proton
Image d’illustration — Mahir KART / Shutterstock.com

De récentes expériences indiquent que le proton, particule présente au cœur de chaque atome, possède une structure nettement plus complexe que les physiciens ne l’estimaient jusqu’à présent.

Des décennies de recherches

Alors que l’on pensait autrefois que les protons étaient indivisibles, des expériences ayant impliqué des accélérateurs de particules dans les années 1960 ont révélé qu’ils contenaient trois particules plus petites, appelées quarks. S’il en existe six types (ou saveurs) différents, le proton est censé contenir deux quarks up et un quark down.

Mais en mécanique quantique, la structure d’une particule est régie par des probabilités, ce qui signifie qu’il existe théoriquement une chance que d’autres quarks apparaissent à l’intérieur du proton sous la forme de paires matière-antimatière. En 1980, une expérience menée au CERN avait suggéré que le proton pourrait renfermer un quark charmé et son équivalent antimatière (appelé quark anticharmé), mais les éléments avancés avaient été jugés peu convaincants.

Si d’autres tentatives ont été réalisées au cours des décennies suivantes pour identifier ce constituant du proton, les différentes équipes impliquées ont obtenu des résultats contradictoires et eu du mal à séparer les éléments constitutifs intrinsèques du proton de l’environnement à haute énergie des accélérateurs de particules, où chaque type de quark est rapidement créé et détruit.

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Dans le cadre de travaux publiés dans la revue Nature, Juan Rojo et ses collègues de l’université Vrije d’Amsterdam ont pu montrer de façon probante qu’une minuscule partie de la quantité de mouvement d’un proton (environ 0,5 %) provenait effectivement d’un quark charmé. « Il est remarquable que, même après toutes ces décennies d’études, nous découvrions encore de nouveaux constituants du proton », a déclaré le physicien.

Une preuve solide

Rojo et son équipe ont utilisé un modèle d’apprentissage automatique pour créer des structures hypothétiques de proton composées de toutes les différentes saveurs de quarks, puis les ont comparées à plus de 500 000 collisions réelles enregistrées au cours de décennies d’expériences, notamment menées au Grand collisionneur de hadrons (LHC).

Selon Christine Aidala, de l’université de Washington, l’utilisation de l’apprentissage automatique s’est avérée cruciale, car elle a permis de générer des modèles auxquels les physiciens n’auraient pas nécessairement pensé, réduisant ainsi le risque de mesures biaisées.

Les chercheurs ont constaté que, lorsque le proton ne contenait pas de paire de quark charmé-anticharmé, il n’y avait que 0,3 % de chances d’obtenir les valeurs observées expérimentalement, conférant à leurs résultats un niveau de confiance de 3 sigmas. Bien qu’il s’agisse d’une preuve solide, davantage de recherches devront toutefois être menées pour passer au statut de « découverte », impliquant un niveau de confiance de 5 sigmas (soit une chance sur 3,5 millions que le résultat soit dû au hasard).

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D’importantes implications

Un certain nombre d’expériences menées au LHC s’appuyant sur des modèles précis de la sous-structure du proton, la prise en compte de ce quark charmé intrinsèque pourrait avoir un impact significatif sur leurs résultats.

« L’observatoire de neutrinos IceCube, installé en Antarctique et recherchant les neutrinos rares produits lorsque les rayons cosmiques heurtent des particules dans l’atmosphère terrestre, pourrait également devoir prendre en compte cette nouvelle structure », a expliqué Rojo. « La probabilité qu’un rayon cosmique frappe un noyau de l’atmosphère et produise des neutrinos est assez étroitement liée à la présence ou non d’un quark charmé. »

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