De plus en plus de scientifiques suggèrent que nous vivons actuellement une ère nouvelle appelée Anthropocène dans laquelle les activités humaines seraient directement responsables de l’évolution de la Terre. Une équipe de chercheurs vient de révéler qu’une explosion de nouvelles variétés de minéraux est apparue au cours des 250 dernières années, démontrant que l’humanité vit bien dans l’ère de l’Anthropocène qu’elle a elle-même déclenchée.


La période de la Grande Oxydation

Il y a 2,3 milliards d’années, la Grande Oxydation a doublé les types de minéraux présents à la surface de la Terre, de 2000 variétés, ils sont passés à 4000. Si cet événement a engendré les 2/3 des 5208 minéraux présents à la surface de la Terre, les scientifiques du Carnegie Institution for Science considèrent que cette explosion de minéraux reste minime face à la multiplication des variétés de minéraux qui a eu lieu au cours des derniers siècles.

 

Un nombre record de nouveaux minéraux sur une courte période

D’après une étude publiée le mercredi 1er mars dans la revue American Mineralogist, l’homme serait responsable de l’apparition de 208 nouveaux minéraux depuis la Révolution industrielle, ce qui représente 4 % des 5208 minéraux figurant sur la liste officielle de l’international Mineralogical Association (IMA).

D’après Robert Hazen et son équipe, ce pic de nouvelles variétés de minéraux s’est fait sur un temps extrêmement court (entre 200 et 250 ans), comparé à l’histoire de la Terre qui s’est formée il y a 4,5 milliards d’années. Cette diversification des minéraux surpasse de loin celle de la Grande Oxydation qui était pourtant reconnue comme ayant déclenché la plus grande augmentation de minéraux de l’histoire. En effet, la rapidité avec laquelle se sont multipliés les types de minéraux n’est pas comparable avec le temps de la Grande Oxydation qui a permis aux minéraux de développer à très long terme.

Hazen relativise ainsi l’impact de la Grande Oxydation face à l’explosion que nous connaissons depuis le milieu du XVIIIe siècle.

« Imaginer 250 ans par rapport à 2 milliards d’années, c’est la différence entre un clin d’oeil et…. un mois ! »

La Chalconatronite

 

Des minéraux générés par l’activité humaine

Après avoir étudié les 5208 minéraux reconnus par l’IMA, les scientifiques ont découvert que 208 nouveaux minéraux étaient directement liés aux activités humaines. Les scientifiques ne tiennent compte que des minéraux indirectement provoqués par les activités humaines et non des minéraux synthétisés par les hommes car pour l’IMA un vrai minéral doit résulter d’un procédé naturel.

Parmi ces minéraux, on retrouve la chalconatronite, un minéral de cuivre doté d’une croûte de cristal bleu, l’andersonite, un minéral fait d’uranium qui diffuse une lueur fluorescente verte ou jaune, ou encore l’abhurite toute nuancée de bronze, issue de la réaction chimique entre l’eau salée et l’épave du SS Cheerful qui a coulé en 1885 au large de l’Angleterre.

La plupart des nouveaux minéraux sont nés grâce à l’exploitation minière, parmi les lieux qui ont favorisé leur développement on peut citer les fonderies et les systèmes de tuyauterie géothermiques. D’après les scientifiques, de nombreux minéraux pourraient apparaître dans les déchets du monde moderne envahi par la technologie. Ainsi les vieilles batteries, les appareils électriques, les vieilles puces de silicium, les téléviseurs, une fois exposés à des conditions particulières d’hydratation ou d’oxydation, pourraient favoriser le développement de nouveaux types de minéraux.

L’Andersonite

 

L’entrée dans l’ère de l’Anthropocène

Si l’Anthropocène n’a pas été officiellement reconnue par la communauté scientifique, nombreux sont les chercheurs qui soutiennent que cette ère existe et qu’elle doit faire l’objet d’une définition concrète afin de souligner l’impact des activités humaines sur la Terre.

Certains scientifiques suggèrent que c’est la fin des années 1950 qui marque l’entrée dans l’Anthropocène avec le début du nucléaire. Pour d’autres, elle serait bien antérieure et résulterait de la baisse des niveaux de CO2 causée par l’arrivée des Européens aux Amériques.

Les chercheurs Paul Crutzen et Eugene Stoermer expliquent qu’à partir des années 2000, les conséquences des activités humaines sur l’atmosphère, les océans, et la biodiversité en général sont telles qu’il faut considérer que la Terre est entrée dans une nouvelle ère qu’ils décidèrent de nommer Anthropocène.

Pour les chercheurs Owen Gaffney de l’Université de Stockholm et Will Steffen de l’Université nationale australienne, l’évolution du système terrestre est presque exclusivement liée à l’activité humaine alors qu’elle dépendait autrefois des phénomènes naturels.

 

L’explosion minérale comme preuve ultime de l’Anthropocène

L’Anthropocène semble se manifester dans l’évolution des strates rocheuses de la Terre qui délimitent ses grandes phases géologiques. Hazen suggère que la diversification des minéraux constitue une ultime preuve de l’Anthropocène.

« Je pense que c’est le facteur le plus important pour décider si oui ou non l’Anthropocène doit être considérée comme une nouvelle période géologique »

L’ équipe voudrait désormais que la Commission internationale de stratigraphie examine le phénomène de diversification des minéraux afin qu’elle se prononce sur l’existence de l’Anthropocène comme ère marquante pour l’histoire de la Terre

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