Une mystérieuse planète orbite-t-elle aux confins de notre système solaire ? Jamais observée jusqu’à présent, seules des anomalies détectées dans son environnement nous permettent de supposer son existence. Une récente étude nous éclaire sur les caractéristiques de celle qui pourrait bien être une nouvelle planète de notre système solaire.

À la recherche de la dernière planète

Aux confins de notre système solaire, par delà Neptune, la huitième planète, se trouve la ceinture de Kuiper : cette zone, souvent comparée à la ceinture d’astéroïde, est cependant bien plus massive et étendue que celle-ci. Située dans une région comprise entre 30 et 50 UA (une « unité astronomique » correspond à la distance Terre-Soleil), elle est composée de petits corps célestes, et d’objets plus gros, les planètes naines dont la plus connue est Pluton.

Sa structure et son origine restent encore assez méconnues. Mais des anomalies dans les trajectoires orbitales de ces petits objets lointains ont été constatées. Différentes théories ont été émises pour les expliquer, et l’on suppose que seul un objet bien plus massif, une nouvelle planète, aurait la capacité de perturber par son champs gravitationnel leurs déplacements. Seul problème : cette planète n’a jamais pu être observée.

Vue d’artiste de la Neuvième planète

Des anomalies gravitationnelles

La plupart des débris qui constituent la ceinture de Kuiper orbitent autour du soleil sur un plan bien connu, le plan de Laplace, c’est-à-dire le plan moyen de déplacement des corps célestes autour du soleil. Leur précession, c’est-à-dire l’orientation de leur axe de rotation sur eux-mêmes, qui définit une certaine inclinaison, est par conséquent conforme aux prévisions. Ces objets gravitent donc autour du soleil avec une précession et une trajectoire normale. Jusque-là tout va bien.

Mais en observant les corps les plus lointains de la ceinture de Kuiper, Kat Volk et Renu Malhotra, chercheurs à Laboratoire planétaire et lunaire de l’université de l’Arizona (LPL), constatent une déviance dans leur précession, ce qui les fait dévier du plan de Laplace de près de 8 degrés. Les 600 objets observés dans leur étude publiée dans l’Astronomical Journal sont orientés différemment. Or ceux-ci, en moyennes devraient pointer plus ou moins vers le plan de Laplace de manière perpendiculaire. Le nombre d’objets est en outre suffisant pour réduire le risque de hasard statistique à 1 ou 2 %.

Vue d’artiste de la Ceinture de Kuiper

Des théories concurrentes

L’explication la plus plausible est donc, on l’a dit, la présence d’un corps bien plus massif dans les environs, capable de perturber l’attraction de notre étoile. D’après leurs calculs, la masse de cette planète invisible serait comprise entre celle de Mars et de la Terre. Pour exercer son influence sur ces petits cailloux, elle devrait être située à moins de 100 unités astronomique d’eux. Une dernière possibilité à été écartée par les chercheurs, celle du passage d’une autre étoile dans les environs il y a moins de 10 millions d’années (un temps très court en astronomie). En effet, en frôlant notre système solaire à moins de 100 UA, elle aurait pu affecter la précession des objets de la ceinture de Kuiper.  » Nous considérons ce scénario comme improbable « , explique donc Malhotra.

Cette théorie fait écho à une hypothèse émise en janvier 2016 par des scientifiques du California Institute of Technology. Les perturbations de la ceinture de Kuiper ayant été observée dès 2014, leurs simulations les avaient conduits eux aussi à supposer l’existence d’une Neuvième planète. Mais pour eux, elle aurait des caractéristiques bien différentes : d’une part, elle serait beaucoup plus massive (avec un diamètre d’environ 3,7 fois celui de la Terre), ce qui la rapprocherait des géantes gazeuses. D’autre part, elle serait située bien plus loin de la ceinture, à peut être 500, voir 1000 UA de celle-ci. Par conséquent, cette géante gazeuse très éloignée mettrait près de 20000 ans à faire le tour du soleil. Mais pour Volk,  » c’est trop loin pour influencer les objets de la ceinture de Kuiper. Elle doit être à moins de 100 UA pour les affecter à se point « . Ces deux théories ne s’opposent d’ailleurs pas nécessairement, mais les variations observées récemment ne sont pas le fait de la Neuvième planète. Cette fameuse Neuvième planète, comme l’avait nommée les scientifiques, serait donc la dixième !

L’orbite supposé de la 9e planète selon le California Institute of Technology

 

Une région proche mais toujours mystérieuse

L’existence de ces planètes n’ont été déduites qu’indirectement, par leurs effets gravitationnels. Mais pourquoi n’ont-elles jamais été observées avant ? D’abord, parce que nous n’avons pas regardé dans la bonne direction. En effet, la zone à observer se trouve dans la direction de la Voie lactée. La concentration d’étoiles et de lumière y est telle que les recherches concernant le système solaire lui-même ont tendance à l’éviter. Une planète de la taille et de la brillance telle que figurée dans l’étude aurait des chances non négligeables d’échapper à la vigilance des observateurs.  » Environ 30 % « , estime Volk.

Enfin, bien que plus proche que les confins de l’univers désormais scrutés par les télescopes modernes, la région d’au delà de la ceinture reste relativement éloignée. Aucune mission d’exploration n’est ainsi prévue, et le projet d’envoi d’une sonde si loin engagerait les scientifiques pour plusieurs décennies. En outre, la ceinture de Kuiper elle-même reste peu étudiée (surtout comparée à sa cousine située entre Mars et Jupiter).

L’essentiel des très nombreux corps qui la composent sont méconnus à l’image de Pluton, longtemps considérée comme un planète avant d’être rétrogradée en planète naine en 2006. Les chercheurs comptent donc sur la prochaine mise en service du LSST (Large synoptic survey telescope, ou grand télescope de recherche synoptique en français), pour remédier à ce manque d’information. Pour Malhotra ce bijou technologique dont l’entrée en service est prévue pour 2020 devrait « porter le nombre d’objets de la ceinture de Kuiper observés de 2000 à 40000″. Une véritable mine d’information.

Le Large Synoptic Survey Telescope
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