Quelqu’un découpe son steak via Shutterstock

C’est l’un des principaux traits qui différencient l’Homme des autres espèces animales : sa morale. Une caractéristique qui pousse l’être humain à faire des choix « conscients » et à préférer, de manière générale, le bien au mal. Mais à l’heure de se nourrir, l’humanité consomme d’autres espèces sans se soucier de leur bien-être, quitte à industrialiser outrageusement leur production. SooCurious vous explique pourquoi l’Homme mange les animaux sans culpabilité.

Inconsciemment, l’Homme fait systématiquement face à un étonnant conflit mental : le « paradoxe de la viande ». Il consiste en une opposition psychologique entre la conviction morale qu’il est mal d’infliger mort ou souffrance à d’autre êtres vivants, et le désir d’apprécier un bon morceau de viande. C’est ce qu’on appelle aussi une « dissonance cognitive ».

Le paradoxe de la viande n’est pas la seule dissonance cognitive qui affecte l’Homme : de la même manière qu’elle mange de la viande en sachant qu’elle affecte le bien-être animal, l’espèce humaine persiste à polluer son environnement pour se développer, quitte à détruire son propre habitat. Egalement, les fumeurs détruisent à petit feu leur santé dans le seul but d’apprécier la nicotine émise par une cigarette. Dans tous ces cas, l’Homme fait abstraction de la morale au profit de son intérêt. Mais comment, alors, amenuise-t-on notre culpabilité au point de pouvoir agir contre la morale ?

Tout se joue dans la tête de la personne soumise à une dissonance morale. Dans le cas de la consommation d’animaux, les omnivores que nous sommes vont amenuiser la croyance dérangeante selon laquelle la consommation d’autres espèces est nuisible à leur bien-être. Ainsi, chaque individu mangeur de viande aura tendance à nier que les animaux de la ferme pensent de la même manière que les humains, ou même que d’autres animaux perçus comme plus intelligents (comme nos chiens et chats, par exemple). Cela réduit alors leur valeur intrinsèque dans nos esprits et les place en dehors du cercle de préoccupation morale. C’est ce qui nous pousse à pouvoir manger des espèces animales comme les bovins ou les porcins, quand le fait de savourer un chien ou un chat nous parait absolument proscrit et rebutant.

Mais la désignation de certains animaux comme de la nourriture n’est pas commune à tous les hommes. Ainsi, la Grande-Bretagne s’était vivement offusquée du scandale de l’étiquetage de la viande de cheval, sa consommation étant perçue outre-Manche comme particulièrement horrible. Pourtant, à quelques dizaines de kilomètres seulement de l’île britannique, beaucoup d’autres peuples admettent et pratiquent la consommation chevaline. Plus loin du continent européen, des cultures étrangères comme la Chine ou l’Inde consomment quotidiennement des espèces qui nous paraissent immangeables.

L’abstraction de la morale au profit du désir, dans le cas de la viande, est un processus particulièrement rodé : pour ne pas voir la part de sensibilité des animaux consommés, l’Homme aura tendance à minimiser son action meurtrière et à se distancier de l’animal dévoré. C’est ainsi que la viande est présentée en barquettes, en tranches, en dés, et qu’aucun animal ne figure sur les emballages. De la même manière, personne ne mange de « cochon » ou de « vache », mais du « porc » ou du « boeuf ».

 

Le fait d’ignorer la sensibilité de certains animaux, de masquer l’aspect initial des espèces consommées, et ainsi de dépasser la dissonance cognitive, révèle un lien inquiétant entre la dévalorisation des animaux et la déshumanisation de notre propre espèce. Ainsi, réduire l’intelligence et la valeur morale des personnes que nous considérons comme étrangères est souvent lié à la discrimination et est considéré comme un mécanisme important dans les nombreuses atrocités de l’histoire humaine.

Cette explication sur le paradoxe de la viande est réellement surprenante. Elle met en valeur un aspect particulièrement violent de l’espèce humaine qui la pousse à ne pas voir la cruauté de ses actes pour justifier ses désirs. Surtout, elle nous permet de nous interroger sur le bien-fondé de notre régime alimentaire, et sur la nécessité de produire et de se nourrir d’animaux. Si ce genre d’article vous intéresse, découvrez cette étude qui montre que l’aîné d’une fratrie est statistiquement le plus intelligent. Ressentez-vous le « paradoxe de la viande » dans votre esprit ou pensez-vous échapper à cette logique de raisonnement qui nous pousse à faire abstraction du bien-être animal ?

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