Vue d’artiste de différents spécimens de Scelidosaurus — © John Sibbick

Des chercheurs britanniques ont récemment pu étudier en détail le premier squelette complet de dinosaure jamais identifié. Un analyse minutieuse ayant permis de confirmer sa position dans l’arbre généalogique du Jurassique plus d’un siècle et demi après sa découverte.

Un long chemin

Plus de 160 ans après sa découverte, le premier squelette complet de dinosaure a finalement été correctement reconstruit et étudié. Trouvés sur la côté jurassique de l’ouest du Dorset (Angleterre), les restes fossilisés d’un Scelidosaurus vieux de 193 millions d’années avaient été conservés pendant plus d’un siècle et demi au Musée d’histoire naturelle de Londres avant d’être entièrement décrits et analysés par le Dr David Norman du Département des sciences de la terre de l’université de Cambridge, dans le cadre de travaux présentés dans le Zoological Journal of the Linnean Society of London.

Les dinosaures faisant aujourd’hui partie intégrante de notre culture, il reste assez surprenant que leur découverte n’ait eu lieu que vers 1824. En réalité, le mot « dinosaure » n’a été inventé par le biologiste britannique Richard Owen qu’en 1842. Avant cette date, des fossiles de dinosaures avaient été ponctuellement découverts, mais on estimait alors qu’il s’agissait de restes de dragons ou de géants.

Lorsque les premiers spécimens de dinosaures ont été identifiés, c’était à partir de fragments plutôt que de squelettes complets, ce qui a donné lieu à certaines reconstructions qui paraissent aujourd’hui pour le moins étranges. Si les premières reconstitutions grandeur nature, réalisées en béton, avaient été exposées au Crystal Palace de Londres à partir de 1854, ceux-ci étaient représentés comme des créatures massives et allongées, possédant une morphologie proche de celle de l’iguane ou du lézard, plutôt que les spécimens majestueux et agiles dépeints par Jurassic Park en 1991.

Nouveau regard sur le Scelidosaurus

Quant au Scelidosaurus, ses premiers restes ont été découverts dans une carrière en 1858 par James Harrison et envoyés à Owens au British Museum. Comme ces restes étaient mélangés à des os d’autres animaux, Owen demanda à Harrison d’en recueillir davantage. En un an environ, Harrison avait trouvé le tout premier squelette complet d’un seul dinosaure. Suite à cette réalisation, Owen publia deux courts articles incomplets, mais le dinosaure ne fut jamais complètement décrit et les restes finirent par être stockés au Muséum d’histoire naturelle – le sort d’un nombre surprenant de découvertes scientifiques.

Il a fallu attendre 2017 pour que Norman offre un nouveau regard sur le Scelidosaurus, en réalisant une reconstitution correcte de son squelette et en confirmant sa place dans l’arbre évolutionnaire des dinosaures.

Jusqu’à récemment, les scientifiques pensaient que les dinosaures se divisaient en deux groupes : les saurischiens (à bassin de lézard) et les ornithischiens (à bassin d’oiseau), mais Norman et son équipe ont remis cette théorie en question, en montrant que les dinosaures à bassin d’oiseau et de lézard possédaient un ancêtre commun, et que le Scelidosaurus trouvait sa place près de la racine des ornithischiens.

Mieux comprendre la biologie des premiers dinosaures et leurs relations sous-jacentes

« Auparavant, on ignorait que l’extrémité arrière de son crâne était pourvue de cornes », explique Norman. « Il disposait également de plusieurs os qui n’avaient jamais été identifiés chez aucun autre dinosaure. La texture grossière des os du crâne montre aussi clairement que celui-ci était recouvert de scutelles cornées rigides [excroissances composées de chitine, d’os ou d’écaille] – semblables à celles que l’on observe chez les tortues modernes. »

Le Scelidosaurus possédait également une série de plaques osseuses pointues, ce qui laissait jusqu’à récemment penser qu’il s’agissait d’un ancêtre des stégosaures, pourvus de plaques vertébrales et d’une queue acérées, et des ankylosaures, dont la peau s’apparentait à une véritable armure et la queue à une massue. Grâce à ces nouveaux travaux, les chercheurs britanniques ont pu déterminer qu’il était en réalité parent des seuls ankylosaures.

« Il est malheureux qu’un dinosaure aussi important, découvert à un moment si critique des premières études sur les dinosaures, n’ait jamais été correctement décrit », souligne Norman. « Mais à présent, il a – enfin ! – été décrit en détail et il a permis de fournir de nombreuses informations nouvelles et inattendues concernant la biologie des premiers dinosaures et de leurs relations sous-jacentes. C’est dommage que ce travail n’ait pas été fait plus tôt mais, comme on dit, mieux vaut tard que jamais », conclut le chercheur.

Il y a quelques semaines, l’analyse de fossiles découverts sur l’île de Wight avait quant à elle révélé que ceux-ci appartenaient à une espèce auparavant inconnue et proche du redoutable T. rex.

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