Une étude présentée en septembre dernier à l’EPSC (European Planetary Science Congress) à Genève, a offert un nouveau regard sur le climat de Vénus : sans un événement encore inexpliqué d’une ampleur sans précédent il y a 700 millions d’années, la planète aurait pu offrir des conditions de vie similaires à celles que propose la Terre.
Une planète aux conditions infernales, mais habitable autrefois ?
En 1978, l’humain s’est approché pour la première fois de Vénus. Avec la sonde Pioneer 12, la NASA découvrait la présence passée d’océans sur la surface. Plusieurs missions ont par la suite tenté de déterminer pourquoi. En effet, la planète Vénus, notre plus proche voisine du côté du Soleil, est aujourd’hui étouffée sous des températures avoisinant les 460 °C et des pressions près de 90 fois supérieures à celles de la Terre. Dans une étude présentée en septembre, Michael Way et Anthony Del Genion, du Goddard Institute for Space Science de la NASA, avancent qu’il y a plus de 700 millions d’années, Vénus devait ressembler à la Terre, mais un événement climatique d’une ampleur incomparable a bouleversé la structure de la planète.
Les scientifiques ont ici créé une simulation observant l’environnement de Vénus selon différents niveaux d’eau, afin de déterminer la nature précise de son climat, avant le bouleversement. Les simulations faisaient varier la profondeur des océans couvrant la planète : trois simulations, où la topographie de Vénus était la même que celle d’aujourd’hui, prenaient en compte un océan de 10 mètres de profondeur, un autre de 310 mètres de profondeur, et enfin une étendue d’eau coincée sous la surface. Dans deux autres, présumant d’une topographie semblable à celle de la Terre, les chercheurs observaient les conséquences d’un océan de 310 mètres, ou encore une couverture totale de la surface de la planète sous plus de 150 mètres d’eau.
Les résultats tendent au même constat : Vénus aurait pu maintenir des température stables pendant trois millions d’années, entre 20 °C et 50 °C. Pourtant, un événement, qui a mis à nu 80 % de la surface de la planète, a changé la donne, par la relâche dans l’atmosphère de CO2 contenu dans la croûte de la planète — la planète, auparavant, aurait pu être habitable. Michael Way explique : « Notre hypothèse est que Vénus aurait pu avoir un climat stable pendant des milliards d’années. ll est possible que le ressurgissement presque total de la surface de la planète soit responsable de la transformation du climat, depuis des conditions quasiment similaires à celles de la Terre à la fournaise infernale que nous voyons aujourd’hui. »
Les causes de ce bouleversement sont floues
Les causes de cette relâche de CO2 de la croûte découverte ne sont pas encore bien définies : « Quelque chose est arrivé sur Vénus où une immense quantité de gaz a été lâchée dans l’atmosphère sans pouvoir être réabsorbée par le sol [c’est-à-dire par les silices qui, il y a des milliards d’années, ont capturé le CO2 de l’atmosphère de la Terre et de Vénus]. Sur Terre nous avons quelques exemples de relâches de gaz massives, par exemple la création des trapps de Sibérie il y a 500 millions d’années qui a conduit à une extinction de masse, mais rien de cette échelle. L’événement a complètement transformé Vénus. »
Selon les scientifiques, la transition brutale peut être due à une grande quantité de magma souterrain relâchant des concentrations critiques de CO2 dans l’atmosphère, sans pour autant remonter complètement à la surface : ainsi, la couche de magma solidifiée aurait créé une barrière, empêchant les roches de capturer le CO2 relâché. Depuis, l’atmosphère s’est épaissie pour devenir 92 fois plus dense que celle de la Terre, ce qui rend difficile l’envoi de tout outil d’exploration humain qui serait immédiatement détruit.
Une découverte pour le futur de l’homme ?
En marge de l’étude sur le climat, les résultats remettent en question l’inhabitabilité de Vénus, qui jusqu’ici était considérée trop proche du Soleil, de ce fait trop exposée à ses radiations pour abriter de l’eau sous forme liquide. Selon Michael Way, les simulations démontent cette limite : « Vénus reçoit aujourd’hui deux fois plus de radiations solaires que la Terre. Cependant, dans tous les scénarios que nous avons modelés, nous avons découvert que Vénus pouvait tout de même supporter des températures de surface permettant la présence d’eau liquide. »
Les enjeux pour les Terriens sont bien réels : nous pourrions ainsi remettre en question les critères d’habitabilité d’une planète, ce qui permettrait, à terme, d’ouvrir les recherches à davantage d’exoplanètes potentiellement habitables.
« Nous avons besoin de davantage de missions pour étudier Vénus et avoir une compréhension plus détaillée de son histoire et de son évolution. Cependant, nos modèles montrent qu’il y a une réelle possibilité que Vénus puisse avoir été habitable, et radicalement différente de la Vénus que nous voyons aujourd’hui. Cela ouvre à toutes sortes d’implications pour des exoplanètes trouvées dans ce qui s’appelle la « Venus Zone », qui pourrait, en fait, permettre de l’eau liquide et des climats tempérés. »
Par Victor Chevet, le
Source: EuroPlanet Society
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