observe différentes techniques de soufflage du verre en Europe. Là où les Allemands vont souffler des cylindres qu’ils vont ensuite découper pour les aplanir, les Français soufflent des ballons dont le fond presque plat est découpé pour être rendu plat.
L’ART DU VITRAIL
Malgré la complexité et le coût exorbitant du verre au Moyen Âge, c’est à cette époque que débute l’art du vitrail. Emblématiques de la période, les vitraux atteignent en quelques siècles une qualité technique et esthétique indiscutable.
Les premiers vitraux, relativement basiques, consistaient en un assemblage de pièces de verre découpées et assemblées à l’aide de nœuds métalliques. Rapidement, le plomb permet des jointures plus solides. Alors que les baies des églises et des cathédrales se couvrent de verreries colorées, certains ordres monastiques, comme les cisterciens, préfèrent des vitraux entièrement transparents dont les ornements sont formés par les entrelacs du plomb.
Si le vitrail est emblématique des églises, et plus particulièrement de l’art gothique, il se diffuse peu à peu dans l’architecture civile pour les petites ouvertures, généralement situées en haut des murs. Même les familles nobles les plus fortunées ne possèdent que très peu d’ouvertures extérieures fermées au moyen de vitraux.
Le verre est un produit si luxueux au Moyen Âge, qu’avant le XIIe siècle, seules les cathédrales et les abbayes les plus riches pouvaient en acquérir. Il n’était d’ailleurs pas rare que de riches corporations marchandes ou d’artisans fassent don de vitraux à leur église. A partir du XIVe siècle, les vitrages en verre se diffusent peu à peu dans la très haute noblesse.
Les vitraux sont alors généralement incolores avec seulement les bordures et le centre en couleurs. La technique du jaune d’argent permet, en appliquant de la poudre d’argent avant la re-cuisson, de dessiner des motifs jaune vif sur le verre. En France, l’on privilégie les losanges de verre, alors qu’en Italie, ce sont de petites plaquettes rondes qui ont la faveur des clients.
Dès le XVe siècle, la technique du vitrail atteint son apogée. Les couleurs sont chatoyantes, le jaune d’argent permet de faire apparaître des motifs en grattant une couche colorée, ou encore de changer simplement le bleu en vert pour plus de nuances. Il est possible, avec de la poudre d’émail, de faire des motifs de lignes ou autres directement dans la plaque de verre avant cuisson, offrant une palette élargie aux artisans verriers.
DIFFÉRENTS VERRES POUR DIFFÉRENTS USAGES
Mais le verre n’est pas seulement utilisé en vitrail, flacons, ampoules, verres à boire, vaisselle, lampes, bijoux miroirs, verres médicaux et verres optiques, les usages se multiplient. Les verres à boire, objets de luxe et de raffinement, font partie de la vaisselle d’apparat. Même dans la bourgeoisie, il est rare de posséder plus d’un verre, et il est d’usage de se faire représenter sur son portrait avec un verre de vin, signe de richesse et de raffinement. Pour les banquets, les verres sont loués. Les verres sur de longs pieds, ou encore émaillés, sont les plus recherchés.
L’Église commande également des objets en verre, pour la liturgie cette fois. Bien que très précieux de par sa fragilité, le verre n’est pas volé dans les trésors d’églises. Outre les calices, le verre transparent permet le développement des reliquaires monstrances présents dans de nombreux lieux de culte et musées. Les églises commandent également de nombreuses lampes en verre dont la lumière si particulière est propice aux lieux de culte. Le verre est également utilisé sous forme d’émaux ou de verroterie sur les reliquaires et les objets de culte.
La science est également friande de verre. Les médecins médiévaux ont besoin de verre très transparent pour l’observation des urines des patients et ainsi déterminer de quel mal ils sont atteints à partir de l’une des 21 nuances recensées. Le verre est également utilisé dans la distillation pour les décoctions médicinales. Les verres d’optique se développent vers la fin du Moyen Âge, avec l’apparition des miroirs d’études et les premières lunettes. Les miroirs d’études étaient convexes et recouverts de plomb réfléchissant. Les lunettes étant assez inconfortables, les érudits et les copistes préféraient écrire à l’aide de ces miroirs grossissants.
Ainsi, tout au long du Moyen Âge, les techniques et les usages du verre ont beaucoup évolué.