Un homme a été opéré du coeur… sans anesthésie ! Le « prodige » médical a pu être réalisé grâce à une méthode vieille comme le monde : l’hypnose. 

 

Les seniors face aux risques de l’anesthésie

Gérard Courtois a 88 ans et doit se faire opérer du coeur au CHU de Lille. Il s’agit de remplacer l’une de ses valves aortiques. Pour cela, l’acte chirurgical consiste à pratiquer une incision dans chacune de ses artères fémorales, et d’y faire passer deux fils remontant tout son corps jusqu’au cœur ! Cette opération, particulièrement lourde, est couramment pratiquée depuis le début des années 2000. Mais elle se réalise normalement sous anesthésie générale.

Or l’anesthésie générale, on l’oublie souvent tant elle permet de grandes réussites, peut être dangereuse : troubles de la mémoire, risques cardiaques et respiratoires, réveil difficile, désorientation, nausées et vomissements… la liste des effets indésirables est longue et dépend beaucoup de la fragilité ou nom du patient. Or, Gérard Courtois a tout de même 88 ans.

 

L’hypnose, un recours ?

Afin d’éviter ces risques et inconforts, l’équipe médicale de Lille a choisi de remplacer l’usage d’anxiolytiques et de morphine par… l’hypnose ! Quand on suggère cette idée au patient, il n’est pas très « chaud » (le mot est de lui). C’est la visite d’une infirmière, Hélène Sergent, qui finalement va le convaincre. Formée à cette méthode, elle raconte au micro de France Bleu la suite de cette démarche :  » Je suis allée le voir la veille. Nous avons discuté de son environnement, de ses passions, ce qui m’a permis de l’amener dans un monde qu’il aimait « . Le but : mieux connaître l’intimité du patient afin de mieux le détendre durant l’opération.

Longtemps décriée, cette méthode a le vent en poupe. Loin d’être une quelconque charlatanerie, l’hypnose est un état mental dont notre cerveau a l’habitude. Cet « état de conscience particulier, entre la veille et le sommeil, provoqué par la suggestion » (définition du Larousse) est voisin de la sensation ressentie lorsqu’on laisse son esprit vagabonder lors d’un voyage en train, par exemple. « Ça peut être radical comme ça peut échouer », résume Jean-Marc Benhaiem, médecin hypnothérapeute et responsable du diplôme d’hypnose médicale à la Pitié Salpêtrière interrogé par Europe 1.

 

Une branche de la médecine en plein boom

A la différence de l’infaillibilité chimique des produits sédatifs, le succès de l’hypnose dépend de l’état du patient, de son état de conscience et de sa sensibilité. Dans le cas de Gérard Courtois, tout s’est passé à merveille : « on oublie totalement ce qu’il se passe, on est transféré ailleurs », confie-t-il à France Bleu. Un récit corroboré par le chirurgien en charge de l’opération, Arnaud Sudre : « [il] a parlé de ses voyages avec son épouse. […] Pendant l’opération, le patient s’est même mis à ronfler, preuve qu’il était parti très loin ».

En cas de problème, l’équipe se tenait prête à injecter à tout moment les produits anesthésiques habituels (une précaution nécessaire dans seulement 1 % de cas). Si cette réussite est une première au CHU de Lille, la pratique devrait faire tâche d’huile : 4 infirmières supplémentaires y seront formées à l’hypnose. Un peu partout, la méthode se propage, aux côtés de « l’hypnosédation » (qui mélange manipulation mentale et sédatifs plus légers que lors d’une anesthésie générale). Patients, mais aussi praticiens, longtemps réticents, se laissent peu à peu convaincre. A terme, l’hypnose pourrait être utilisée dans la plupart des opérations chirurgicales dites « de surface ». Si l’hypnose ne résout pas tout, elle permet de se passer de traitements lourds, et surtout de calmer l’anxiété de certains patients, qui se sentent enfin acteur de leurs soins. Un petit pas pour la chirurgie, mais un grand pas pour le confort de nombreux malades !

 

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