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Une nouvelle théorie suggère qu’un « Univers miroir » pourrait se cacher derrière le Big Bang

Cette possibilité apporterait une réponse à la question de la matière noire et supplanterait certaines des principales théories en cosmologie

Univers Miroir
— © Neil Turok, CC BY-SA

Depuis plusieurs décennies, notre compréhension de l’Univers n’a cessé de progresser, grâce à des avancées tant au niveau de la physique théorique que des technologies d’observation. Pourtant, malgré ces avancées, des questions fondamentales demeurent sans réponse. Nos télescopes modernes révèlent un cosmos étonnamment simple lorsqu’on l’observe à grande échelle, tandis que le grand collisionneur de hadrons (LHC) a démontré que, jusqu’à présent, la physique des particules ne dévie pas des modèles établis. Face à cette simplicité apparente, les théories actuelles, comme celles basées sur la théorie des cordes et l’inflation cosmique, semblent de plus en plus inadaptées. 

La remise en question des théories actuelles

L’approche dominante en cosmologie repose sur deux théories majeures : la théorie des cordes et l’inflation cosmique. La théorie des cordes propose que les constituants fondamentaux de l’Univers sont des boucles de minuscules cordes vibrantes. Cependant, elle nécessite l’existence de dimensions supplémentaires au-delà des trois dimensions spatiales que nous connaissons. Ces dimensions supplémentaires seraient si petites qu’elles restent indétectables, rendant ainsi la théorie difficilement testable. Par ailleurs, cette complexité rend le modèle théorique extrêmement flexible, mais aussi problématique, car il peut générer une multitude d’Univers hypothétiques, chacun doté de lois physiques différentes.

L’inflation cosmique, quant à elle, est un scénario développé dans les années 1980 pour expliquer pourquoi l’Univers semble si uniforme et plat à grande échelle. Selon cette théorie, l’Univers aurait connu une expansion extrêmement rapide juste après le Big Bang, lissant ainsi toutes les irrégularités initiales. Cette phase d’inflation aurait également produit des variations de densité primordiales, nécessaires pour expliquer la formation des galaxies. Pourtant, malgré les efforts pour détecter des preuves, comme les ondes gravitationnelles prévues par ces modèles, les résultats se font toujours attendre.

L’absence de preuves expérimentales claires en faveur de l’inflation cosmique et de la théorie des cordes commence à susciter des doutes au sein de la communauté scientifique. Au fil des décennies, des théoriciens ont tenté de combler les lacunes en ajoutant des hypothèses supplémentaires, ce qui a rendu ces théories de plus en plus complexes et moins prédictives. Pourtant, les observations actuelles montrent un Univers plus simple que ce que ces modèles suggèrent, et de nombreux indices en faveur d’une complexité cosmique restent à prouver. Il est peut-être temps d’explorer des alternatives plus simples, qui pourraient mieux correspondre aux données observées.

L’hypothèse d’un Univers miroir 

Face aux limites des théories traditionnelles, de nouvelles approches émergent pour expliquer la structure et l’origine de l’Univers. Parmi les nouvelles hypothèses se détache l’idée d’un « Univers miroir ». Neil Turok, de l’université d’Édimbourg, et Latham Boyle ont proposé une autre explication des phénomènes cosmiques, qui n’implique pas l’inflation. Cette hypothèse repose sur une profonde symétrie appelée symétrie CPT (Charge-Parité-Temps), qui postule que chaque processus physique a un processus « miroir » dans lequel l’espace est inversé, le temps s’écoule en sens inverse et chaque particule est remplacée par son antiparticule.

Ce modèle pourrait permettre de rétablir la symétrie fondamentale CPT, tout en expliquant certaines caractéristiques énigmatiques de l’Univers, telles que l’abondance de particules par rapport aux antiparticules. L’un des principaux avantages de ce modèle est qu’il permet d’éviter le concept de singularité initiale, c’est-à-dire un point de densité et de température infinis au moment du Big Bang. Au lieu de cela, le Big Bang pourrait être perçu comme une frontière où deux Univers miroirs se rencontrent. De cette façon, l’Univers que nous observons serait le reflet d’un autre Univers, où le temps recule par rapport au nôtre.

L’hypothèse de l’Univers miroir apporte également une explication potentielle à la question de la matière noire. Dans notre Univers, nous observons que les neutrinos, des particules extrêmement légères, tournent toujours dans le sens dit « gaucher ». Cependant, selon le modèle du miroir, il devrait exister des neutrinos « droitiers » dans l’Univers opposé. Ces particules seraient presque indétectables dans notre réalité, ne se manifestant que par l’intermédiaire de la gravité. Cela en ferait des candidats idéaux pour la matière noire, cette substance mystérieuse qui compose environ 27 % de l’Univers.

Là où ce modèle devient particulièrement prometteur, c’est qu’il offre des prédictions vérifiables. Par exemple, il suggère que si la matière noire est constituée de neutrinos droitiers, alors l’un des neutrinos que nous connaissons dans notre Univers devrait être complètement dépourvu de masse. Des études en cours, basées sur l’observation des galaxies à grande échelle, pourraient bientôt confirmer ou infirmer cette hypothèse.

Univers Miroir
— © Drbogdan, Yinweichen / Wikimedia Commons

Une nouvelle approche pour expliquer l’entropie et la planéité de l’Univers

L’un des grands mystères de la cosmologie est de comprendre pourquoi l’Univers semble si plat et si homogène. L’inflation cosmique a été initialement proposée pour résoudre cette énigme, mais elle repose sur des hypothèses complexes. En s’appuyant sur la symétrie miroir, il est possible d’expliquer cette planéité à partir de principes plus simples.

L’entropie, une mesure du désordre d’un système, joue un rôle clé dans cette explication. Selon les travaux de Stephen Hawking et d’autres physiciens, les trous noirs possèdent une entropie bien définie. En appliquant ces principes à la cosmologie et en déterminant l’entropie d’Univers entiers, il a été démontré que l’Univers le plus probable (c’est-à-dire celui ayant la plus haute entropie) est plat et en expansion accélérée, comme celui que nous observons actuellement. Par conséquent, les arguments statistiques ne nécessitent pas d’inflation cosmique pour expliquer pourquoi l’Univers est lisse et plat et connaît une expansion accélérée légèrement positive.

En outre, les variations de densité de matière attribuées à l’inflation pourraient également trouver leur origine dans cette symétrie miroir. Les chercheurs ont récemment démontré que les variations de densité sont produites par un type particulier de champ quantique (un champ de dimension zéro). Cependant, ces fluctuations ne produisent pas les ondes gravitationnelles de grande longueur d’onde prédites par l’inflation.

Ces travaux, bien que nécessitant encore des validations supplémentaires, ouvrent de nouvelles perspectives pour la cosmologie. Leur démarche remet en question la complexité des théories dominantes et rappelle l’importance de la simplicité dans l’élaboration des modèles de l’Univers. Même si ces nouvelles hypothèses échouent à long terme, elles soulignent la nécessité pour les scientifiques de rester ouverts à des alternatives plus simples et potentiellement plus vérifiables. Par ailleurs, des étoiles sombres pourraient se cacher dans un Univers miroir.

Par Eric Rafidiarimanana, le

Source: The Conversation

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  • L’idée d’un « Univers miroir » est vraiment captivante et ça fait réfléchir sur la simplicité que l’on devrait rechercher dans les théories cosmologiques. C’est vrai que la tendance à compliquer les modèles avec des dimensions supplémentaires ou des hypothèses farfelues peut parfois nous éloigner de ce qui est observable. Si cette théorie du miroir offre une alternative plus vérifiable et élégante, c’est vraiment à explorer davantage. Ça pourrait ouvrir de nouvelles pistes passionnantes pour comprendre la matière noire et les mystères de notre cosmos. Espérons que les recherches à venir viendront confirmer ces idées !