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Les chasseurs-cueilleurs domptaient déjà la mer il y a 8 500 ans pour partir explorer l’Afrique

Ils avaient déjà une âme d'explorateur

chasseurs-cueilleurs
Image d’illustration — Daria Yehorova / Shutterstock.com

Une récente étude génétique suggère que des chasseurs-cueilleurs européens auraient voyagé jusqu’en Afrique du Nord il y a environ 8 500 ans, probablement en traversant la mer Méditerranée. Des analyses ADN effectuées sur des restes humains découverts en Tunisie et dans le nord-est de l’Algérie révèlent en effet une part d’ascendance européenne parmi les populations locales de l’époque.

Des preuves génétiques inédites

Publiée dans la revue Nature, cette étude repose sur l’analyse de l’ADN ancien prélevé sur plusieurs individus de la région du Maghreb oriental. Les chercheurs ont identifié chez un des sujets étudiés, découvert sur le site tunisien de Djebba, environ 6 % d’ADN issu d’ancêtres chasseurs-cueilleurs européens. Cette découverte constitue la première preuve génétique tangible d’une interaction entre les populations préhistoriques d’Europe et d’Afrique du Nord.

Depuis plusieurs décennies, certains anthropologues avaient émis l’hypothèse d’un contact entre ces groupes sur la base d’analyses morphologiques des squelettes. Toutefois, faute de preuves solides, ces théories restaient spéculatives. 

Aujourd’hui, les analyses génétiques viennent confirmer cette hypothèse. « Nos nouvelles données génomiques valident ces premières suppositions, ce qui est une avancée scientifique passionnante », explique Ron Pinhasi, anthropologue à l’université de Vienne et coauteur de l’étude.

Une transition méconnue vers l’agriculture

L’âge de pierre s’est étendu sur plusieurs millénaires, débutant il y a environ 3 millions d’années avec l’utilisation des premiers outils en pierre et prenant fin il y a environ 5 000 ans avec l’apparition des métaux et des premières civilisations. Durant cette période, les populations d’Europe et d’Afrique du Nord vivaient principalement de chasse et de cueillette avant d’adopter progressivement l’agriculture et des modes de vie plus sédentaires.

Cependant, la transition vers l’agriculture en Afrique du Nord demeure une question largement inexplorée. Jusqu’à présent, la plupart des recherches génétiques portaient sur des sites situés dans le Maghreb occidental, notamment au Maroc. David Reich, coauteur et généticien à la Harvard Medical School, a souligné l’ignorance historique de cette région, la qualifiant de « trou énorme » dans nos connaissances.

Des études antérieures concernant le Maghreb occidental avaient révélé que les populations de cette région affichaient un taux élevé d’ascendance européenne agricole, jusqu’à 80 % dans certaines communautés, en raison des migrations d’agriculteurs via le détroit de Gibraltar il y a environ 7 000 ans.

Des chasseurs-cueilleurs européens en mer ?

Contrairement au Maghreb occidental, les résultats de cette nouvelle étude indiquent que les populations du Maghreb oriental étaient beaucoup plus isolées génétiquement. Elles présentaient peu d’influences issues des agriculteurs européens, conservant au contraire une part plus marquée de chasseurs-cueilleurs européens parmi leurs ancêtres. Cette découverte laisse supposer que ces premiers Européens auraient traversé la Méditerranée bien avant l’essor de l’agriculture dans la région.

Les chercheurs ont examiné l’ADN prélevé sur les os et les dents de neuf individus ayant vécu entre 10 000 et 6 000 ans avant notre ère. Parmi eux, un individu ayant vécu il y a environ 8 500 ans présentait 6 % d’ADN commun avec des chasseurs-cueilleurs européens, ce qui suggère que ces derniers auraient entrepris des voyages maritimes à l’époque. Ils auraient pu utiliser des canoës en bois pour parcourir les distances séparant l’Europe de l’Afrique du Nord.

D’autres indices matériels viennent appuyer cette théorie. Les archéologues ont retrouvé des fragments d’obsidienne d’origine volcanique, provenant de l’île de Pantelleria, située dans le détroit de Sicile. Ce qui suggère que ces chasseurs-cueilleurs auraient pu effectuer des escales sur différentes îles méditerranéennes au cours de leur périple.

Un autre élément clé de l’étude est la faible présence d’ascendance agricole européenne dans cette partie du Maghreb. Contrairement aux populations du Maroc, qui ont rapidement adopté l’agriculture sous l’influence des migrations européennes, celles du Maghreb oriental semblent avoir conservé un mode de vie de chasseurs-cueilleurs bien plus longtemps. En effet, l’adoption de l’agriculture dans cette région ne se serait généralisée qu’aux alentours de 1 000 ans avant notre ère. Par ailleurs, une étude dévoile comment les chasseurs-cueilleurs ont évité la consanguinité.

Par Eric Rafidiarimanana, le

Source: Live Science

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