Le Président américain Donald Trump n’a pas encore nommé sa future ambassadrice des droits des femmes, mais tout porte à croire que son choix se portera sur la sulfureuse Penny Nance. Avec cette nostalgique de l’Amérique régressive aux manettes de la cause féminine, Trump enterre définitivement tout espoir de progrès.

Un beau spécimen

Parmi les différentes candidates au poste d’ambassadrice des droits des femmes, le site internet Politico avance un nom en particulier : Penny Nance. Épouse de Will Nance et mère de deux enfants, cette figure emblématique de la lutte antiféministe est l’archétype même de la jolie housewife WASP. Derrière son sourire Colgate éclatant et son impeccable brushing, Penny Nance demeure un jaguar en embuscade prête à bondir sur quiconque promeut un excès de tolérance que (son) Dieu n’approuverait pas : les homosexuels, les transsexuels, le mariage gay, le droit à l’avortement, le sexe hors mariage et l’égalité homme-femme ne sont que la partie émergée de l’iceberg.

Le « Planned parenthood », le planning familial américain, a d’ores et déjà fustigé ce – futur – choix par l’intermédiaire de son vice-président Dawn Laguens. Pour lui, cette nomination « reviendrait à mettre un pyromane à la tête d’une caserne de pompier. » Vous imaginez Dieudonné en boss de SOS Racisme ou Éric Zemmour au Ministère de l’Égalité entre les femmes et les hommes ? C’est du même ordre. La décision de Trump est d’autant plus incompréhensible que l’association présidée par Penny Nance, la Concerned Women for America – comprenez les « femmes inquiètes pour l’Amérique » – a qualifié le Bureau des Droits des femmes d’« idée futile et superflue. »

Penny V. Disney

Pour peu que vous ne viviez pas reclus en ermite dans la touffeur de la forêt équatoriale, vous aurez remarqué que les grands studios Hollywoodiens ont – peu ou prou – rejeté le modèle archaïque du mâle alpha dégoulinant de sueur en guise de personnage principal, pour lui préférer une femme toute aussi forte et moins odorante. Depuis l’arrivée de Hunger Games, il est devenu monnaie courante d’avoir une femme en tête d’affiche : Mad Max Fury Road, Star Wars le Réveil de la Force et Rogue One sont des succès critiques et commerciaux qui promeuvent des femmes fortes, résilientes, et maîtresses de leur destin. Dieu merci, il n’a pas fallu attendre 2017 pour que des réalisateurs visionnaires donnent leur juste place aux femmes : Ridley Scott (Ripley dans Alien), James Cameron (Sarah Connor dans Terminator 2) et Tarantino (Black Mamba dans Kill Bill) avaient déjà pavé le chemin. Aujourd’hui plus que jamais, la femme est l’égale de l’homme à l’écran. Et ça ne plaît pas DU TOUT à Penny Nance

« Disney et Hollywood plus généralement ont souvent véhiculé le message que les hommes étaient superflus, stupides, des obstacles à surmonter, et que leur seule contribution à la famille se résumait à leur salaire. »

En bonne conservatrice, Nance est hostile à tout ce qui menace, de près ou de loin, la sacrosainte masculinité. Invitée sur la chaîne d’informations républicaine Fox News – dont les No-Go zones resteront à jamais ancrées dans les mémoires – à l’occasion de la sortie de La Reine des Neiges, la présidente de la WCA a mené une hallucinante diatribe contre le dernier Disney qui, selon elle, porterait atteinte à l’intégrité masculine et à la virilité… Rien que ça ! S’il y a bien une chose que les studios Disney nous ont appris avec leurs premiers films, c’est que les femmes n’existent qu’à travers les hommes : Blanche-Neige, Cendrillon, La Belle au bois dormant… Autant de princesses qui auraient fini souillon – ou pire – si le prince charmant n’avait pas daigné se pointer. L’évolution des moeurs ayant parsemé les 80 années qui nous séparent de Blanche-Neige, il est normal qu’en 2017, les femmes aient enfin le droit décider de leur avenir, à mille lieux de l’archétypal « Ils vécurent heureux et eurent beaucoup d’enfants » ; n’en déplaise à la future ambassadrice du droit des femmes.

L’IVG ? Un génocide plus meurtrier que la Shoah

Le 9 juillet 2013, Penny Nance signe un éditorial glaçant sur sa vision de l’IVG dans les colonnes du Christian Post. En introduisant son propos par la fête nationale, qui se déroule chaque 4 Juillet, et qui célèbre la signature de la Déclaration d’Indépendance, elle refuse la citoyenneté américaine aux pro-avortements. Ces activistes féministes ne respecteraient pas suffisamment les principes fondateurs des États-Unis, notamment le droit à la vie et la poursuite du bonheur. Qu’une femme foncièrement anti-IVG soit chargée de faire respecter les droits des femmes est déjà profondément choquant en soi; mais que l’avenir des femmes américaines repose entre les seules mains d’une anti-féministe en croisade contre tout ce qui n’est pas blanc, hétéro, protestant et marié, ça, c’est révoltant.

« Dans une famille, il est important d’avoir un papa et une maman, les hommes sont essentiels à notre société. […] Nous voulons encourager la masculinité, pas la diaboliser. Nous sommes la CWA et nous aimons les hommes, les vrais. »

Si Penny Nance est déjà sincèrement antipathique sur écran, elle parvient à relever un peu plus le niveau lorsqu’elle prend la plume. Dans cette fameuse tribune anti-IVG, la présidente des CWA n’a pas attendu les 1500 signes pour atteindre le point Godwin : « Pas moins de 1,5 millions d’enfants juifs ont été tués lors du génocide nazi. Ce qui est honteux, c’est que l’Amérique a depuis longtemps dépassé ce nombre […] au prix d’un cruel génocide. » Oui, vous avez bien lu : une femme politique américaine compare les interventions volontaires de grossesse avec la barbarie Nazie. Elle compare le massacre industriel d’une population toute entière avec des interventions médicales. Elle compare une des périodes les plus sombres de notre Histoire qui a vu la disparition de 60 millions de personnes, à des IVG. C’est du même niveau que Sean Spicer disant qu’Hitler lui-même n’avait pas été assez inhumain pour recourir au gaz chimique – eh oui, l’administration Trump adore citer la IIe Guerre Mondiale. Elle apprécie tellement le passé qu’elle a déjà dans ses cartons les mesures pour y retourner : interdiction de l’IVG, interdiction du mariage gay… Un programme digne des plus grands nostalgiques des années Blanche-Neige !

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