Le fossile de Robsonomyia henningseni, un moucheron prédateur ancien et encore jamais analysé, vient d’être mis au jour, suscitant l’enthousiasme des chercheurs. Selon l’équipe scientifique à l’origine de cette découverte, cet insecte préhistorique pourrait représenter le chaînon manquant entre deux espèces de moucherons actuelles, l’une vivant au Japon et l’autre aux États-Unis, séparées par une vaste étendue océanique de près de 8 000 kilomètres. L’étude est publiée dans la revue Scientific Reports.
Une découverte qui questionne la répartition géographique
L’équipe de chercheurs, dirigée par Alicja Pełczyńska, doctorante à l’université de Łódź et à l’université de Copenhague, a été confrontée à une énigme : comment des espèces aussi similaires peuvent-elles être présentes sur deux continents aussi éloignés ? Mais la découverte montre que Robsonomyia a également vécu en Europe, une zone géographiquement située entre le Japon et l’Amérique du Nord. « Cela suggère qu’il y a des millions d’années, ce genre avait une répartition beaucoup plus vaste dans l’hémisphère nord », explique Pełczyńska.
L’équipe de chercheurs n’était initialement pas à la recherche de ce moucheron. Leur objectif principal était l’étude des fragments d’ambre pour comprendre l’impact des changements climatiques sur la faune de l’Éocène, période qui s’est déroulée il y a environ 56 à 40 millions d’années. À cette époque, la Terre a connu une augmentation de huit degrés Celsius, liée à une forte concentration de carbone dans l’atmosphère, un phénomène qui présente des similitudes troublantes avec le réchauffement climatique actuel.
Les scientifiques espéraient, en étudiant les fossiles d’insectes piégés dans l’ambre, mieux comprendre comment ces changements environnementaux ont affecté les espèces qui subsistent encore aujourd’hui. L’ambre, souvent qualifié de capsule temporelle, conserve des organismes avec une précision fascinante.
Robsonomyia henningseni
Lorsqu’ils ont examiné un morceau d’ambre vieux de millions d’années, Pełczyńska et son équipe ne s’attendaient pas à y découvrir une nouvelle espèce. « Dès que nous avons trouvé ce spécimen de Robsonomyia henningseni, nous avons immédiatement compris qu’il était unique. Il ne ressemblait à rien de ce que nous avions trouvé jusque-là », raconte-t-elle.
Robsonomyia henningseni vivait dans l’actuelle Fennoscandie (Europe du Nord), qui était alors une région tropicale ou subtropicale avec des forêts denses et humides, il y a environ 35 à 40 millions d’années. Ce moucheron prédateur utilisait des toiles collantes enduites de fluides acides pour capturer et tuer de petits invertébrés. La découverte de ce fossile représente une occasion rare d’étudier les schémas de migration et de distribution de cette espèce au fil du temps.
Selon Pełczyńska, Robsonomyia est un genre peu connu, et une grande partie de sa biologie demeure un mystère. En élucidant comment les organismes se sont dispersés au fil des âges, nous pouvons mieux comprendre les facteurs qui influencent la répartition actuelle des espèces.
Une préservation remarquable, mais pas d’ADN récupérable
Le fossile de Robsonomyia henningseni offre un niveau de détail impressionnant, notamment grâce à la fossilisation en trois dimensions permise par l’ambre. L’insecte semble avoir été figé dans le temps, ce qui permet aux chercheurs d’étudier sa morphologie avec une précision exceptionnelle. Cependant, malgré cet état de conservation presque parfait, le fossile ne contient plus d’ADN exploitable.
Au fil des millions d’années, les processus chimiques et physiques ont dégradé le matériel génétique de l’insecte, rendant impossible toute extraction d’ADN pour le moment. « Même si ces fossiles sont en parfait état sur le plan visuel, ils ont subi de nombreuses transformations au fil du temps, ce qui fait que leur ADN s’est complètement dégradé », explique Pełczyńska.
Bien que l’étude génétique de Robsonomyia henningseni ne soit pas encore possible, les chercheurs ne perdent pas espoir. « Les progrès technologiques pourraient un jour permettre de récupérer des fragments d’ADN à partir de ces anciens fossiles », affirme Pełczyńska. Par ailleurs, un insecte figé dans l’ambre a été trouvé collé à la mâchoire d’un dinosaure vieux de 75 millions d’années.
Par Eric Rafidiarimanana, le
Source: ZME Science
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