Le monde animal nous réserve encore des surprises particulièrement fascinantes. Des chercheurs ont étudié les caractéristiques d’un type de salamandre hybride, qui produit une progéniture exclusivement féminine en sélectionnant le génome de mâles venant de trois espèces différentes.
Une salamandre adepte de la parthénogenèse
Cela fait six millions d’années que ce type de salamandres, appartenant au genre Ambystoma (parmi lequel on peut notamment trouver l’ambystoma mexicanum, plus connu sous le nom d’axolotl) ne produit qu’une descendance femelle. Malgré son étrangeté apparente, c’est quelque chose qui a été observée chez beaucoup d’autres espèces de reptiles, de poissons ou d’insectes, et que l’on appelle parthénogenèse.
Dans le cas de ces reptiles, les femelles ont recours à un type de parthénogenèse différent, la gynogenèse. Si dans les deux cas, l’ovule n’est jamais fécondé par une cellule reproductrice mâle, la gynogenèse implique tout de même que l’œuf soit stimulé par la présence d’un spermatozoïde. L’acte sexuel entre femelle et mâle a donc bien lieu dans ce cas, malgré tout.
Un patrimoine génétique composé à partir de trois autres espèces
Pour mieux comprendre comment les Ambystoma hybrides ont pu se reproduire comme cela pendant autant de temps, des scientifiques de l’université de l’Iowa ont étudié le génome de cette salamandre. Ce qu’ils ont découvert est que celle-ci sélectionne à parts égales les gènes de trois autres mâles d’espèces d’ambystoma (Ambystoma laterale, Ambystoma texanum, et Ambystoma tigrinum) pour composer son profil génétique. Ce phénomène de vol de génome de donneurs mâles à des fins de reproduction a d’ailleurs un nom, la « kleptogenèse » .
En étudiant plus de 3000 gènes d’une salamandre femelle de type ambystoma, les chercheurs ont déterminé qu’environ 72 % du patrimoine génétique de celle-ci était composé de gènes empruntés aux trois autres espèces. Ils ont également déterminé que ces trois différents patrimoines étaient représentés à part égale parmi les 72 %.
Un équilibre crucial pour prospérer
Ceux-ci pensent désormais que ce comportement reproductif de l’ambystoma, qui mélange le génome d’espèces similaires, explique comment la lignée exclusivement femelle a pu perdurer si longtemps.
Maurine Neiman, professeur associé en biologie à l’université de l’Iowa et co-auteur de la publication, explique : « Nous supposons que les individus prospères ont équilibré leur expression génétique. Cet équilibre pourrait avoir été un pré-requis pour l’émergence et la prospérité de la lignée de cet hybride en particulier. »
Les scientifiques responsables de l’étude comparent cet équilibre des gènes au fait d’avoir une équipe sportive composée de joueurs aux compétences égales. Ainsi, dans une équipe mal équilibrée, si le seul très bon joueur se retrouvait blessé et incapable de continuer la partie, l’équipe perdrait. Dans le cas de la salamandre, ils théorisent sur le fait que si les reptiles ont un code génétique mal équilibré et que la section d’ADN principale se retrouve endommagée, sa constitution pourrait en pâtir. Assimiler un nombre équilibré de gènes de chaque espèces serait une façon de limiter les pertes.
Reste désormais pour les chercheurs à savoir comment cette sélection génétique se déroule, comme l’explique Kyle McElroy, étudiant diplômé du laboratoire dirigé par Maurine Neiman : « Ce que nous aimerions découvrir est comment la sélection et l’utilisation [du génome] se produit, et comment ces gènes provenant de différentes espèces de salamandres s’allient pour donner un hybride réussi. »
Par Corentin Vilsalmon, le
Source: IFL Science
Étiquettes: parthenogenese, genome, hybride, progeniture, ambystoma, salamandre
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