Des chercheurs de l’Université de Washington ont réalisé l’impossible en créant des objets imprimés en 3D capables de se connecter au réseau Wi-Fi et d’interagir avec d’autres appareils connectés sans technologie embarquée ! 

 

Tout est question d’engrenages

Les chercheurs de l’école d’ingénierie Paul G. Allen, rattachée à l’Université de Washington, sont parvenus à créer des objets connectés sans recourir au moindre composant électronique. Ces créations 100 % plastique obtenues via une imprimante 3D sont capables de collecter des données et de communiquer avec d’autres objets connectés. Le système, calé sur la mécanique des montres automatiques, a été présenté dans un article lors du séminaire de l’infographie américain Conference and Exhibition on Computer Graphics and Interactive Techniques in Asia.

« Mais notre plus gros défi, c’était de trouver comment faire interagir le plastique avec le Wi-Fi. C’était quelque chose que personne n’avait réussi à faire. »

 

Vikram Iyer, co-auteur de l’article.

Pour que les objets imprimés en 3D puissent communiquer avec les bornes Wi-Fi, l’équipe a utilisé les techniques de rétrodiffusion qui permettent aux appareils d’échanger des informations entre eux. Jusque-là dépendante des composants électroniques, les scientifiques sont parvenus à réhabiliter la rétrodiffusion via un mouvement mécanique initié par une ingénieuse combinaison de ressorts, d’engrenages, et d’interrupteurs tous le résultats d’impressions 3D. Une technique empruntée aux montres dépourvues de batterie capables de donner l’heure en continu.

La clé, c’est le mouvement

Le coeur du mécanisme repose sur l’interrupteur au centre de l’image, attaché au ressort en spirale – ou ressort hélicoïdale pour les puristes. Lorsqu’il est activé, l’engrenage en plastique bute contre le ressort qui actionne l’interrupteur ; celui-ci entre alors en contact avec une antenne elle aussi imprimée en 3D (la languette marron) élaborée à partir d’un filament conducteur composé de plastique et de cuivre. Cette antenne est nécessaire au système de rétrodiffusion pour transmettre des données en réfléchissant les signaux radios émis par le router Wi-Fi.

« Notre but [était] de créer quelque chose qui sort de votre imprimante 3D à la maison pouvant envoyer des informations utiles à d’autres appareils. »

 

Vikram Iyer, co-auteur de l’article.

Toute l’ingéniosité de ce procédé repose sur le mouvement : appuyer sur un bouton, faire glisser son doigt sur un écran, tourner une poignée… La moindre de ces actions déclenche les engrenages et les ressorts dans l’objet 3D qui aboutissent à l’activation de l’interrupteur. Les informations, émises sous la forme de 0 et de 1, sont encodées par la présence – ou l’absence – de dent sur l’engrenage. C’est l’énergie produite depuis le ressort qui conduit le système d’engrenages, et ce sont la largeur et le motif des dents qui contrôlent combien de temps l’interrupteur de rétrodiffusion établira le contact avec l’antenne. Les motifs de signaux réfléchissant peuvent alors être décodés par une borne Wi-Fi.

Des applications multiples

C’est donc tout naturellement que l’équipe de la Paul G. Allen School a imprimé des widgets en 3D, comme des boutons ou des poignées personnalisables, pouvant communiquer avec vos autres appareils connectés : ordinateur, télévision, tablette… Pour peu que vous ayez une imprimante 3D avec les bons filaments, vous pourriez vous fabriquer des « télécommandes » depuis votre fauteuil ! « Ça a l’air d’un objet 3D basique, mais il contient des informations invisibles que votre smartphone peut lire », précise Justin Chan, co-auteur de l’article.

Parmi les nombreuses applications de cette nouvelle technologie, il en est une qui sort du lot : la commande internet. Shyam Gollakota, professeur associé à la Allan School nous explique : « Quand vous versez du liquide lessive par exemple, la vitesse à laquelle les engrenages tournent vous informe de la quantité utilisée. L’interaction entre l’interrupteur de l’objet imprimé en 3D et l’antenne sans fil transmet alors les données. ». Décryptées par la borne Wi-Fi, ces informations rapportent le niveau de liquide lessive restant dans la bouteille. En-dessous d’un certain niveau, le mécanisme contenu dans le goulot pourrait immédiatement commander une autre bouteille via Amazon où n’importe quel site dédié à la vente en ligne.

Et puisque le stratagème repose uniquement sur la notion de mouvement, le capteur ne risque pas de commander une autre bouteille en cas de fuite : vous devrez au préalable faire fonctionner le moulin avant de provoquer un hypothétique achat ! Soucieux d’améliorer leur mécanisme, les scientifiques ont imprimé plusieurs objets en 3D obéissant aux mêmes règles que le goulot ci-dessus, capables de capter et d’envoyer diverses informations à d’autres objets connectés : une éolienne, un débitmètre, une balance, et un tube à essai destiné à affiner au millilitre près la quantité de liquide contenue dans les tubes en laboratoires.

Mais ce n’est pas tout. les chercheurs ont aussi découvert qu’en changeant de filament d’impression 3D, un plastique – fer au lieu du plastique – cuivre, ils pouvaient utiliser les propriétés magnétiques pour virtuellement coder des informations statistiques dans les objets 3D ! Une nouveauté qui peut aussi bien servir à l’identification de code-barre qu’à la création d’un manuel d’utilisation adressé aux robots sur la manière dont ils doivent interagir avec l’objet qu’ils manipulent. Une découverte qui redore le blason quelque peu terni du plastique…

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