En Antarctique, la perte record de glace de mer enregistrée l’an passé a entraîné un échec reproductif catastrophique des colonies de manchots empereurs de la région de Bellingshausen.
Une hécatombe
Contrairement aux autres manchots, les manchots empereurs (Aptenodytes forsteri) se reproduisent sur la glace de mer plutôt que sur la terre ferme. Éclosant en août, correspondant à l’hiver austral, leurs poussins gris et duveteux ont besoin d’une glace de mer stable jusqu’en décembre pour que leurs plumes noires imperméables poussent et que leur masse musculaire se développe. Si la banquise se brise au cours de ces mois cruciaux, ces derniers tombent dans l’eau et périssent.
Dans le cadre de travaux publiés dans la revue Communications Earth & Environment, Peter Fretwell et ses collègues du British Antarctic Survey se sont appuyés sur l’imagerie satellite pour étudier l’évolution des colonies de manchots empereurs de la mer de Bellingshausen, située à l’ouest de la péninsule antarctique.
Pour affronter les températures glaciales (jusqu’à -60 °C), ces oiseaux marins se serrent les uns contre les autres, ce qui se traduit par une accumulation d’excréments (ou guano) dont la teinte brunâtre contraste largement avec celle de la glace. Une fois la colonie localisée, les chercheurs peuvent s’appuyer sur les clichés à haute résolution capturés depuis l’espace pour établir le nombre d’individus qui la composent.
Suite à la rupture d’une grande partie de la glace de mer fin 2022, il s’est avéré que quatre des cinq colonies de Bellingshausen (recensant plusieurs milliers de couples reproducteurs) avaient perdu la totalité de leurs poussins.
L’ensemble des colonies antarctiques affectées
Bien que l’étude se soit concentrée sur la zone de la mer de Bellingshausen, les images satellites indiquent que 19 des 62 colonies connues en Antarctique ont été récemment affectées par la perte de glace de mer. Selon ses auteurs, de telles observations appuient les modèles prévoyant la disparition de jusqu’à 90 % des colonies de manchots empereurs d’ici 2100, si le réchauffement climatique se poursuit au rythme actuel.
« Les colonies peuvent perdre des poussins lors de fortes tempêtes ou lorsque des vents violents brisent la glace de mer, mais c’est la première fois qu’un échec généralisé de la reproduction est lié à son recul », conclut l’équipe.
Par Yann Contegat, le
Source: New Scientist
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