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« La forêt pense autrement » : des recherches montrent que les champignons coopèrent, adaptent et innovent

Et si l’intelligence ne résidait pas uniquement dans un cerveau ? Sous nos pieds, un monde invisible fourmille d’activités, de connexions et de stratégies. Les champignons, ces étranges organismes mi-végétaux mi-animaux, révèlent une forme d’intelligence radicalement différente de la nôtre.

Un champignon Galerina marginata sur une souche givrée, au cœur d’une forêt en hiver
La Galerina marginata, ici photographiée dans une forêt en plein hiver, est une espèce capable de pousser sur du bois mort, même dans des conditions de gel. Un exemple d’adaptation du vivant face au froid.

Le mycélium : un réseau électrique souterrain aux allures de cerveau végétal

Quand on parle de champignons, on pense d’abord au chapeau, parfois vénéneux, souvent savoureux. Mais c’est sous terre que tout se joue. Le mycélium, ce réseau de filaments qui constitue la majeure partie de l’organisme fongique, peut s’étendre sur plusieurs kilomètres carrés.

Il ressemble, de façon troublante, à un système nerveux : même structure ramifiée que les neurones, courants électriques, et même gaine isolante autour des filaments que celle de nos axones.

De plus, certaines espèces, comme le pleurote, réagissent à des stimuli extérieurs (nourriture, hormones humaines comme le cortisol). Le signal électrique change, s’adapte, réagit. Une preuve qu’il y a perception et traitement de l’information, deux clés de ce que nous appelons habituellement intelligence.

Et ce n’est pas de la science-fiction : à l’université de Cornell, des chercheurs ont utilisé un réseau mycélien comme interface entre un robot et un ordinateur. Le champignon devenait messager, traducteur, capteur. Bluffant.

Comment les champignons organisent leur expansion avec une précision de stratège

Dans la forêt, le champignon n’explore pas au hasard. Pour le prouver, au Japon, des chercheurs ont mené une expérience : ils ont disposé des blocs de bois infestés de spores selon deux configurations : en croix et en cercle.

En croix, le mycélium connecte fortement les blocs périphériques, les transformant en postes avancés d’exploration. En cercle, il délaisse le centre, jugé probablement inutile.

Ainsi, ce comportement s’apparente à une optimisation spatiale et une gestion des ressources. Pas de hasard ici, mais des décisions adaptées au contexte. Autrement dit, ce n’est pas une simple croissance aléatoire, mais une tactique.

Une symbiose intelligente : comment les champignons optimisent les échanges avec les plantes

Encore plus fascinant : la coopération entre champignons et plantes. Grâce à un système d’échanges de nutriments via le mycélium, les champignons adaptent leurs routes d’approvisionnement. Ils peuvent réduire un trajet, en créer un autre, accélérer ou ralentir les transferts.

En d’autres termes, imaginez un réseau autoroutier vivant, qui ajuste en temps réel ses connexions en fonction des besoins. Ces « autoroutes fongiques » montrent que le champignon sait réagir à l’autre et ajuster son comportement. En termes biologiques, c’est une intelligence collective adaptative et distribuée.

Et si l’intelligence, ce n’était pas (que) le cerveau ? Réflexions autour du génie fongique

Alors faut-il un cerveau pour être intelligent ? Pas si sûr. Les champignons ne raisonnent pas, mais ils perçoiventtraitentadaptentcoopèrent, et parfois, innovent. Leur mode d’existence décentralisé remet en question notre modèle d’intelligence centré sur l’individu et le cortex.

Finalement, ce que la forêt nous murmure à travers ces filaments silencieux, c’est qu’il existe d’autres manières de comprendre, d’évaluer, d’agir. Et si l’intelligence, ce n’était pas seulement penser… mais ressentir, s’adapter, tisser des liens avec son environnement ?

Par Eric Rafidiarimanana, le

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