Et si investir dans les communautés autochtones était le meilleur moyen de protéger les forêts ? C’est en tout cas ce que suggère un rapport publié par la Rights and Resources Initiative et co-signé par Victoria Tauli-Corpuz, rapporteuse spéciale aux Nations Unies sur les droits autochtones. Le DGS vous en dit plus. 

Les peuples autochtones comme moyen le plus efficace pour protéger les forêts

Il s’agit d’un nouveau rapport qui confirme encore que les populations autochtones sont les meilleures protecteurs des forêts. L’étude a été publiée par la Rights and Resources Initiative (RRI), une ONG internationale basée à Washington et par la rapporteuse spéciale aux Nations Unies sur les droits autochtones.

Le rapport co-signé par Victoria Tauli-Corpuz, Janis Alcorn, Augusta Molnar explique que « [les peuples autochtones] obtiennent des résultats de conservation au moins égaux avec une fraction du budget des aires protégées, faisant de l’investissement dans les peuples autochtones eux-mêmes le moyen le plus efficace pour protéger les forêts ».

Le rapport compare les résultats de la conservation dans les terres contrôlées par des peuples autochtones à ceux des zones protégées gérées par le gouvernement, dans 28 pays différents.

« Cette recherche montre que les peuples autochtones et les communautés locales investissent substantiellement dans la conservation de leurs forêts – jusqu’à 1,71 milliard de dollars », expliquent les auteurs. Cela représente entre 16 et 23 % de ce que les gouvernements, organisations multilatérales, agences d’aide bilatérale, ONG, fondations et établissements privées dépensent chaque année. En somme, les peuples autochtones dépensent moins d’argent pour des résultats égaux voire meilleurs dans la protection des forêts et la réduction de la perte de biodiversité.

Victoria Tauli-Corpuz

Ainsi, on constate moitié moins de déforestation dans les terres autochtones que dans les aires protégées par le gouvernement. Sur les terres gérées officiellement par les populations autochtones, reconnues comme ayant des droits fonciers, le taux de déforestation était encore moins élevé. Par exemple, sur les terres autochtones d’Amazonie brésilienne, on constate une déforestation inférieure à 1 % entre 2000 et 2012 contre 7 % dans le reste du pays.

Les droits fonciers des populations autochtones ne sont cependant que très rarement reconnus. Ils ne sont reconnus que sur 10 % de la superficie totale qu’ils occupent dans le monde, selon une étude de la Rights and Resources Initiative.

 

Des populations autochtones souvent méprisées par les gouvernements

« Les gouvernements et les ONG considèrent souvent que les peuples autochtones sont inférieurs, comme peuples qui ne savent pas ce qu’ils font [protéger les forêts]» explique Victoria Tauli-Corpuz. « Donc, même quand ils voient les preuves, ils ne sont toujours pas très actifs dans l’attribution de reconnaissance ou en invitant les communautés autochtones à participer activement aux initiatives ».

« Cette recherche sur la conservation souligne le coût de l’ignorance des communautés et de leurs immenses contributions à la conservation » précise Alain Frechette, directeur de l’analyse stratégique à la Rights and Resources Initiative. « Les investissements dans la protection des forêts seraient plus efficaces et plus justes s’ils étaient alloués aux personnes qui ont maintenu les forêts debout jusqu’à présent. » En somme, la marginalisation des peuples autochtones est un frein et une erreur incroyable pour la conservation des forêts. Ils sont en effet, les personnes les mieux placées, puisque dépendants totalement de la forêt, pour la conserver.

Pourtant, aujourd’hui les peuples sont encore chassés de leurs terres pour soi-disant préserver au mieux les forêts, c’est ce que l’on appelle la « conservation-forteresse ». Ce type de conservation est radical faisant de ces zones forestières des aires protégées débarrassées des populations autochtones. Une étude réalisée sur 25 ans entre 1990 et 2014 a révélé que plus de 250 000 personnes dans 15 pays différents avaient été expulsées de leurs terres pour cette raison.

Cependant, ce que semble négliger les adeptes de ce type de conservation, c’est que «les zones protégées étaient déjà protégées par les communautés qui vivaient et conservaient ces terres depuis des générations», précise Rukka Sombolinggi, secrétaire général de l’AMAN, principal groupe de défense des droits des peuples autochtones en Indonésie.

Il est donc grand temps d’écouter les populations autochtones qui savent mieux que personne conserver leurs forêts. Comme le rappelle Victoria Tauli-Corpuz, «Nous devons veiller à ce que les ressources commencent à être versées aux populations autochtones elles-mêmes… qu’elles soient données aux communautés afin que leurs moyens de conservation et de protection puissent être acceptés et renforcés».

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