Beaucoup d’entre nous sont familiers avec les différents signes de la fatigue, mais surtout, du manque de sommeil : besoin de caféine, une fonction cognitive non optimale, etc. De plus, généralement, nous avons les pensées plus claires quand nous avons bien dormi, et les pensées embrouillées quand ce n’est pas le cas. Mais à quoi est-ce dû ?
La vitesse de production des protéines est réduite en cas de privation de sommeil
Ces « symptômes » ne sont pas inconnus aux neuroscientifiques qui observent nos rythmes circadiens ou quotidiens, des gènes « d’horloge », à travers des signaux lumineux et sombres externes. Ces gènes agissent effectivement comme des chronométreurs internes et des neurones qui se signalent les uns aux autres par l’intermédiaire de connexions dénommées synapses. Toutefois, jusqu’à présent, nous ignorions comment ces gènes et ces synapses agissent pour « alléger » notre cerveau au cours de notre sommeil.
Justement, des chercheurs ont tenté d’expliquer ce phénomène dans deux articles parus dans Science le jeudi 10 octobre 2019 et selon eux, les synapses sont au centre du processus de rafraîchissement de notre cerveau. Ils démontrent également que ces nœuds de communication neuronale sont à l’origine de nos préparations internes au sommeil ainsi que des effets que nous ressentons lorsqu’on est en manque de sommeil.
En effet, Scientific American rapporte que les chronométreurs cellulaires préparent rythmiquement les zones autour des synapses en prévision de la construction de protéines synaptiques durant le sommeil. Toutefois, les nouvelles recherches montrent également qu’en l’absence de sommeil, la vitesse des cycles réguliers des neurones dans la construction de ces protéines essentiels est réduite.
La pression du sommeil et l’horloge interne
En fait, selon les scientifiques, quand nous somnolons, deux facteurs entrent en jeu. D’une part, la « pression du sommeil » , c’est-à-dire, quand on veut de plus en plus dormir à mesure que la durée de veille s’allonge. D’autre part, notre horloge interne qui nous signale que c’est l’heure de dormir.
Dans la première étude, Sara Noya de l’Institut de pharmacologie et de toxicologie de l’Université de Zurich et ses collègues ont révélé que chez la souris, l’horloge interne régule la génération rythmique d’instructions ou de transcriptions pour la fabrication de protéines. Les chercheurs ont aussi découvert que céder à la pression du sommeil et dormir déclenchent les dernières étapes de la production de protéines.
L’équipe a également découvert l’existence de deux pics des activités neuronales dans une journée de 24 heures. Juste avant le moment du réveil et le moment du coucher, les neurones dans les zones cérébrales liées à la cognition remplissent les stations de signalisation d’une cellule de chronométrage avec deux sortes de transcriptions. Les transcriptions au « moment du coucher », concernent les protéines régulant la construction d’autres protéines tandis que les inscriptions au « moment du réveil » concernent les protéines liées à la fonction synapse. Ces molécules préparent ainsi le terrain pour le rafraîchissement rapide des synapses durant le sommeil. Toutefois, les souris dépourvues de gènes d’horloge importants n’ont pas montré ces pics.
Un cycle veille-sommeil régulier conduit donc à une production maximale des protéines à l’aube et au crépuscule.
Ces études pourraient expliquer beaucoup de choses
Toutefois, dans un article supplémentaire, Franziska Bruning de l’Université Ludwig Maximilian de Munich et de l’Institut Max Planck de biochimie de Martinsried, en Allemagne, et ses collègues, ont démontré que toutes les protéines produites par la cellule ne sont pas forcément actives. En effet, la fixation ou l’élimination d’une molécule de phosphate agit comme une bascule pour activer ou désactiver les protéines. En examinant de près ce processus, les chercheurs ont découvert que les niveaux de protéines marqués avec des phosphates atteignaient un pic deux fois. Le pic le plus important se produit avant le réveil et comme pour le cas des autres protéines, la privation de sommeil aplatit ces pics.
Le neuroscientifique Robert Green, du Southerwestern Medical Center de l’Université du Texas, qui n’a pas participé à l’étude, a déclaré que ces recherches sont « fascinantes » et qu’elles confirment l’existence d’un lien « soupçonné depuis longtemps » entre le chronométrage interne et les comportements de sommeil.
Selon Akhliseh B.Reddy, neuroscientifique à la Perelman School of Medicine de l’Université de Pennsylvanie, également extérieur à l’étude, « même si les études ont été effectués sur des souris, le cerveau de ces animaux s’est révélé être un substitut assez fiable à celui de l’homme ». Il ajoute que ces résultats ont des implications dans plusieurs domaines intéressants comme la manière dont nous consolidons les souvenirs pendant le sommeil.
Par Arielle Lovasoa, le
Source: Scientific American
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